Le président biélorusse Alexandre Loukachenko a assuré, mardi, vouloir éviter que la crise migratoire à la frontière avec la Pologne, qu’il est accusé d’avoir orchestrée, ne dégénère en confrontation avec ses voisins européens.
Après une semaine de tensions, Minsk semble se diriger vers la désescalade. Alors que Bruxelles et Washington ont annoncé, lundi, vouloir élargir dans les prochains jours les mesures punitives contre Minsk, le président biélorusse, Alexandre Loukachenko, a donné, mardi 16 novembre, de premiers gestes d’apaisement. Il a affirmé vouloir éviter que la crise migratoire à sa frontière avec la Pologne ne dégénère en confrontation avec l’Union européenne (UE).
“L’essentiel, aujourd’hui, est de défendre notre pays, notre peuple et d’éviter les heurts”, a affirmé, mardi, l’imprévisible Alexandre Loukachenko, cité par l’agence de presse étatique Belta. “Il ne faut pas que ce problème devienne une confrontation ardente”.
Ces déclarations interviennent au lendemain d’un entretien avec la chancelière allemande Angela Merkel, un succès pour le dirigeant biélorusse auquel les Occidentaux refusaient de parler depuis sa réélection décriée en août 2020. Mais après une semaine de frictions, Bruxelles et Washington ont annoncé lundi vouloir élargir dans les prochains jours les mesures punitives contre Minsk, déjà sanctionné pour l’implacable répression depuis 2020 de l’opposition.
En Pologne, les forces de sécurité présentes dans le village de Kuznica (Est) ont tiré des gaz lacrymogènes sur des migrants lançant des pierres le long de la frontière avec la Biélorussie, a indiqué mardi le ministère polonais de la Défense.
“Kuznica : des migrants ont attaqué nos soldats et officiers avec des pierres et tentent de détruire la clôture et de passer en Pologne”, a tweeté le ministère. “Nos forces ont utilisé du gaz lacrymogène pour réprimer l’agression des migrants”.
À la frontière entre la Pologne et la Biélorussie, plus de 2 000 migrants massés devant le poste-frontière de Brouzgui, à une dizaine de kilomètres de Kuznica, souvent originaires du Proche-Orient, ont passé une nouvelle nuit dehors par des températures négatives.
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Agglutinés autour de feux de camp ou emmitouflés dans des couvertures, ils attendaient devant la clôture surmontée de barbelés que la Pologne a érigée pour empêcher les intrusions, entre résignation et espoir. Face à eux, les forces polonaises protégeaient la frontière en nombre.
“Nous sommes fatigués et à bout”, a confié un ex-chauffeur routier kurde irakien, joint au téléphone par l’AFP. Il est bloqué depuis plusieurs jours à la frontière avec sa femme et trois enfants, dont un nourrisson.
Vers une “désescalade” ?
Signe des dangers qui les guettent, un Syrien âgé de 19 ans, Ahmad al-Hassane, a été enterré, lundi, dans un cimetière de la minuscule communauté musulmane de Pologne. Il était mort noyé le mois dernier dans la zone frontalière.
Après une prière dans la mosquée en bois du village de Bohoniki, une poignée de témoins ont assisté à l’enterrement du jeune migrant – le premier en Pologne depuis le début de la crise migratoire.
Cette dernière s’inscrit dans un contexte de tensions croissantes entre les puissances occidentales et la Russie de Vladimir Poutine en Europe orientale, notamment autour de l’Ukraine et de la Biélorussie.
Pour enrayer l’afflux d’exilés, qui a réveillé à Bruxelles le souvenir de la crise migratoire de 2015, les dirigeants européens ont multiplié les consultations.
En parallèle de l’entretien entre les leaders allemand et biélorusse, le président français Emmanuel Macron s’est entretenu lundi avec Vladimir Poutine, parrain du régime biélorusse : les deux dirigeants ont dit souhaiter une “désescalade”.
Le secrétaire d’État français aux Affaires européennes Clément Beaune a dit mardi en voir “les premiers signaux”, tout en appelant à être “très prudent”.
Livraison d’aide humanitaire limitée
Alexandre Loukachenko est habitué à souffler le chaud et le froid. La semaine dernière, il avait menacé de couper le transit du gaz russe vers l’Europe en cas de nouvelles sanctions européennes.
“Ils nous menacent de nouvelles sanctions, de bâtir un mur de cinq mètres de haut“, a lancé mardi le chef de l’État biélorusse. “S’ils n’ont rien d’autre à faire, qu’ils le fassent”, a-t-il ironisé.
Il a une fois de plus nié que son pays ait favorisé la venue des migrants. La veille, il promettait de travailler à leur retour tout en soulignant la réticence des intéressés.
Lundi, la compagnie aérienne biélorusse Belavia a déclaré que Syriens, Irakiens, Afghans et Yéménites étaient désormais interdits de vol de Dubaï vers le Bélarus. La Turquie a imposé les mêmes restrictions la semaine passée.
Bagdad a, par ailleurs, annoncé l’organisation jeudi d’un premier vol de rapatriement de migrants irakiens “sur la base du volontariat”.
Sur le terrain, nombre de migrants, qui se sont souvent endettés pour payer le voyage, se disent déterminés à rester, malgré l’accès limité à des vivres et produits de première nécessité. La Croix-Rouge biélorusse a indiqué avoir livré trois tonnes d’aide mardi.
Avec AFP