Alors qu’un militaire a été tué mardi lors d’un acte “terroriste”, selon l’armée équatorienne, le président conservateur Guillermo Lasso a suspendu le dialogue avec les leaders indigènes à la tête de manifestations qui paralysent le pays depuis plus de deux semaines pour exiger notamment une baisse des prix des carburants.
Le président équatorien Guillermo Lasso a suspendu mardi 28 juin le dialogue avec les leaders indigènes à la tête du mouvement contre la cherté de la vie, après la mort d’un soldat dans l’est de l’Équateur, laissant augurer une poursuite du bras de fer entre l’exécutif et les manifestants.
Un convoi militaire qui protégeait des camions-citernes a été attaqué à l’aube par un groupe armé dans la partie amazonienne du pays, a annoncé l’armée dans la matinée, faisant état d’un militaire tué et de douze blessés dans cet “acte terroriste” commis avec des armes à feu et des lances.
“Nous ne nous assiérons pas à nouveau pour dialoguer avec Leonidas Iza qui ne défend que ses intérêts politiques et non ceux de sa base”, a déclaré le chef de l’État conservateur dans une courte allocution, dénonçant une “attaque criminelle”.
Leonidas Iza est le chef de la puissante Confédération des nationalités indigènes (Conaie), le fer de lance des manifestations qui paralysent l’Équateur depuis plus de deux semaines pour exiger notamment une baisse des prix des carburants.
“Opportuniste”
Outre le soldat tué, cinq manifestants ont péri dans des violences avec les forces de l’ordre et plus de 500 personnes, civils ou membres des forces de sécurité, ont été blessées.
“Le pays a été témoin de tous les efforts que nous avons déployés pour établir un dialogue fructueux et sincère (…). À nos frères et sœurs indigènes, vous méritez mieux qu’un dirigeant opportuniste qui vous a trompés”, a lâché le président Lasso. “Nous n’allons pas négocier avec ceux qui retiennent l’Équateur en otage ou ceux qui attaquent nos forces de sécurité et jouent avec la santé et la vie des Équatoriens”, a-t-il ajouté.
“Ce n’est que lorsqu’il y aura des représentants légitimes de tous les peuples et de toutes les nationalités de l’Équateur, qui cherchent de vraies solutions et sont ouverts à un dialogue réel et franc, que nous reviendrons à la table du dialogue”, a-t-il posé comme condition.
La Conaie a immédiatement réagi en accusant le gouvernement d”autoritarisme” et de “manque de volonté”. “Nous tenons Guillermo Lasso pour responsable des conséquences de sa politique belliciste (…) Lasso ne rompt pas avec Léonidas, il rompt avec le peuple”, a tonné l’organisation sur Twitter.
Le matin-même, le gouvernement ne s’était pas présenté aux discussions entamées la veille à Quito avec les représentants indigènes, dont Léonidas Iza, qui se déroulent dans une annexe de la grande Basilique catholique de la capitale.
“Nous voulons la paix”
“Nous sommes actuellement dans une impasse dans ce processus de dialogue, mais nous laissons la porte ouverte”, a réagi plus tard le chef de la Conaie. “Nous voulons la paix ! Restez unis, (…) ne menez pas d’actions”, a-t-il lancé à plusieurs dizaines de ses partisans réunis devant la Basilique néo-gothique.
Après plus de deux semaines de blocages et plusieurs épisodes de violences, dont deux tentatives d’intrusion des protestataires dans l’enceinte du Parlement, représentants indigènes et délégation gouvernementale devaient pourtant mardi avancer vers une sortie de crise.
Lance ou bouclier à la main, des groupes de dizaines manifestants circulaient mardi dans la capitale, autour de deux universités et d’un centre culturel leur servant de base, ainsi que dans le quartier de la Basilique. Aucun incident majeur ou affrontement n’a été signalé pour cette journée.
Le gouvernement “n’envisage pas de décréter un nouvel état d’urgence, la situation est calme”, a indiqué le ministre de l’Intérieur, Patricio Carillo.
Guillermo Lasso, au pouvoir depuis mai 2021, est également menacé de destitution. L’opposition parlementaire, majoritaire mais divisée, le rend responsable de la “grave crise politique” qui secoue l’Équateur. Le débat sur une éventuelle destitution a repris au Parlement. À la fin du débat, les députés auront 72 heures pour voter. Une majorité de 92 voix sur 137 est nécessaire pour obtenir la destitution.
Avec AFP