Le pape François initie, lundi, son voyage d’une semaine au Canada, lors duquel il devrait renouveler des excuses pour les abus subis dans le passé par des enfants des peuples indigènes dans des écoles confiées par le gouvernement à l’Église catholique.
Il est le second souverain pontife à visiter le Canada après Jean Paul II. Le pape François se rend, lundi 25 juillet, dans un ancien pensionnat pour autochtones au Canada, où il pourrait renouveler sa demande de pardon pour le rôle joué par l’Église pendant plus d’un siècle dans les violences infligées à des milliers d’enfants.
Le souverain pontife de 85 ans est arrivé, dimanche, à Edmonton (Alberta) pour une visite de six jours dans le pays, attendue depuis des années par ces peuples amérindiens regroupant les Premières Nations, les métis et les Inuits.
Chers frères et sœurs du #Canada, je viens parmi vous pour rencontrer les peuples autochtones. J’espère que, avec la grâce de Dieu, mon pèlerinage pénitentiel pourra contribuer au chemin de réconciliation déjà entrepris. S’il vous plaît, accompagnez-moi par la #prière.
— Pape François (@Pontifex_fr) July 24, 2022
Au cœur de ce “pèlerinage pénitentiel”, le douloureux chapitre des “écoles résidentielles” pour enfants autochtones, un système d’assimilation culturelle qui a fait au moins 6 000 morts entre la fin du XIXe siècle et les années 1990 et créé un traumatisme sur plusieurs générations.
Le gouvernement canadien, qui a versé des milliards de dollars en réparation à d’anciens élèves, s’est officiellement excusé il y a 14 ans pour avoir créé ces écoles mises sur pied pour “tuer l’indien dans le cœur de l’enfant”.
Pensionnats autochtones
Et l’Église anglicane avait ensuite fait de même. Mais l’Église catholique, en charge de plus de 60 % de ces pensionnats, a toujours refusé de le faire jusqu’ici.
En avril, tout a changé avec les excuses du pape François, qui avait promis de venir au Canada. Des milliers d’autochtones attendent maintenant des excuses sur leurs terres.
François se rendra à 10 h (16 h GMT) à Maskwacis, une réserve autochtone à une centaine de kilomètres au sud d’Edmonton, où se trouve l’ancien pensionnat d’Ermineskin, l’un des plus grands du Canada, ouvert de 1895 à 1975.
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Après une prière silencieuse dans le cimetière, il prononcera son premier discours, en espagnol, devant des milliers de personnes, dont d’anciens élèves de pensionnats. Une aide psychologique sera proposée aux participants, venus des quatre coins du pays.
Le pape se rendra ensuite à 16 h 30 (22 h 30 GMT) à l’église du Sacré-Cœur des Premiers Peuples d’Edmonton, l’une des plus anciennes de la ville, reconstruite après un incendie en 2020. Il y prononcera un deuxième discours devant les communautés indigènes.
“J’espère que cette visite est le début d’un changement dans l’histoire et une façon pour nous de commencer notre parcours de guérison”, a déclaré George Arcand Jr., grand chef de la Confédération des Premières Nations du Traité n°6, à la télévision publique canadienne.
En avril, le Saint Père avait pour la première fois présenté ses excuses au Vatican pour le rôle joué par l’Église dans les 130 pensionnats du pays, fustigeant la “colonisation idéologique” et l'”action d’assimilation” dont “tant d’enfants ont été victimes”.
Plus de 1 300 sépultures anonymes découvertes
Quelque 150 000 enfants autochtones ont été enrôlés de force dans ces écoles, où ils étaient coupés de leur famille, de leur langue et de leur culture et souvent victimes de violences physiques, psychologiques et sexuelles.
Petit à petit, le Canada ouvre les yeux sur ce passé qualifié de “génocide culturel” par une commission d’enquête nationale : la découverte de plus de 1 300 sépultures anonymes en 2021 près de ces pensionnats a créé une onde de choc.
Attendue de longue date, la visite papale suscite donc beaucoup d’espoir chez certains survivants et leurs familles. Nombre d’entre eux espèrent aussi des gestes symboliques, comme le rapatriement de certains objets d’art autochtones conservés au Vatican depuis des décennies.
“Pour moi, cela représente beaucoup qu’il soit venu. Je pense qu’à un moment il faut pardonner” même si “on nous a enlevé beaucoup de choses”, estime Deborah Greyeyes, habitante d’Edmonton de 71 ans et originaire d’une communauté crie (ces derniers représentent le plus important groupe autochtone du pays).
Mardi, le pape célèbrera une messe au Commonwealth stadium d’Edmonton et se rendra au lac Sainte-Anne, site d’un important pèlerinage annuel. Il rejoindra ensuite Québec, mercredi, avant une dernière étape, vendredi, à Iqaluit (Nunavut), ville du Grand Nord canadien dans l’archipel arctique.
Toujours affaibli par des douleurs au genou, le jésuite argentin est apparu dimanche en fauteuil roulant, mais souriant, lors de son arrivée à Edmonton. Son programme a été aménagé pour limiter ses déplacements, selon les organisateurs.
Avec AFP