Selon la police fédérale brésilienne, qui s’est adressée aux journalistes mercredi, un suspect est passé aux aveux et a mené les enquêteurs sur les lieux où sont enterrés le journaliste britannique Dom Phillips et l’expert brésilien Bruno Pereira, disparus depuis le début du mois de juin en Amazonie. Les corps doivent être formellement identifiés avant d’être restitués aux familles.
C’est la fin d’une longue attente pour les familles. La police brésilienne a annoncé, mercredi 15 juin, qu’un des suspects arrêtés dans l’affaire de la disparition en Amazonie du journaliste britannique Dom Phillips et de l’expert Bruno Pereira était passé aux aveux.
“Hier soir nous avons obtenu les aveux du premier des deux suspects arrêtés (…) qui a raconté en détail comment le crime a été commis et nous a dit où les corps avaient été enterrés”, a expliqué en conférence de presse le chef de la police fédérale de l’État d’Amazonas, Eduardo Alexandre Fontes, qui a indiqué que le suspect avait reconnu avoir participé au “crime”, mais sans préciser son rôle.
“Des excavations ont été effectuées sur place, les fouilles vont continuer, mais des restes humains ont déjà été retrouvés”, a-t-il ajouté. “Dès que nous aurons pu vérifier grâce à l’expertise qu’il s’agit bien de restes des corps de Dom Phillips et Bruno Pereira, ils seront restitués aux familles”.
Quelques heures avant cette annonce, les caméras de télévision avaient filmé l’un des deux suspects arrêtés sortant d’un commissariat pour être amené en bateau sur les lieux des recherches menées par les forces de l’ordre.
Zone dangereuse
Le premier suspect, Amarildo da Costa de Oliveira, un pêcheur âgé de 41 ans surnommé “Pelado”, a été arrêté dès le 7 juin. Des témoins ont dit l’avoir vu passer à vive allure à bord d’un bateau allant dans la même direction que l’embarcation de Dom Phillips et Bruno Pereira, avant leur disparition. Le second suspect, Oseney da Costa de Oliveira, dit “Dos Santos”, a été arrêté mardi, “soupçonné de participation à l’affaire”, selon la police fédérale.
Dimanche, les autorités avaient annoncé avoir retrouvé des effets personnels des deux disparus.
Le journaliste britannique et l’expert brésilien avaient été vus pour la dernière fois le 5 juin, durant une expédition dans la zone de la Vallée de Javari. Cette région proche de la frontière avec le Pérou et la Colombie est réputée très dangereuse, s’y déploient de multiples trafics de drogue, de pêche ou d’orpaillage illégal.
Elle est devenue ces dernières années un axe stratégique pour les gangs de narcotrafiquants qui acheminent par voie fluviale de la cocaïne ou du cannabis produits dans les pays voisins du Brésil, notamment la Colombie et le Pérou.
Auteur de dizaines de reportages sur l’Amazonie, Dom Phillips, 57 ans, s’était rendu une nouvelle fois dans la région dans le cadre de ses recherches pour un livre sur la préservation de l’environnement.
Bruno Pereira, 41 ans, expert reconnu et défenseur des droits des peuples autochtones, a travaillé durant de nombreuses années à l’agence gouvernementale brésilienne pour les affaires indigènes (Funai). Il a notamment dirigé l’antenne de la Funai à Atalaia do Norte (nord-ouest), localité où les deux hommes étaient censés rentrer en bateau quand ils ont disparu, ainsi qu’un programme de protection de groupes indigènes isolés de la Vallée de Javari.
“Mal vu”
Père de trois enfants, Bruno Pereira a relaté à plusieurs reprises avoir été la cible de menaces par des bûcherons, des mineurs et des pêcheurs illégaux qui tentaient d’empiéter sur les terres protégées.
Installé au Brésil il y a 15 ans, Dom Phillips était marié avec une Brésilienne et avait entrepris des démarches pour adopter un enfant.
Leur disparition a suscité une vive émotion dans le monde entier, avec des réactions de personnalités politiques de premier plan et de célébrités comme les membres du groupe de rock irlandais U2.
Le président d’extrême droite Jair Bolsonaro, favorable à l’exploitation minière et agricole de réserves indigènes en Amazonie, a été fortement critiqué pour avoir qualifié l’expédition des deux hommes d'”aventure peu recommandable”.
Mercredi, il a affirmé que Dom Phillips était “mal vu” en Amazonie parce qu’il avait écrit “de nombreux reportages contre les orpailleurs, sur l’environnement”. “Dans cette région très isolée, beaucoup de gens ne l’aimaient pas. Il aurait dû redoubler de précautions (…) Là-bas, il y a des pirates sur le fleuve, c’est imprudent d’arpenter les lieux sans être armé”, a-t-il ajouté, lors d’un entretien à la chaîne YouTube de la journaliste Leda Nagle.
Avec AFP