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Budget : ce qu’il faut savoir sur l’utilisation (à venir) du 49.3 par le gouvernement

Le gouvernement devrait activer mercredi l’article 49.3 de la Constitution pour adopter sans vote la partie recettes de son projet de loi de Finances pour 2023. La Nupes et le Rassemblement national promettent une motion de censure en retour, mais celles-ci ont peu de chances de renverser Élisabeth Borne.

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Cette fois, la date est quasi connue. Le couperet du 49.3 était dans toutes les têtes depuis le début de l’examen du projet de loi de Finances (PLF) pour 2023 à l’Assemblée nationale. Les députés savaient que l’exécutif l’utiliserait, mais attendaient de savoir quand. Mardi 18 octobre, le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, a mis fin au suspense : le recours au 49.3 sera “probablement pour demain”, mercredi, dernier jour d’examen de la partie dépenses du PLF, a-t-il assuré sur France 2.

“Pour trouver un compromis, il faut être deux : les présidents de groupe [d’opposition] ont dit dès le début qu’ils ne voteraient pas le projet de loi de Finances. Le blocage ne vient pas de nous, et vous l’avez bien montré”, a déclaré la Première ministre, Élisabeth Borne, lors d’une réunion, mardi matin, avec les députés Renaissance, selon des propos rapportés par un participant.

Cependant, “il faut donner sa chance au débat, d’autant plus que les Français n’aiment pas beaucoup le 49.3. Ces outils, comme la réquisition [dans les raffineries en grève, NDLR], doivent être utilisés avec précaution”, a-t-elle ajouté.

>> À lire : Budget : le gouvernement dans l’embarras en pleines turbulences sociales

  • Qu’est-ce que le 49.3 que s’apprête à brandir le gouvernement ?

L’article 49 alinéa 3 de la Constitution française permet au gouvernement de faire adopter un texte sans vote du Parlement. Celui-ci stipule :

“Le Premier ministre peut, après délibération du conseil des ministres, engager la responsabilité du gouvernement devant l’Assemblée nationale sur le vote d’un projet de loi de Finances ou de Financement de la Sécurité sociale. Dans ce cas, ce projet est considéré comme adopté, sauf si une motion de censure, déposée dans les vingt-quatre heures qui suivent, est votée dans les conditions prévues à l’alinéa précédent. Le Premier ministre peut, en outre, recourir à cette procédure pour un autre projet ou une proposition de loi par session.”

Le gouvernement d’Élisabeth Borne, qui ne dispose pas de la majorité absolue à l’Assemblée nationale pour voter son projet de loi de Finances, peut donc l’adopter malgré tout en dégainant le 49.3. L’opposition peut toutefois la contrer en votant une motion de censure qui entraînerait la chute du gouvernement. Mais si aucune motion n’est adoptée, le texte de loi est adopté.

  • Une première pour Élisabeth Borne, mais sans doute pas la dernière

Le 49.3 est une arme constitutionnelle à disposition du gouvernement qui permet un “passage en force” lorsque sa majorité à l’Assemblée nationale est étriquée, voire relative. Ainsi, au début du second septennat de François Mitterrand (1988-1995), le Premier ministre d’alors, Michel Rocard, ne disposant que d’une majorité relative à l’Assemblée nationale, a fait, entre 1988 et 1991, 28 fois usage du 49.3 pour faire adopter ses textes de loi. C’est le record absolu – et de loin – de toute la Ve République. À l’inverse, en cas de majorité absolue et confortable, nul besoin pour le gouvernement, la plupart du temps, de se servir du 49-3. Lors du premier quinquennat d’Emmanuel Macron (2017-2022), une seule utilisation est recensée, par Édouard Philippe, en 2020, sur la réforme des retraites. Le Premier ministre disposait de la majorité absolue mais l’opposition, en particulier La France insoumise, avait déposé un nombre très important d’amendements dans le but de faire obstruction au texte. Certains chefs de gouvernement n’ont jamais utilisé le 49-3 : c’est notamment le cas de Lionel Jospin (1997-2002) et de François Fillon (2007-2012).

>> À lire : Économies d’énergie : premier défi climatique du gouvernement

Élisabeth Borne, quant à elle, devrait être amenée à l’utiliser régulièrement. Les dernières élections législatives ne lui ont en effet donné qu’une majorité relative. Il apparaît donc improbable que la Première ministre parvienne à faire passer sans encombre l’ensemble de ses projets de loi. Mais contrairement à Michel Rocard, elle devra faire des choix : la réforme constitutionnelle de 2008 limite l’usage du 49.3 à un seul texte au cours d’une même session parlementaire – les sessions ordinaires courent de début octobre à fin juin –, hors projets de loi de Finances ou de Financement de la Sécurité sociale.

  • Les oppositions divisées sur une motion de censure

Lorsque le Premier ministre ou la Première ministre se sert du 49.3, l’opposition dispose de 24 heures pour déposer une motion de censure, celle-ci devant recueillir pour être soumise au vote la signature d’au moins un dixième des députés, soit 58 députés. Seuls sont ensuite recensés les votes favorables à la motion de censure qui ne peut être adoptée qu’à la majorité des 577 membres de l’Assemblée nationale, soit un minimum de 289 voix. Si la motion est votée, le texte est rejeté et le gouvernement renversé.

En 87 utilisations du 49.3 par le gouvernement depuis l’instauration de la Ve République en 1958, aucune motion de censure n’a été adoptée par les députés. Sur le papier, la composition de l’actuelle Assemblée nationale pourrait changer la donne, les oppositions réunies disposant de 326 voix. Mais en pratique, difficile de réunir sur un même texte des oppositions que tout oppose.

Côté Nupes, la plupart des 151 députés insoumis, socialistes, écologistes et communistes ne comptent pas voter une motion de censure déposée par l’extrême droite. Marine Le Pen a quant à elle affirmé, dimanche 16 octobre, que les 89 députés du Rassemblement national ne voteraient “a priori” pas la motion déposée par la Nupes. Quant aux 62 députés Les Républicains et apparentés, ceux-ci semblent peu enclins à faire tomber le gouvernement, n’ayant pas envie d’être considérés par leurs électeurs comme les responsables de ce que ces derniers jugeraient comme un désordre. Mais rien n’indique que ces oppositions ne pourraient pas joindre leurs forces dans l’avenir. La menace d’une motion de censure plane en effet sur la réforme des retraites actuellement en concertation.

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