Dernier dirigeant de l’Union soviétique, Mikhaïl Gorbatchev est décédé mardi, à l’âge de 91 ans. Le prix Nobel de la paix 1990 restera comme l’homme qui a contribué, malgré lui, à l’éclatement de l’URSS.
Le dernier dirigeant de l’Union soviétique, Mikhaïl Sergueievitch Gorbatchev s’est éteint, mardi 30 août, à 91 ans. Considéré comme un des personnages clés de la fin du XXe siècle, il restera dans l’Histoire comme celui qui a contribué, malgré lui, à la chute des régimes communistes en Europe de l’Est et à l’éclatement de l’Union soviétique en 1991. Plus populaire à l’Ouest que chez lui où il fut décrit comme le fossoyeur du communisme, Gorbatchev s’est vu décerner le prix Nobel de la paix en 1990 en reconnaissance de sa contribution essentielle à la fin de la Guerre froide.
Un apparatchik au sommet de l’URSS
Né en 1931 dans la région de Stavropol, dans le sud de la Russie, il travaille dès l’âge de 13 ans dans une ferme collective. Militant actif au sein de la Ligue de la jeunesse communiste à partir de 1946, il intègre le Parti communiste de l’Union soviétique (PCUS) en 1952 alors qu’il étudie le droit à Moscou. Son ascension jusqu’au sommet de la hiérarchie du Parti est dès lors fulgurante sous l’ère Brejnev. En 1970, il est désigné premier secrétaire du PCUS de la région de Stavropol. Un an plus tard, il est élu membre du Comité Central, la principale instance du pouvoir exécutif du parti. En 1978, il retourne vivre à Moscou, où il est nommé secrétaire du comité central chargé de l’agriculture. En 1980, il devient le plus jeune membre de l’histoire du PCUS à intégrer le Politburo, l’organe dirigeant du régime soviétique. Au lendemain du décès de Constantin Tchernenko, il est élu le 11 mars 1985, secrétaire général du PCUS, le septième depuis la révolution de 1917. Il est alors âgé de 54 ans.
Perestroïka et Glasnost
Bien qu’issu d’une nouvelle génération de dirigeants nés après la révolution, Gorbatchev est un communiste convaincu. Son but : sauver l’Union soviétique du déclin. Pragmatique et animé d’un esprit réformateur, il lance aussitôt les politiques de glasnost (transparence) et de perestroïka (restructuration). Le premier concept consistait à prendre des mesures pour démocratiser le régime en levant la censure sur la liberté d’expression et de la presse et en libérant des prisonniers politiques. La perestroïka, devait permettre à l’URSS de s’ouvrir vers l’extérieur et réformer en profondeur une économie soviétique en faillite, ruinée par la course à l’armement que lui livrent les États-Unis dans le cadre de la Guerre froide.
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Il entame dans ce sens des négociations avec le président américain Ronald Reagan qui aboutissent à créer un climat de détente. La signature de plusieurs accords visant à réduire les arsenaux nucléaires des deux parties, dont le traité de Washington signé le 8 décembre 1987, couronne leurs efforts. Une démarche pour laquelle il se voit décerner le prix Nobel de lapPaix en 1990. Cette ouverture prônée par Gorbatchev ouvre la voie à l’évacuation des troupes soviétiques embourbées en Afghanistan en 1989, et à un rapprochement la même année avec la Chine, mettant fin à trente ans de brouille entre les deux géants communistes.
La chute de Gorbatchev et de l’URSS
Ses avancées en matière de politique étrangère ne parviennent pourtant pas à masquer son impopularité grandissante à l’Est. Ses réformes économiques provoquent des contestations internes, favorisées par la glasnost. Trop tardives ou trop brutales pour un système non préparé à l’économie de marché, elles sont à l’origine de plusieurs dysfonctionnements et d’un vaste mécontentement social. La contestation s’étend dans les pays d’Europe de l’Est, comme en Pologne et en Ukraine. L’URSS vacille. La chute du mur de Berlin, symbole par excellence de la Guerre froide, en novembre 1989, entraîne avec lui l’émancipation des pays du bloc de l’Est, satellisés par l’URSS. Contrairement à ses prédécesseurs, Gorbatchev n’envoie pas les chars soviétiques pour réprimer ces nouveaux mouvements qui semblent le dépasser.
La déliquescence de l’Empire soviétique entraîne fatalement la chute de son chef. Ce dernier avait pourtant renforcé son pouvoir en se faisant élire président du présidium du Soviet suprême (chef de l’État) en 1988, puis un an plus tard, président du Soviet suprême, et enfin en 1991, président de l’URSS. Jamais un homme n’avait concentré autant de pouvoir entre ses mains. Mais accusé de favoriser la chute du régime, Gorbatchev est dans la ligne de mire de l’aile dure du PCUS. En août 1991, il est victime d’une tentative de putsch fomenté par des conservateurs. Placé en résidence surveillée, en compagnie de sa femme Raïssa, alors qu’ils sont en vacances sur les bords de la mer Noire, il refuse de signer sa lettre de démission. Affaibli et marginalisé, il assiste à la montée en puissance des réformateurs, dont Boris Eltsine, président de la Fédération russe, qui lui confisque le pouvoir à Moscou. Sa démission, le 25 décembre 1991, sonne le glas de l’URSS.
Conférences, cinéma et publicité
Très engagé depuis sa chute auprès de plusieurs causes humanitaires et environnementales, il tente un retour sur la scène politique russe lors de l’élection présidentielle de 1996. Mais il ne récoltera qu’un peu plus de 1 % des suffrages. Malgré cet échec sans appel, il participe à la création de plusieurs partis politiques au cours des années 2000 (Parti social-démocrate de Russie en 2001, l’Union des sociaux-démocrates en 2007 et Parti démocratique indépendant de Russie en 2009), sans succès.
Il se fait surtout remarquer lors d’apparitions atypiques pour un ancien dirigeant communiste, notamment au cinéma, où il joue son propre rôle dans “Si loin, si proche” de Wim Wenders, et dans quelques publicités, où il prête son image à Pizza Hut et à Louis Vuitton. De nombreux prix lui sont décernés au cours des dernières années de sa vie, récompensant son action dans le cadre de la dénucléarisation de la planète et de sa sauvegarde. Sa dernière apparition politique marquante date de novembre 2009, lors de la commémoration du 20e anniversaire de la chute du mur de Berlin.