Depuis la fin des restrictions sanitaires liées à la pandémie de Covid-19, les aéroports européens peinent à recruter du personnel, tandis que des appels à la grève au sein de plusieurs compagnies aériennes pourraient perturber les départs en vacances.
Retards, vols annulés, files d’attente interminables… Les aéroports européens, débordés par la reprise soudaine du trafic, s’attendent au pire cet été, en raison du manque de personnel et de plusieurs appels à la grève.
Dès ce week-end en France, Espagne, Belgique, Italie et Portugal, les personnels navigants et au sol de la compagnie low-cost irlandaise Ryanair seront en grève pour protester contre leurs conditions de travail et réclamer des hausses de salaire.
En France, “la compagnie ne respecte pas les temps de repos tels qu’ils sont prévus par le code de l’aviation civile”, a expliqué le représentant du Syndicat national des personnels navigants commerciaux (SNPNC), Damien Mourgues. Son syndicat demande aussi une revalorisation salariale pour des salariés qui sont “payés au Smic”.
“Les vols continueront même si un syndicat de ‘Mickey’ fait grève”
Des revendications balayées sans ménagement par le patron de Ryanair, Micheal O’Leary. “Nous assurons 2 500 vols par jour. La plupart d’entre eux continueront à l’être, même si un syndicat de ‘Mickey’ fait grève en Espagne ou si les syndicats belges du personnel de cabine veulent faire grève”, a-t-il assuré lors d’une conférence de presse, mardi 14 juin.
Ryanair n’est pas la seule compagnie où plane la menace d’un mouvement social en pleine période estivale. La colère touche aussi la low-cost britannique EasyJet en Espagne, puisque l’Union syndicale ouvrière (USO) prévoit neuf journées de grève en juillet dans les aéroports de Barcelone, de Malaga et de Majorque.
D’après l’USO, “le personnel navigant d’EasyJet en Espagne a actuellement un salaire de base de 950 euros” par mois, soit le “salaire le plus bas” de “l’ensemble des bases en Europe”.
Hausse brutale du trafic
Après deux ans de turbulences liées aux restrictions sanitaires en raison de la pandémie de Covid-19, ces deux mouvements sociaux pourraient perturber encore un peu plus le fonctionnement des aéroports confrontés à une reprise brutale du trafic.
Selon l’Association du transport aérien international (IATA), la progression a atteint 76 % en mars par rapport à 2021, mais le trafic reste toutefois inférieur de 41 % comparé à 2019. Cependant, faute de personnel, certains aéroports sont déjà débordés.
Aux Pays-Bas, l’aéroport d’Amsterdam-Schipol peine depuis plusieurs semaines à faire face à l’afflux de passagers. De longues files d’attente se forment et des incidents parfois violents éclatent entre passagers au bord de la crise de nerfs. À Copenhague, Edimbourg ou encore Francfort, les voyageurs doivent également prendre leur mal en patience.
À Heathrow, plusieurs milliers de valises sont bloquées depuis la semaine dernière en raison d’une panne technique et du manque de personnel. Le problème est tel que l’aéroport londonien a été contraint de demander aux compagnies d’annuler 10 % de leurs vols.
🇬🇧 L’aéroport de Londres Heathrow a dû faire face à un dysfonctionnement de son système de bagages en fin de semaine, laissant des milliers de voyageurs sans valises samedi.
Face à cette situation, des passagers ont dû prendre leur avion sans leur valise.pic.twitter.com/IrekDkTdtC
— air plus news (@airplusnews) June 19, 2022
Signe de la désorganisation qui frappe les aéroports, le nombre de bagages mal acheminés a augmenté de 24 % dans le monde, selon le spécialiste du transport aérien Sita.
Le défi du recrutement
Lundi, la fédération européenne des travailleurs du transport (ETF) avertissait dans une lettre ouverte que “le chaos auquel fait face le secteur aérien ne fera que s’aggraver tout au long de l’été tandis que les travailleurs sont poussés à bout”. Selon Eurocontrol, l’organisation européenne pour la sécurité de la navigation aérienne, le trafic devrait atteindre cet été jusqu’à 95 % de son niveau de 2019.
Alors que de nombreux employés ont choisi de se reconvertir pendant la crise sanitaire, les aéroports et leurs sous-traitants se retrouvent face à un défi considérable pour attirer de nouveaux collaborateurs : sécurité, maintenance, accueil des passagers, restauration, les bras manquent quasiment partout. Exemple à Paris, où près de 4 000 postes sont à pourvoir dans les aéroports de Roissy Charles de Gaulle et d’Orly. Mais entre les horaires décalés et les bas salaires, attirer des saisonniers vers ces métiers peu valorisés n’est pas une mince affaire.
Interrogé par le journal les Échos, Jean-Baptiste Thélot, président du Sesa, le syndicat des entreprises de sécurité spécialisées dans la sûreté aérienne en France, prévient que les passagers devront s’armer de patience cet été. “Nos effectifs permanents se sont érodés du fait des départs et des reconversions ; et puis, nous avons encore des salariés qui bénéficient du dispositif d’activité partielle en tant que personne vulnérable face au Covid”, explique-t-il.
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D’autant que ces recrutements prennent du temps, notamment pour des raisons de sécurité. Il faut former ces nouveaux agents, mais aussi procéder à des vérifications d’usage avant de leur fournir le badge rouge qui permet d’accéder aux zones sensibles des aéroports.
En attendant, le mois de juillet s’annonce très chaud pour les aéroports européens. Après un mouvement social le 9 juin, les aéroports parisiens ont lancé un nouvel appel à la grève le 1er juillet, une semaine avant le début des vacances scolaires en France.
Avec AFP