En 2017, le quotidien britannique The Guardian avait révélé le protocole mis au point par la couronne en cas de décès de la reine Elizabeth II. Intitulé “London Bridge”, celui-ci prévoit une série d’annonces et d’hommages, et détaille le déroulement des funérailles et des cérémonies qui s’étaleront sur une dizaine de jours.
Le Royaume-Uni retenait son souffle, jeudi 8 septembre, alors que les médecins ont déclaré l’état de santé de la reine Elizabeth II “préoccupant” et qu’une grande partie de la famille royale s’est rassemblée pour lui rendre visite à Balmoral, en Écosse, où elle se trouve actuellement.
La future mort de la souveraine est un tabou au Royaume-Uni – y penser relèverait même du “blasphème” pour certains Britanniques. Pourtant, le protocole qui suivra celle-ci a été préparé de longue date pour ne rien laisser au hasard.
En 2017, The Guardian avait détaillé ce protocole dans un article. Un article que Politico avait complété en 2021, s’appuyant sur des documents censés rester secrets. Leur révélation avait provoqué l’ire de la famille royale.
Le protocole en question porte le nom d’un pont, comme ceux de chaque funérailles royales. Celle du prince Philippe, duc d’Édimbourg, était ainsi l’opération “Forth Bridge”. Celles d’Elizabeth II porte le nom largement éventé d”opération “London Bridge”.
Les noms de code pour l’organisation de funérailles royales sont ceux de…ponts! “Forth Bridge” pour le duc d’Edimbourg, “London Bridge” pour Elizabeth II et “Menai Bridge” pour le prince de Galles. En cas de décès de la Reine, le mot de passe est “London Bridge is down!”
— Marc Roche (@MarcRoche18) February 18, 2021
L’annonce de la mort
L’équipe médicale de la reine veillera sur ses derniers instants, filtrant l’accès à la chambre ainsi que les informations rendues publiques.
Lorsqu’elle décèdera, c’est son secrétaire privé qui sera chargé d’annoncer la nouvelle au Premier ministre, par le biais d’une ligne sécurisée. La triste nouvelle sera ensuite transmise aux nations du Commonwealth, dont la reine est également cheffe d’État. Les ministres et hauts fonctionnaires seront quant à eux prévenus par mail.
La page d’accueil du site web de la famille royale sera remplacé par une page noire avec un court communiqué confirmant le décès. Tous les sites gouvernementaux britanniques porteront une bannière noire. Chaque officiel revêtira un brassard noir dont la taille a été même fixée, minutie britannique oblige.
Il est également prévu que les drapeaux soient mis en berne dans les dix minutes suivant l’annonce de la mort. La première allocution de l’héritier du trône, le prince Charles, devrait se tenir le soir-même de la mort de sa mère. Les deux chambres du Parlement seront aussi réunies. Les membres du gouvernement seront tenus au silence jusqu’à ce que le Premier ministre ou la Première ministre ait pris la parole depuis Downing Street.
Le lendemain du décès : Charles proclamé roi
La mort d’un souverain signifie cependant l’accession au trône d’un autre. Au lendemain de la mort de la reine, les drapeaux remonteront et un “conseil d’accession” se réunira dans le palais Saint-James pour proclamer Charles roi. Une proclamation qui devrait survenir sur les coups de 11 h. À ne pas confondre avec son couronnement, qui n’interviendra que quelques mois plus tard. Un généalogiste le nommera alors officiellement, selon le nom qu’il choisira.
Dans le même temps, le nouvel ordre de succession sera proclamé : le prince William deviendra premier dans l’ordre de succession et héritera du titre de prince de Galles, tandis que son fils, George, viendra occuper la seconde position.
Une inconnue demeure sur cette journée : une annonce quant au statut de Camilla Shand, la duchesse de Cornouailles, seconde épouse de Charles. En raison de l’hostilité d’une partie de l’opinion publique britannique, le cabinet du prince de Galles avait affirmé en 2005 que Camilla ne sera nommée que “princesse consort” si son époux venait à accéder au trône. Cependant, la reine Elizabeth II a déclaré publiquement lors de son jubilé de diamant en 2022 sa volonté qu’elle devienne “reine consort”.
Quelle que soit l’annonce de Charles, le nouveau roi rencontrera le Premier ministre dans l’après-midi, avant de prendre ensuite la route pour assister aux différents services commémoratifs un peu partout dans le pays, notamment à Édinbourg, Belfast et Cardiff.
J+2 : le rapatriement du corps
Différents scénarios sont prévus suivant le lieu de décès de la reine pour le rapatriement du corps. Parmi les possibilités, un scénario est particulièrement redouté : le décès à Balmoral, sa résidence en Écosse, où la reine passe habituellement trois mois de l’année.
Operation Unicorn is the part of Operation London Bridge should the Queen die in Scotland.
She will first lie in state at Holyrood Palace & have a service at St Giles’ before being taken by the Royal Train back to London. The Scottish Parliament will have a significant role.
— 🇺🇦 Lord Sir Jon of R 🆗 (@anataboga) September 8, 2022
Si elle décède à Balmoral, il s’agira de l’opération “Unicorn”. Il est prévu que son corps soit exposé dans son plus petit palais, Holyroodhouse, à Édimbourg. Puis, la dépouille ira à la cathédrale Saint-Gilles pour une messe, avant d’être placée à bord du train royal.
Le train rapatriera ensuite le corps à Londres, où il rejoindra la salle du trône au palais de Buckingham. Cependant, le transport préoccupe grandement les officiels en raison de la probable présence massive de foule pour saluer le train tout au long du trajet.
Le transfert à Westminster et l’hommage public
Selon Politico, à J+5, le cercueil sera transféré depuis Buckingham vers le palais de Westminster. Cela constituera le premier défilé militaire de l’opération “London Bridge”. De J+6 à J+8,, le public pourra se rendre sur place pour rendre hommage à la souveraine, 23 heures sur 24. Un demi-million de personnes sont attendues et un système de créneaux horaires est prévu pour éviter aux VIP de faire la queue.
Les funérailles de la reine
Les funérailles se tiendront dix jours après la mort de la reine. Big Ben sonnera à 9 h, puis une procession guidera le cercueil du palais de Westminster à l’abbaye de Westminster et l’atteindra à 11 h.
The Guardian décrit alors un pays figé : les gares cesseront leurs annonces, les bus s’arrêteront au bord de la route. À midi, non pas une, mais deux minutes de silence seront tenues à travers le pays. Le jour sera déclaré jour de deuil national, mais ne sera pas férié pour autant.
La reine sera enterrée à la chapelle Saint-Georges de Windsor, aux côtés du prince Philippe, son époux décédé en avril 2021.