Alors que la Pologne et l’Union européenne accusent Minsk d’instrumentaliser la crise des migrants massés à la frontière polono-biélorusse, et que certains ont à nouveau tenté de pénétrer en Pologne, le président Alexandre Loukachenko a déclaré à la BBC qu’il était « tout à fait possible » que ses forces de sécurité aient aidé les migrants.
Des migrants ont essayé de pénétrer en Pologne dans la nuit depuis la Biélorussie, ont annoncé vendredi 19 novembre les autorités polonaises, un jour après que Minsk a évacué les principaux camps de migrants à sa frontière avec le pays.
“Des tentatives ont été faites pour traverser la frontière, mais d’autres méthodes ont été adoptées”, a déclaré à la chaîne de télévision privée Polsat le ministre polonais de la Défense, Mariusz Blaszczak, mentionnant des groupes plus réduits.
“Tout à fait possible” que les forces biélorusses aient aidé les migrants
Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a déclaré vendredi 19 novembre à la BBC qu’il était “tout à fait possible” que les forces de sécurité du pays aient aidé des migrants à passer la frontière avec la Pologne mais a nié les avoir encouragées à le faire.
“Je pense que c’est tout à fait possible. Nous sommes des Slaves. Nous avons du coeur. Nos troupes savent que les migrants vont en Allemagne”, a déclaré Alexandre Loukachenko au cours d’une interview à la BBC.
“Peut-être que quelqu’un les a aidés. Je ne me pencherai même pas sur cette question,” a-t-il poursuivi.
La Pologne a accusé la Biélorussie de convoyer à nouveau des centaines de migrants vers la frontière entre les deux pays et de les inciter à tenter de la traverser, une manoeuvre destinée selon l’UE à créer une situation de crise en représailles aux sanctions imposées après la répression des manifestations contre la réélection du président biélorusse en 2020.
Alexandre Loukachenko a cependant nié avoir attiré des milliers de personnes pour provoquer une crise frontalière.
“Je leur ai dit que je n’allais pas retenir les migrants à la frontière et s’ils continuent à venir maintenant, je ne les arrêterai toujours pas, parce qu’ils ne viennent pas dans mon pays, ils vont dans le vôtre”, a-t-il déclaré à la BBC
Évacuation des principaux camps de fortune
Les autorités biélorusses ont évacué jeudi les principaux camps de fortune situés près de la frontière avec la Pologne, dans lesquels s’abritaient des milliers de migrants.
Des vols de rapatriement, les premiers au départ de Biélorussie depuis le mois d’août, ont également été organisés jeudi pour reconduire des centaines d’Irakiens dans leur pays.
Mais la porte-parole de la garde-frontières polonaise a déclaré que les autorités biélorusses avaient ramené des centaines de migrants à la frontière dès jeudi soir, en les forçant à tenter de la traverser à la faveur de l’obscurité.
“Au début, il y avait 100 personnes, mais ensuite les Biélorusses ont ramené davantage de gens dans des camions. Ensuite, ils étaient 500”, a dit cette porte-parole en signalant une tentative “contrainte” de traversée de la frontière.
Les camps évacués la veille – dont les occupants ont été conduits jeudi dans un hangar un peu plus éloigné de la frontière où la presse a pu se rendre – semblaient cependant encore vides vendredi matin, d’après un message de la police polonaise sur Twitter.
Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a évoqué ce dossier vendredi avec son allié et homologue russe Vladimir Poutine. Selon les services du Kremlin, qui ont fait part de cet entretien téléphonique, les deux hommes ont souligné l’importance de la coopération entre la Biélorussie et l’Union européenne.
Alors qu’aucun dirigeant occidental ne s’était entretenu avec Alexandre Loukachenko depuis sa réélection contestée en août 2020, la chancelière allemande sortante Angela Merkel l’a contacté à deux reprises cette semaine.
La Commission européenne – qui n’entend pas négocier avec le président biélorusse – a rejeté jeudi un plan de sortie de crise que la Biélorussie dit avoir soumis à Angela Merkel, qui prévoirait le rapatriement de 5 000 migrants par Minsk et la prise en charge de 2 000 autres par l’Union européenne.
L’UE accuse depuis plusieurs mois la Biélorussie d’avoir acheminé des milliers de migrants en provenance du Moyen-Orient pour créer une situation de crise à la frontière de la Pologne mais aussi de la Lituanie, en représailles aux sanctions imposées après la répression des manifestations contre la réélection d’Alexandre Loukachenko.
Minsk dément toute instrumentalisation des migrants.
Avec Reuters