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Élections en Allemagne : l'alliance CDU-CSU, à la vie à la mort ?

L’une des stars de la campagne électorale allemande a été Markus Söder, le patron de la puissante CSU bavaroise. Ce “petit” parti très conservateur, allié de la CDU d’Angela Merkel, est méconnu en France et a, pourtant, un poids politique considérable.

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Il a fini par se ranger à 100 % derrière Armin Laschet, le candidat de la CDU pour devenir chancelier à la place d’Angela Merkel à l’issue des élections générales du 26 septembre. Markus Söder, le patron de la très puissante CSU bavaroise, a affirmé, vendredi 10 septembre, qu’il fallait tout entreprendre pour faire gagner son “ami” Laschet.

Il était temps. Jusqu’à “cet été, c’est-à-dire très tard dans la campagne, Markus Söder a trainé des pieds pour promouvoir le candidat officiel du camp CDU-CSU pour les prochaines élections”, rappelle Thomas Schlemmer, politologue à l’Institut de politique contemporaine de Munich, contacté par France 24.

La caution conservatrice de la CDU

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L’absence de soutien franc de la part de Markus Söder a même été perçue comme l’une des raisons expliquant les difficultés d’Armin Laschet pour s’imposer durant cette campagne face au candidat de la gauche, Olaf Scholz.

Difficile de comprendre, hors d’Allemagne, qu’une formation régionale comme la CSU, pour laquelle on ne peut voter qu’en Bavière, puisse être aussi importante aux yeux de la très puissante CDU d’Angela Merkel. 

La CSU apparaît depuis sa création, après la Seconde Guerre mondiale, comme l’aile conservatrice de la CDU. Pendant longtemps, cette force politique incarnait “une vision traditionaliste de la famille et des valeurs, tout en défendant les intérêts des régions – à commencer par la Bavière – face à l’État fédéral”, résume Stefan Marschall, politologue à l’université de Düsseldorf, contacté par France 24.

À ce titre, le parti bavarois “avait une fonction politique très utile aux yeux de la CDU : rassurer les électeurs les plus conservateurs qu’ils seraient représentés à travers la CSU en votant CDU-CSU”, explique Thomas Poguntke, lui aussi politologue à l’université de Düsseldorf, également contacté par France 24.

La CSU a aussi dominé pendant des décennies la vie politique bavaroise, garantissant ainsi un réservoir de voix conséquent à la coalition CDU-CSU, pour le plus grand bonheur des stratèges de la droite allemande. 

Söder superstar

Pendant les années Merkel, la CDU semblait avoir moins besoin du soutien du petit frère bavarois, tant la popularité de la chancelière suffisait au bonheur électoral des conservateurs. Mais avec la nouvelle page de l’histoire politique allemande qui s’écrit lors de cette campagne électorale, la CSU est revenue en force sur le devant de la scène médiatique allemande. 

Son patron, Markus Söder, s’était ainsi présenté face à Armin Laschet pour devenir le champion du camp conservateur allemand aux élections du 26 septembre. Il avait échoué à devancer l’homme de la CDU lors du vote du comité exécutif des deux partis, mais de l’avis d’un bon nombre de commentateurs, “si la base avait voté, c’est lui qui l’aurait probablement remporté”, assure Thomas Schlemmer.

Il est, en effet, bien plus populaire qu’Armin Laschet. C’est même l’homme politique le plus populaire d’Allemagne, derrière Angela Merkel et Olaf Scholz, d’après le dernier baromètre de la ZDF, la deuxième chaîne publique allemande. “Certains sondages indiquent que s’il s’était présenté comme candidat, près de 37 % des électeurs auraient été tenté de voter pour lui”, ajoute le politologue basé à Munich, la capitale de la Bavière. C’est bien plus qu’Armin Laschet, qui recueille difficilement 20 % des intentions de vote.

Cette popularité vient en partie de la mue politique du CSU sous Markus Söder. Ce n’est plus seulement le parti de la droite traditionaliste bavaroise. “Il y a un virage écolo au sein de la CSU qui correspond à la volonté du parti de se moderniser”, note Stefan Marschall.

Paradoxalement, cette formation se retrouve maintenant “plus à gauche que la CDU sur les questions environnementales”, précise Thomas Poguntke. La faute aux élections régionales de 2018, durant lesquelles les Verts avaient enregistré une forte progression électorale en Bavière. Pour la CSU, les écologistes étaient ainsi devenus la nouvelle force à battre “et il fallait donc vampiriser une partie de leur programme”, souligne Thomas Schlemmer.

>> À lire aussi sur France 24 : Allemagne : les “Électeurs libres”, gagnants ignorés en Bavière

Ce virage idéologique a été “très bien perçu par une partie de la presse allemande qui a fait crédit à la CSU d’avoir pris conscience de l’urgence climatique avant la CDU”, note Thomas Poguntke. 

Ce réveil des “consciences” écolos à la CSU traduit aussi une autre caractéristique de Markus Söder qui explique une partie de sa popularité. “C’est quelqu’un de très pragmatique, voire opportuniste, qui sait analyser les enquêtes d’opinion pour sentir où souffle le vent politique”, résume Thomas Poguntke. Rien à voir avec certains leaders passés de la CSU – comme Franz-Josef Strauss – qui ont pu passer pour des idéologues traditionalistes.

La CSU sans CDU ?

D’où la conviction de Markus Söder qu’il avait une carte personnelle à jouer après le départ d’Angela Merkel. D’où aussi sa déception après avoir échoué face à Armin Laschet, qui l’a poussé à soutenir tardivement le favori de la CDU.

Si la CSU a, finalement, choisi de prendre fait et cause à 100 % pour Armin Laschet, c’est “parce qu’elle sait que son avenir politique à l’échelle nationale est compromis si le candidat fait un trop mauvais score”, souligne Stefan Marschall. 

Le duo formé par la CDU et la CSU a “jusqu’à présent toujours été un accord ‘gagnant-gagnant’ et c’est la première fois que se dessine la possibilité d’un résultat ‘perdant-perdant'”, ajoute Thomas Schlemmer. En effet, si la CDU/CSU s’effondre – l’Union frôle à peine les 20 % d’intentions de vote à deux semaines du vote –, elle risque de ne pas se retrouver dans une coalition gouvernementale. Pour que la CSU continue alors d’être représentée au Parlement fédéral, il lui faut dépasser le fameux seuil des 5 % de votes à l’échelle nationale. Autant dire qu’elle doit faire le plein des voix en Bavière.

Et c’est là que le bât blesse. Jusqu’à récemment, ce n’aurait pas été un problème, mais la CSU n’est plus aussi dominatrice et se bat pour rester au-dessus des 30 % dans son fief. Donc sa meilleure chance de ne pas être reléguée au rang de force politique purement régionale est de batailler pour qu’Armin Laschet limite la casse électorale. 

Et en cas d’échec ? “C’est l’avenir de la relation CDU-CSU qui est en jeu”, estime Thomas Schlemmer. Si Armin Laschet essuie un revers historique, “je pense qu’il y a des stratèges au sein de la CSU qui réfléchiront à quitter le navire CDU”, ajoute-t-il. 

Dans ce scénario, ces fiers représentants des “traditions” bavaroises devront réfléchir à devenir un parti… qui ne s’adresse plus seulement qu’aux Bavarois.

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