Ranil Wickremesinghe a prêté serment jeudi en tant que huitième président exécutif de l’île d’Asie du Sud plongée dans une crise historique. Considéré par une large partie de la population comme un allié du clan déchu des Rajapaksa, celui qui a été six fois Premier ministre du Sri Lanka a annoncé son intention d’intégrer des membres de l’opposition dans son futur gouvernement.
Le nouveau président du Sri Lanka, Ranil Wickremesinghe, a prêté serment jeudi 21 juillet et œuvre, selon des responsables, à la formation d’un gouvernement d’unité pour sortir le pays de la crise économique historique qui le mine depuis des mois.
Ranil Wickremesinghe avait été élu chef de l’État la veille par le Parlement avec le soutien du clan de son prédécesseur Gotabaya Rajapaksa, ayant démissionné la semaine dernière après avoir fui le pays secoué par une vague de manifestations contre son pouvoir.
Alors Premier ministre, Ranil Wickremesinghe avait dû en conséquence assurer l’intérim de la présidence.
Jeudi, le président élu, âge de 73 ans, a prêté serment devant le juge en chef, Jayantha Jayasuriya, au sein de l’enceinte parlementaire placée sous étroite surveillance, selon un communiqué de son bureau.
Le chef de la police sri lankaise et le haut commandement de l’armée se tenaient derrière le nouveau président lors de sa prestation de serment, en présence du président du Parlement, Mahinda Abeywardana.
La retransmission de la cérémonie d’investiture interrompue
La brève cérémonie devait être retransmise en direct par la télévision locale, mais elle a été inexplicablement interrompue au moment où Ranil Wickremesinghe et son épouse Maithree entraient dans le bâtiment après un défilé militaire.
Les autorités ont indiqué qu’une enquête avait été ouverte sur les causes de cette panne inopinée.
“Une enquête a été ouverte pour expliquer l’interruption de la retransmission”, a déclaré à l’AFP un haut responsable de la Défense.
Selon des sources officielles, le nouveau chef de l’État devrait former un gouvernement fort de 30 ministres au maximum qui aura pour mission de sortir le pays de la pire crise économique de son histoire.
Il hérite d’un pays de 22 millions d’habitants ravagé par une crise économique historique qui subit depuis des mois des coupures d’électricité, des pénuries d’aliments, de médicaments et de carburant.
La colère de la population a atteint son apogée quand des dizaines de milliers de manifestants ont pris d’assaut la résidence du président Gotabaya Rajapaksa, poussé à fuir et à démissionner.
L’île, qui a fait défaut en avril sur sa dette étrangère de 51 milliards de dollars, n’a même plus de devises pour financer ses importations essentielles, et compte désormais sur un plan de sauvetage du Fonds monétaire international (FMI).
Ranil Wickremesinghe, élu pour la période restante du mandat de M. Rajapaksa, qui se termine en novembre 2024, s’est mis en quête d’un Premier ministre pour former un gouvernement.
Il pourrait nommer Dinesh Gunawardena, un ex-ministre de la Fonction publique et fervent partisan du clan Rajapaksa. C’est un dirigeant syndical qui représente un petit parti nationaliste allié au SLPP, le parti des Rajapaksa.
“Je ne suis pas un ami des Rajapaksa”
Dinesh Gunawardena et Ranil Wickremesinghe se connaissent depuis l’âge de 3 ans et ont étudié ensemble au prestigieux Royal College de Colombo.
Mais selon des sources politiques, au moins deux autres personnalités sont également sur les rangs.
“Quelques députés de la principale opposition rejoindront le cabinet”, a déclaré une source proche de Ranil Wickremesinghe, ajoutant qu’il tenait à réunir une coalition de toutes les formations.
Mercredi soir, après son élection, Ranil Wickremesinghe est allé se recueillir dans un temple bouddhiste où, devant la presse, il a mis en garde “les fauteurs de troubles” recourant à des moyens antidémocratiques, promettant de faire preuve de sévérité s’ils tentaient de perturber son gouvernement.
“Si on essaye de renverser le gouvernement, d’occuper le bureau du président et celui du Premier ministre, il ne s’agit pas de démocratie, et nous traiterons ceux-là avec fermeté”, a-t-il déclaré.
“Je ne suis pas un ami des Rajapaksa, je suis un ami du peuple”, a-t-il aussi insisté.
Ranil Wickremesinghe est honni par le mouvement contestataire, qui le considère comme un allié et protecteur de Gotabaya Rajapaksa.
Les manifestations vont “évidemment” se poursuivre, assure Nuzly Hameem, ingénieur et militant, mais “nous sommes épuisés, ça dure depuis quatre mois”.
Selon des responsables, Ranil Wickremesinghe devait tenir sa première réunion officielle avec le commandement de l’armée et le chef de la police au ministère de la Défense jeudi pour discuter de la situation sécuritaire.
En vertu de la Constitution, le président est également le ministre de la Défense et le commandant en chef des forces armées.
Lundi, Ranil Wickremesinghe, alors encore président par intérim, a prolongé l’état d’urgence, qui confère à la police et aux forces de sécurité des pouvoirs étendus.
Avec AFP