Le gouvernement britannique va convoquer des élections anticipées pour le Stormont, l’Assemblée de l’Irlande du Nord, afin de sortir la province britannique du blocage politique. Depuis février, le Parti unioniste démocratique (DUP) pro-britannique s’est retiré du gouvernement de partage du pouvoir pour protester contre certaines dispositions post-Brexit, empêchant la formation d’un exécutif.
Les Nord-Irlandais vont devoir voter pour la deuxième fois cette année : Londres a dit, vendredi 28 octobre, être “dans l’obligation légale” de convoquer des élections anticipées pour cette province britannique en plein blocage politique autour des dispositions commerciales post-Brexit.
Après une réunion de la dernière chance des parlementaires nord-irlandais jeudi, la date-butoir fixée par Londres est passée sans que les unionistes, qui estiment que la place de l’Irlande du Nord au sein du Royaume-Uni est menacée, ne plient et n’acceptent de mettre fin à leur boycott des institutions locales.
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“J’ai l’obligation légale de convoquer des élections”, a déclaré à Belfast le ministre britannique chargé de l’Irlande du Nord Chris Heaton-Harris, indiquant qu’il donnerait davantage de précisions “la semaine prochaine”, près de six mois après le précédent scrutin.
Le blocage politique est dû au fait que le parti unioniste DUP, opposé aux dispositions post-Brexit, refuse de participer à l’assemblée locale, ce qui empêche la formation d’un exécutif. Ce dernier doit être partagé avec les républicains du Sinn Fein, partisans d’une réunification avec la République d’Irlande et victorieux des élections locales en mai, en vertu de l’accord de paix de 1998 qui a mis fin à trois décennies de conflit intercommunautaire (faisant 3 500 morts).
Abrogation de l’accord
Avant même le début de la réunion à l’assemblée locale jeudi à Belfast, le dirigeant du parti unioniste DUP Jeffrey Donaldson avait douché les espoirs déjà infimes d’un compromis, affirmant sans surprise que son parti “ne participerait pas à un exécutif tant qu’aucune action décisive n’ait été prise concernant le protocole”.
Les unionistes (surtout protestants) réclament l’abrogation de cet accord négocié entre Londres et Bruxelles au moment du Brexit, qui instaure un statut douanier particulier à la province pour éviter le retour d’une frontière physique avec la République d’Irlande voisine.
Selon eux, le protocole crée une frontière douanière de fait entre l’Irlande du Nord et le reste du pays, atteinte inacceptable à l’intégrité du Royaume-Uni, et perturbe les approvisionnements de la province.
La dirigeante du Sinn Fein, Michelle O’Neill, a accusé les unionistes de “nier le résultats de l’élection de mai” et de paralyser le pouvoir en pleine crise du coût de la vie.
“Nous respectons le mandat qu’ont reçu les autres partis, (…) nous demandons simplement que notre mandat soit respecté”, s’est justifié vendredi Jeffrey Donaldson sur la BBC. “Nous ne pouvons pas en toute conscience nommer des ministres dans un exécutif auquel on demande d’imposer un protocole qui nuit à notre économie et qui nuit aux gens.”
Dossiers gelés
Faute de gouvernement, c’est Londres qui gère les affaires courantes, mais de nombreux dossiers sont gelés.
Londres veut renégocier le protocole avec Bruxelles, qui n’accepte que des aménagements mineurs. Si le nouveau Premier ministre britannique Rishi Sunak a souligné qu’il voulait trouver une “solution négociée” sur la question, aucune avancée concrète n’a été mise sur la table pour le moment.
“Ces six derniers mois, on a eu le chaos à Westminster, on a eu trois Premiers ministres (…) et pendant ce temps rien n’a avancé pour résoudre le problème du protocole”, a déploré vendredi Jeffrey Donaldson.
Il a affirmé plus tôt cette semaine qu’il était “prêt à se lancer dans la bataille” électorale, moins de six mois après le dernier scrutin. Il a même averti que la propagande électorale du parti avait déjà été approuvée.
La défaite de son parti aux dernières élections reflète une tendance de fond dans la province britannique, créée à l’origine pour les protestants unionistes : les catholiques, qui représentent l’essentiel de la communauté républicaine, y sont désormais plus nombreux, selon un récent recensement, ce qui est de nature à encourager les partisans d’une réunification avec la République d’Irlande.
Avec AFP et Reuters