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Maroc : l'arganier, un arbre “quasiment irremplaçable” dans la lutte contre l’érosion des sols

Premier producteur mondial d’huile d’argan, le Maroc se bat pour protéger ses forêts d’arganiers, menacées par le dérèglement climatique et les activités humaines. À l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la désertification et la sécheresse, France 24 se penche sur cet arbre aux qualités environnementales méconnues. 

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C’est un arbre millénaire dont les fruits suscitent la convoitise. L’arganier, à partir duquel on fabrique l’huile d’argan, pousse dans les régions arides du Maroc – notamment au sud-ouest du pays – et, dans une moindre mesure, en Algérie.

Peu gourmand en eau, cet arbre est l’un des rares dans la région capables de résister à des températures allant jusqu’à 50°C. Il est un allié de choix alors que la sécheresse, la pire depuis près de 40 ans, s’est installée durablement au Maroc. Et elle devrait s’intensifier jusqu’en 2050, en raison d’une baisse de la pluviométrie (– 11 %) et d’une augmentation des températures (+ 1,3 °C), selon le ministère marocain de l’Agriculture.

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L’arganier n’est pas le seul végétal à pouvoir survivre dans ces zones arides du Maroc. Mais il a des qualités qui font la fierté des habitants. “Avec lui, on est en plein dans le triangle du développement durable, avec un volet environnemental, économique et social”, affirme Katim Alaoui, directrice générale de la Fondation Mohammed VI pour la recherche et la sauvegarde de l’arganier.

“On le surnomme le ‘rempart contre la désertification’ et il aide à éviter l’érosion des sols. Sur le plan économique, son huile est une très forte valeur ajoutée et enfin, près de trois millions et demi de Marocains vivent de façon directe ou indirecte des produits de l’argan et de l’arganier”, poursuit Katim Alaoui, également responsable de l’équipe de recherche en toxico-pharmacodynamie de la Faculté de médecine et de pharmacie de l’Université Mohammed V-Souissi de Rabat. 

>> À voir aussi : Désertification : une fragile muraille verte en Afrique

“Dans les régions arides et semi-arides où il pousse, l’arganier est quasiment irremplaçable dans la conservation des sols et pour la lutte contre l’érosion des sols”, abonde Abdelaziz Mimouni, chef du Centre régional de la recherche agronomique d’Agadir, interrogé par l’agence marocaine de presse MapNews. “L’arganier protège le sol par l’ombre portée de sa cime dense dans les régions subdésertiques où l’ennemi principal de la végétation est la sécheresse”, poursuit-il. Il enrichit également les sols en éléments fertilisants et en matière organique, “ce qui contribue à la séquestration du carbone et par la suite l’atténuation des effets des changements climatiques”. 

L’arganier et ses chèvres perchées 

Poussant dans la Réserve de biosphère de l’arganeraie, une forêt protégée couvrant 2,5 millions d’hectares, l’arganier est le pilier du quotidien des locaux. “La population partage sa vie avec l’arbre parce qu’elle vit grâce à lui”, explique Katim Alaoui. Les images de chèvre grimpant au sommet des arbres, maintes fois partagées sur les réseaux sociaux, illustrent la proximité de l’arganeraie avec les locaux.


“Les habitants ont le droit de ramasser les noix d’argan et d’en extraire l’huile. Le feuillage sert de fourrage pour les animaux. Les habitants ont une alimentation basée sur les huiles d’argan et utilisent le bois pour se chauffer et cuisiner”, précise la pharmacologue. 

Aussi robuste soit-elle, cette espèce endémique est pourtant fragilisée. Publié le 28 février, le dernier rapport du Giec anticipe “une diminution de 32 % de l’habitat convenant à l’Argania spinosa [le nom scientifique de l’espèce] dans certains scénarios” au Maroc, conséquence du dérèglement climatique. Voyant les épisodes de sécheresse se succéder ces dernières années, le Maroc fait aussi partie des pays “proches du seuil de stress hydrique grave”, selon le Giec. 

>> À lire aussi : Planter quatre milliards d’arbres en Éthiopie, des paroles ou des actes ?

Créée en 2004, la Fondation Mohammed VI pour la recherche et la sauvegarde de l’arganier, rattachée au Royaume du Maroc, vise à protéger cet arbre, préserver l’économie locale liée à la culture d’huile d’argan et sensibiliser les populations locales. Afin de dissuader les habitants d’abattre les arbres pour se chauffer, cet organisme d’État leur a par exemple proposé d’utiliser des cuiseurs fonctionnant à l’énergie solaire.

Les cuiseurs ont été installés dans les cantines d’écoles de la province d’Essaouira et les instituteurs ont été formés à leur utilisation pour préparer les repas. “Tout le monde a joué le jeu. Les mères de ces enfants, qui sont des productrices d’huile d’argan organisées en coopératives, venaient régulièrement à l’école pour manger avec les enfants”, se souvient Katim Alaoui.

Ces cuiseurs étaient ensuite donnés aux familles dont les enfants avaient les meilleurs résultats solaires. Une initiative qui permet d’économiser “cinq à dix kilos de bois par jour”, d’après Katim Alaoui. La Fondation mène d’autres actions, comme des campagnes de plantation d’arganiers, aux côtés de marques de cosmétiques utilisant l’huile d’argan, comme Yves Rocher ou Galénic. 

L’huile d’argan victime de son succès 

Mais ces projets ne suffisent pas. Symbole d’éternité et de résilience au Maroc, l’arganier doit, ironie du sort, être protégé. Il a ainsi été reconnu en 2014 comme patrimoine culturel immatériel de l’humanité par l’Unesco. Puis, en 2018, comme système du patrimoine agricole mondial par l’Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Une journée mondiale lui est même consacrée depuis l’année dernière – le 10 mai.


Aujourd’hui, “la menace de la déforestation est de plus en plus atténuée. Beaucoup de choses ont bougé. On sait mieux faire pousser l’arganier qu’au début des années 2000”, se félicite Katim Alaoui. Le Maroc, d’où vient la quasi-totalité de la production mondiale d’huile d’argan, cherche aujourd’hui à encadrer la vente à l’étranger.

Selon l’agence marocaine de presse, le Maroc produit entre 4 000 et 6 000 tonnes d’huile d’argan et en exporte entre 1 000 et 1500 tonnes par an. Dans ce dossier, la Fondation Mohammed VI pour la recherche et la sauvegarde de l’arganier a remporté une victoire : l’instauration d’une période de plusieurs mois dans l’année où les noix d’argan ne peuvent pas être ramassées. Un repos biologique qui devrait aider à soulager ces écosystèmes excessivement sollicités.

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