L’État belge a été reconnu coupable jeudi de “faute”, le tribunal de Bruxelles estimant qu’il ne se comportait pas avec suffisamment de prudence dans sa politique climatique.
Un tribunal belge a jugé, jeudi 17 juin, que les autorités s’étaient rendues coupables de “faute” en menant une politique climatique négligente, une décision inédite dans le pays, qualifiée d'”historique” par l’association à l’origine du procès.
L’État fédéral belge et les trois régions du pays (Flandre, Wallonie, Bruxelles) également ciblées dans la plainte sont reconnus coupables.
“Dans la poursuite de leur politique climatique”, les quatre entités “ne se comportent pas comme des autorités normalement prudentes et diligentes, ce qui constitue une faute” au regard du code civil belge, souligne le jugement, dont une copie a été communiquée à la presse.
En outre, “en s’abstenant de prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir les effets du changement climatique attentatoire à la vie” des plaignants, elles portent atteinte à la Convention européenne des droits de l’Homme (CEDH), poursuit-il.
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Le tribunal de première instance de Bruxelles n’a toutefois pas suivi la demande des plaignants – l’association Klimaatzaak (Affaire Climat en néerlandais) – d’imposer des objectifs concrets de réduction des gaz à effet de serre, comme lors de procès récents aux Pays-Bas et en Allemagne.
Le procédure, lancée en 2015 par Klimaatzaak, se voulait une réplique belge de celle ayant abouti aux Pays-Bas à la condamnation du gouvernement néerlandais pour non respect des objectifs de réduction des émissions fixés par l’accord de Paris. À La Haye, ce jugement est devenu définitif en décembre 2019.
Quelque 58 000 citoyens belges étaient associés à l’action intentée par Klimaatzaak, et “tous ont été considérés recevables” (légitimes à agir, NDLR), ce qui est “unique”, a affirmé à l’AFP Serge de Gheldere, président de l’association.
Une condamnation “sans conséquence financière ni juridique”
Pour lui, ce jugement est “un signal clair” que des décisions politiques “doivent être prises immédiatement pour garantir une décarbonisation efficace de notre économie”.
La ministre du Climat et de l’Environnement Zakia Khattabi a dit “prendre acte” du jugement rendu à Bruxelles, relevant qu’il s’agissait d'”une condamnation en droit, sans conséquence financière ni juridique”.
“Nous avons soutenu le rehaussement de l’objectif européen de réductions de nos émissions d’au moins 55 % d’ici 2030 et la neutralité climatique d’ici 2050 et nous activerons tous les leviers fédéraux pour atteindre ces objectifs”, a assuré cette ministre écologiste du gouvernement De Croo, une coalition associant Verts, socialistes et libéraux.
En n’imposant pas d’objectifs, le tribunal a refusé “la surenchère des pourcentages”, “c’est une décision juste, pas un ‘diktat’ comme aux Pays-Bas”, a salué de son côté la ministre de la région flamande Zuhal Demir.
Le procès s’était tenu en mars. Aucune indication n’a été donnée jeudi sur un possible appel du jugement.
Klimaatzaak a qualifié la décision d'”historique”, se félicitant que le tribunal ait pointé du doigt l’atteinte aux articles de la CEDH relatifs au “droit à la vie”. Le juge reconnaît que “c’est un droit de l’homme d’être protégé contre un réchauffement climatique dangereux” et que “les États ont l’obligation de protéger ce droit fondamental qu’est le droit à la vie”, s’est félicitée l’association.
En 2019, la Belgique avait été un des pays européens les plus en pointe dans la mobilisation des jeunes contre le réchauffement climatique, chaque vendredi, dans le sillage du mouvement lancé par la militante écologiste suédoise Greta Thunberg.
Avec AFP