Le mouvement de contestation qui secoue l’Iran depuis quelques semaines s’est frayé un chemin dans les lycées en parallèle de la rentrée des classes en octobre. Des vidéos publiées sur les réseaux sociaux montrent des lycéens manifester, dont plusieurs jeunes filles. Elles se mettent en scène scandant des slogans, battant les pavés ou ôtant leur voile dans les cours de récré. Un mouvement vu comme une défiance aux normes sociales, que les forces de l’ordre cherchent sévèrement à faire taire.
Elles scandent “Mort au dictateur !” ou “Femme ! Vie ! Liberté !” : ces jeunes filles et jeunes femmes sont aux premiers rangs des manifestations en continu en Iran depuis le 16 septembre. Alors que la rentrée des classes débute le 2 octobre en Iran, le mouvement de contestation atteint à leur tour les lycées du pays.
Le 3 octobre, dans une ville proche de Téhéran, un responsable du ministère de l’Education a donné un discours dans un lycée, insistant sur l’importance du voile islamique. Un groupe de jeunes filles lui a rétorqué : “Honte à vous !” puis lui a jeté des projectiles à la figure avant de le chasser de l’école.
La même scène s’est répétée dans un autre établissement dans le centre du pays : un représentant des forces du Basij, une branche paramilitaire des Gardiens de la Révolution islamique, s’est entretenu avec un groupe de lycéennes. Elles ont brandi leurs voiles en lui criant d’aller voir ailleurs.
بسیجی رو آوردن تا برا برای دانش آموزان
سخنرانی کنه و پاسخ دانش آموزان :
بسیجی برو گمشو#مهسا_امینی#نیکا_شاکرمی pic.twitter.com/vstTldVHve— ☀️👑من یک آرشــــم👑☀️ (@Air0fFreedom) October 5, 2022
“Allez voir ailleurs, Basij !”, crie une lycéenne au représentant des forces du Basij, venu donner un discours le 4 octobre dans un lycée dans le centre de l’Iran.
La vague de contestation a engendré un mouvement hostile au port obligatoire du voile islamique et son imposition rigoureuse par la “police morale” iranienne. Mahsa Amini, une jeune femme de 22 ans, est décédée après son arrestation par la même police. Son crime : s’habiller de manière “indécente”.
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Le mouvement a rapidement évolué, impliquant des revendications plus globales, accompagnées d’un sentiment anti-régime. Dans une école de la province de Razavi Khorasan, des lycéens ont piétiné des portraits de l’ayatollah actuel, Ali Khamenei. D’autres ont mis en morceaux des photos du Guide Suprême ou ont fait un doigt d’honneur à ses portraits ornant les murs de leur classe. D’autres encore ont scandé “Mort au dictateur !” dans la cour du lycée.
با اختلاف بهترین ویدیو
دانش آموزان خراسان رضوی: «تجاوز، جنایت، مرگ بر این ولایت»#مهسا_امینی pic.twitter.com/w7uznxKs52
— cheshm_abi (@chawshin_83) October 4, 2022
Dans un lycée du nord-est iranien, des lycéens ont piétiné des photos du Ayatollah actuel ainsi que des portraits de ses prédécesseurs, le 4 octobre 2022.
Des Lycéens Manifestent Dans Les Rues D’une Ville Aux Alentours De Téhéran, Le 4 Octobre 2022.
Des lycéens d’une ville aux alentours de Téhéran scandent “Je tuerai quiconque a tué ma soeur !” le 4 octobre 2022.
Des lycéennes d’une ville aux alentours de Téhéran agitent leur voile en l’air, en protestation. Vidéo filmée le 4 octobre 2022.
Cependant, ces “actes de défiance” peuvent avoir de graves conséquences. Les forces de l’ordre iraniennes, dont le redoutable Basij, répriment violemment les manifestations, à coups de balles réelles, de gaz lacrymogène et de matraques. Les femmes et les filles ont été particulièrement ciblées.
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La répression a même fait des victimes parmi les adolescents qui ont rejoint le mouvement de contestation : Nika Shahkarami, 16 ans, a disparu la nuit du 20 septembre après avoir participé à une manifestation à Téhéran. Selon la BBC Persian, elle a été retrouvée quatre jours plus tard, morte. La même source indique que les autorités ont cherché à l’enterrer discrètement afin d’éviter de raviver les manifestations.
Au moins 154 manifestants ont trouvé la mort depuis le début de la contestation, rapporte l’organisation Iran Human Rights.