Des incendies ont dévasté mercredi et jeudi une partie du nord-est de l’Algérie, faisant au moins 38 morts. Maisons calcinées, animaux morts brûlés : des images publiées sur les réseaux sociaux témoignent de l’ampleur des ravages causés par ces feux de forêts. Alors que les secours tardaient à arriver, de nombreux citoyens se sont mobilisés face aux incendies, explique un bénévole du Croissant-Rouge.
Vendredi 19 août, les incendies étaient “totalement maîtrisés”, a annoncé Farouk Achour, sous-directeur de l’information et des statistiques à la Protection civile.
Au moins 38 personnes, dont plus de dix enfants, ont trouvé la mort dans ces incendies, selon un bilan du ministère de l’Intérieur. La même source a indiqué que plus de 800 hectares de forêts et 1 300 hectares de broussaille ont été touchés par les flammes.
Dans les wilayas les plus touchées, El Tarf et Sétif, des feux de forêt gigantesques se sont étendus jusqu’aux agglomérations, mercredi 17 et jeudi 18 août. Des images diffusées sur les réseaux sociaux montrent l’étendue des flammes dans ces régions.
Vidéo tournée le 17 août sur la plage de Marjane à El Kala, dans la wilaya d’El Tarf, où les habitants ayant fui leurs habitations se sont réfugiés.
Au moins 350 familles ont fui leurs maisons dans la wilaya de Souk Ahras, juste au sud d’El Tarf, où 45 personnes souffrent de brûlures et plusieurs maisons ont été ravagées par les incendies.
“Il y a encore deux heures le ciel était encore clair, il y a des incendies énormes”, décrit l’auteur de cette vidéo publiée en direct sur instagram, dans la ville de Kala le 17 août, vers 15 heures.
Des habitants se sont portés volontaires auprès des pompiers et des secours, comme Ahmad Braïkia qui est bénévole au Croissant-Rouge d’El Tarf. Il a diffusé en direct sur son compte Facebook des images des dégâts causés par les feux. Contacté par la rédaction des Observateurs, il explique :
“Environ 80 % à 90 % de la faune de la wilaya du Tarf est partie en fumée”
On a estimé au Croissant-Rouge qu’environ 80 % à 90 % de la faune de la wilaya du Tarf est partie en fumée, malgré les efforts déployés par la population et la Protection civile. Les habitants dont les maisons ont complètement brûlé ont été placés dans des habitations d’urgence, comme des établissements scolaires, et soignés par les associations et le Croissant-Rouge. Le reste des familles ayant fui leur foyer ont pu rentrer chez elles entre jeudi et vendredi.
A cause des rafales de vent, les hélicoptères de la Protection civile n’ont pas pu survoler la région et éteindre les flammes. Devant l’urgence de la situation, les habitants se sont mobilisés. Ils utilisaient des seaux d’eau. Par la suite, la municipalité a dépêché des tracteurs grâce auxquels on a pu monter des barrages avec de la terre pour empêcher la propagation des incendies.
Plusieurs associations de wilayas voisines ont aussi envoyé des convois d’aides médicales dans la soirée du 17 août.
Jeudi 18 août, des convois humanitaires du Croissant-Rouge ont en outre été dépêchés à El Tarf.
De nombreux habitants et internautes estiment que les autorités n’ont pas réagi assez vite face aux incendies, rappelant le lourd bilan des pertes humaines. La plupart des victimes ont été prises au piège par les flammes dans le parc zoologique d’El Kala, dans la wilaya d’El Tarf. Huit d’entre elles ont été retrouvées mortes dans un autocar cerné par les flammes, selon la direction du parc. Les employés du parc ont dû eux-mêmes aider les victimes à se dégager du véhicule en flammes, en l’absence de pompiers qui tardaient à arriver, ont indiqué des témoins.
“Les forêts sont affaiblies, épuisées”
Rafik Baba-Ahmed, ancien directeur du parc d’El Kala, est spécialiste de la conservation naturelle. Dans une vidéo publiée le 19 août sur Twitter, il décrit une “tornade de feu” qui s’est abattue sur la ville et a embrasé le parc en quelques secondes.
“La lutte pour protéger les forêts aurait dû commencer il y a une trentaine d’années, il aurait fallu prendre des mesures pour sauver et restaurer ce qui aurait pu être sauvé. Aujourd’hui, les forêts sont affaiblies, épuisées, et l’Homme ne sait pas comment les défendre contre ces catastrophes. Il faut une volonté politique, des moyens techniques plus avancés et une éducation sociale et culturelle pour comprendre la nécessité de sauvegarder le patrimoine forestier”, dénonce-t-il.
Cette vidéo diffusée en direct sur Facebook dans l’après-midi du 18 août montre l’étendue des ravages des flammes sur la végétation, à El Kala. Alors qu’un hélicoptère de secours apparaît à l’horizon [vers 6:20], l’auteur de la vidéo déplore : “Personne n’est venu [les] éteindre hier, nous avons dû [les] éteindre nous-mêmes, avec la police. Aucun pompier n’était sur place. Même les plantes qui ont échappé aux flammes ont été touchées par le souffle brûlant.”
Ces incendies de forêt ont été propagés par les fortes chaleur, ayant atteint 47 °C cette semaine, et les vents chauds soufflant du Sahara. Le ministère de la Justice a en outre indiqué avoir ouvert une enquête pour déterminer si elles étaient d’origine criminelle, suite à des déclarations du ministre de l’Intérieur selon lesquelles “certains des incendies ont été provoqués”.
En août 2021, la région de Kabylie, dans le nord du pays, s’était embrasée dans des conditions climatiques similaires. Les incendies, d’origine criminelle selon le ministère de l’Intérieur, avaient fait plus de cent morts et ont rasé 100 000 hectares de végétation.
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