Le pouvoir biélorusse a affirmé, mercredi, avoir convenu avec Angela Merkel d’entamer des pourparlers au niveau européen pour résoudre la crise des migrants bloqués entre les frontières polonaise et biélorusse. De son côté, Berlin n’évoque qu’une coopération pour l’aide humanitaire et le retour des migrants.
Minsk a affirmé, mercredi 17 novembre, avoir obtenu l’organisation de négociations avec Bruxelles pour régler la crise migratoire en cours aux frontières de l’Union européenne, Berlin n’évoquant toutefois qu’une coopération pour l’aide humanitaire et le retour des migrants.
Le président biélorusse Alexandre Loukachenko et la chancelière allemande Angela Merkel se sont entretenus dans la journée par téléphone, pour la deuxième fois en trois jours, afin d’évoquer ce dossier qui a suscité de graves tensions entre l’UE et la Biélorussie soutenue par Moscou.
Quelques milliers de migrants, originaires principalement du Moyen-Orient, campent depuis des jours par des températures glaciales le long de la frontière polonaise, du côté de la Biélorussie, dans l’espoir de pouvoir entrer dans l’UE.
Nuance de Berlin
L’Occident accuse Minsk d’avoir orchestré depuis l’été cet afflux, en réponse à des sanctions occidentales contre la Biélorussie après la répression en 2020 d’un mouvement d’opposition et afin de diviser les Vingt-Sept.
Très isolé depuis sur la scène internationale, Minsk a soutenu mercredi que l’appel entre Angela Merkel et Alexandre Loukachenko avait abouti à un accord sur l’organisation de pourparlers Biélorussie-UE.
Selon la présidence biélorusse, les deux dirigeants se sont entendus pour “que le problème dans son ensemble remonte au niveau Biélorussie-UE et que des responsables désignés par chacune des parties entreprennent immédiatement des négociations”.
“C’est dans ce contexte que sera étudié le souhait des réfugiés de se rendre en Allemagne”, a poursuivi la présidence dans un communiqué.
Mais cette annonce a été immédiatement nuancée par Berlin, qui n’a évoqué qu’une coopération entre Minsk et l’UE pour fournir une aide humanitaire aux migrants coincés à la frontière.
“La chancelière a souligné la nécessité de fournir une aide humanitaire et des options de rapatriement pour les personnes concernées” avec les Nations unies et “en coopération avec la Commission européenne”, a indiqué le porte-parole d’Angela Merkel, Steffen Seibert.
Une crise pouvant s’éterniser
Le ministre polonais de la Défense Mariusz Blaszczak a averti mercredi que cette crise “pourrait durer des mois, voire des années”, affirmant que les migrants ont à nouveau “attaqué la frontière polonaise” pendant la nuit.
La veille, les forces de sécurité polonaises avaient fait usage de gaz lacrymogène et de canons à eau pour repousser des migrants qui leur jetaient des pierres en tentant de traverser la frontière.
Varsovie, ainsi que les deux autres voisins européens de la Biélorussie, la Lituanie et la Lettonie, refusent d’accueillir ces milliers de migrants.
Les garde-frontières polonais ont dit avoir enregistré mardi 161 tentatives de “passages illégaux” de frontière, y compris “deux tentatives de passages en force”, la police polonaise rapportant également neuf fonctionnaires blessés mardi lors des affrontements, de même qu’un garde-frontière et un soldat.
De leur côté, les organisations humanitaires affirment qu’au moins 11 migrants sont morts des deux côtés de la frontière depuis le début de la crise cet été et ont réclamé une réponse humanitaire.
La Biélorussie et la Russie, qui nient être l’origine de la crise et critiquent l’UE pour ne pas avoir accueilli les migrants, ont condamné l’usage de la force par Varsovie.
Bruxelles et Washington ont annoncé lundi vouloir élargir dans les prochains jours les mesures punitives prises contre la Biélorussie.
Suite à des pressions de l’UE, la compagnie aérienne biélorusse Belavia avait annoncé lundi que Syriens, Irakiens, Afghans et Yéménites étaient désormais interdits de vol depuis Dubaï vers la Biélorussie. La Turquie a imposé les mêmes restrictions la semaine dernière.
L’Irak a annoncé un vol de rapatriement, prévu jeudi, pour au moins 200 de ses ressortissants bloqués à la frontière, dont des femmes et des enfants.
Quatre enfants hospitalisés
Le président Loukachenko, au pouvoir depuis trois décennies, s’était entretenu lundi Angela Merkel, son premier appel avec un dirigeant européen depuis le début de la crise.
Selon le porte-parole de la chancelière, cette dernière avait appelé Alexandre Loukachenko pour trouver des issues humanitaires et permettre à l’ONU d’intervenir. Le président français Emmanuel Macron s’est également entretenu avec son homologue russe Vladimir Poutine pour tenter de désamorcer la crise.
La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatovic, qui s’est rendue dans la région frontalière mardi a affirmé que la situation à la frontière entre la Pologne et la Biélorussie était “extrêmement complexe et problématique”.
La télévision d’État russe a montré mercredi des centaines de migrants dans un centre couvert mis en place par les autorités biélorusses près de la frontière, où des familles avec des enfants ont passé la nuit.
Le ministère biélorusse de la Santé a déclaré avoir hospitalisé six personnes, dont quatre enfants.
Avec AFP