Les législatives de mercredi en Angola, qui décideront du prochain président, s’annoncent les plus serrées de l’histoire du pays. Le parti au pouvoir du chef de l’État sortant est défié par une opposition qui promet des réformes socio-économiques et qui pourrait réexaminer les relations étroites entretenues jusqu’ici avec la Russie.
Les Angolais sont appelés aux urnes mercredi 24 août pour des élections législatives qui décideront du prochain président, un scrutin annoncé comme le plus serré de l’histoire du pays, entre le parti au pouvoir depuis l’indépendance et une opposition qui promet d’enrayer pauvreté et corruption.
Les bureaux de vote seront ouverts de 7 h du matin (6 h GMT) à 18 h (17 h GMT) pour les 14 millions d’inscrits. Huit partis politiques sont en lice au total. Le candidat du parti vainqueur aux législatives sera investi chef d’État. Les résultats sont attendus quelques jours après la tenue du scrutin mais le délai peut être allongé en cas de contestation.
Au pouvoir depuis l’indépendance du pays de l’empire portugais en 1975, le Mouvement populaire pour la libération de l’Angola (MPLA) part favori, selon les pronostics. Le président sortant Joao Lourenço, 68 ans, brigue un second mandat.
Le score que réalisera une opposition revigorée ces dernières années par son leader, Adalberto Costa Junior, 60 ans, surnommé “ACJ”, sera particulièrement observé. À la tête de l’Unita, premier parti d’opposition, ACJ a mené sa campagne sur des promesses de réformes, de lutte contre la pauvreté et contre la corruption.
Les relations avec Moscou en jeu
Une victoire de l’Unita, qui entend revoir des liens du pays avec les puissances mondiales, pourrait affecter les relations étroites entretenues avec la Russie, alliée du MPLA durant la guerre civile angolaise.
Soutenue par les États-Unis, l’Unita a condamné l'”invasion de l’Ukraine par la Russie”, selon Adalberto Costa Junior, qui s’est rendu à Bruxelles et à Washington pour nouer des relations avec les Occidentaux avant les élections.
Le président sortant, Joao Lourenço, s’est rapproché de l’Occident depuis son élection en 2017 mais s’est abstenu, en mars dernier, de soutenir une résolution de l’ONU condamnant l’offensive de la Russie en Ukraine.
Scrutin très serré
Réputé bon orateur, Adalberto Costa Junior incarne pour certains cet espoir de “changement” réclamé par la rue, dans un pays riche en pétrole mais plongé dans de grandes difficultés économiques. L’opposant séduit aussi une jeunesse urbaine, moins attachée au MPLA que ses aînés et qui hérite d’un pays rongé par des décennies de corruption sous la présidence de José Eduardo dos Santos (1979-2017). Mort le mois dernier en Espagne, l’ancien chef d’État est accusé d’avoir détourné des milliards au profit de sa famille et ses proches.
“Il n’y a pas de démocratie avec un parti unique au pouvoir”, a fustigé lundi ACJ, lors d’un meeting à Luanda. Appelant ses partisans à se rendre aux urnes, il les a exhortés à “ne pas craindre l’alternance”.
“La marge sera plus petite que jamais”, estime Eric Humphery-Smith, analyste au cabinet britannique Verisk Maplecroft. Une enquête d’opinion effectuée en mai montrait un gain de popularité de l’Unita, créditée de 22 % des suffrages, contre 13 % en 2019. Si le MPLA bénéficie de sept points d’avance, près de la moitié des sondés ont déclaré être indécis. De nombreux jeunes vont voter pour la première fois, alors que les moins de 25 ans représentent 60 % de la population.
Risques de fraudes
Mais avec un parti au pouvoir qui a la main sur le processus électoral et les médias publics, l’opposition et une partie de l’opinion publique s’interrogent sur des possibilités de fraudes. Les réseaux sociaux ont récemment relayé des cas d’électeurs décédés pourtant inscrits sur les listes électorales.
En 2017, Joao Lourenço avait été élu avec 61 % des voix, avec l’étiquette de dauphin désigné de dos Santos. Après son élection, il a rapidement pris ses distances, lançant à la surprise générale une vaste opération “mains propres” et écartant des postes clefs les proches de son ancien mentor.
L’actuel président compte l’emporter grâce à son bilan des cinq dernières années : dans une économie dépendante du pétrole en grave récession, il a lancé des réformes ambitieuses, saluées à l’étranger, pour diversifier les sources de revenus et privatiser les entreprises publiques. “Nous avons créé et restructuré notre économie”, a-t-il déclaré lors d’un rassemblement le weekend dernier.
Avec AFP et Reuters