Lors du troisième jour d’audition de la commission parlementaire en charge de l’enquête sur l’assaut du Capitole, jeudi, les élus ont montré comment Donald Trump avait tenté, en vain, de forcer son vice-président Mike Pence à ne pas certifier la victoire de Joe Biden à la présidentielle.
Des tweets incendiaires, un appel menaçant, un discours enflammé… La commission d’enquête sur l’assaut du Capitole a détaillé, jeudi 16 juin, lors d’une audition, les nombreuses pressions exercées par Donald Trump sur son vice-président Mike Pence pour tenter de l’empêcher de certifier la victoire de Joe Biden à la présidentielle, le 6 janvier 2021.
“Le président s’est maintes fois vu dire que le vice-président ne pouvait pas changer le résultat de l’élection. Mais il a malgré tout fait publiquement pression sur Mike Pence pour qu’il fasse exactement cela”, a affirmé l’élu démocrate Pete Aguilar, lors d’un exposé circonstancié.
Après quasiment un an d’enquête, le groupe d’élus cherche à montrer que le rejet par Donald Trump des résultats de la présidentielle de novembre 2020 n’était pas qu’une coquetterie de mauvais perdant, mais la composante essentielle d’une stratégie réfléchie pour garder le pouvoir. Celle-ci s’est rapidement concentrée sur la cérémonie de certification des résultats de l’élection par le vice-président Mike Pence devant le Congrès le 6 janvier 2021, en principe une simple formalité.
“Révolution”
La commission d’enquête a dévoilé le plan précis élaboré par l’avocat John Eastman pour Donald Trump en décembre 2020, visant à exploiter les failles de la loi sur le comptage électoral et à bloquer l’accession de Joe Biden à la Maison Blanche.
Sous pression, Mike Pence s’est alors tourné vers plusieurs experts juridiques qui lui avaient assuré qu’il n’avait aucune marge de manœuvre légale et devait certifier à tout prix la victoire de Joe Biden.
“Je crois que si le vice-président Pence avait obéi aux ordres de son président (…), cela aurait plongé l’Amérique dans une révolution au beau milieu d’une crise constitutionnelle”, a alerté d’une voix solennelle le juge Michael Luttig, devant la commission.
Témoignages vidéo à l’appui, le groupe d’élus a aussi révélé un échange téléphonique entre Donald Trump et son vice-président dans la matinée du 6 janvier 2021. “La conversation était tendue”, a confié Ivanka Trump, la fille du président, qui était dans le Bureau ovale au moment de l’appel. D’autres ex-conseillers de Donald Trump ont rapporté que le président avait adressé plusieurs insultes à Mike Pence.
Une heure plus tard, le président américain a une dernière fois tenté de forcer la main à son bras droit en se présentant à une foule de trumpistes réunie à Washington dans un froid glacial. “Mike Pence, j’espère que vous allez vous battre pour le bien de notre pays, de notre Constitution. Sinon, je vais être extrêmement déçu”, lance le milliardaire républicain, le ton grave.
“Pendre”
Quelques minutes plus tard, Mike Pence publie une lettre dans laquelle il affirme qu’il ne se pliera pas aux pressions du président. Au même moment, les manifestants pro-Trump commencent à se presser autour du Congrès, des images qui ont circulé à travers le monde. La séance de certification est brutalement interrompue.
Pendant que le vice-président et les élus du Congrès sont évacués de l’hémicycle, Donald Trump s’agace sur Twitter que Mike Pence n’ait “pas eu le courage de faire ce qui était nécessaire pour protéger le pays”. Dans la foule qui a pris le Congrès d’assaut, les trumpistes appellent à “pendre Mike Pence”.
Réfugié dans un souterrain, le vice-président est resté dans l’enceinte du Capitole durant toute la durée de l’assaut, avec des manifestants parfois seulement à une “douzaine de mètres de lui”, a révélé la commission jeudi.
Au bout de quelques heures, le calme est finalement revenu dans la capitale américaine. Depuis la Chambre des représentants, le vice-président promet alors que “ceux qui ont semé la zizanie” n’ont pas “gagné” et certifie officiellement l’élection de Joe Biden.
Après de longs mois de silence, Mike Pence a évoqué publiquement l’horreur du 6 janvier lors d’un discours en Floride, mi-février. “Le président Trump a dit que j’avais le droit d’inverser l’élection, mais le président Trump a tort”, a-t-il affirmé, actant sa rupture définitive avec l’ancien homme d’affaires, qui soutient encore le contraire.
Avec AFP