Une semaine après les éruptions de violences qui ont secoué le pays pendant plus de 48 heures, le calme est de retour sur l’île Maurice. De nombreuses voix appellent le gouvernement à revoir les prix de l’alimentaires. Mais pour beaucoup d’observateurs, ces scènes de violences sont aussi symptomatiques d’un malaise plus profond dans l’île. Reportage d’Abdoollah Earally, le correspondant de France 24 à Port-Louis.
Les troubles ont débuté le 20 avril, sur l’île Maurice, à Camp Levieux. Des habitants ont d’abord manifesté contre la vie chère, avant de se révolter après l’arrestation de l’organisateur de la protestation.
Selon Olivier Précieux, enseignant en sociologie, c’est un cocktail de frustrations qui s’est alors exprimé. “C’est une explosion qui dénote un certain malaise sociale dans le pays, chômage, la hausse des prix, la gérance (gestion) des problèmes sociaux à Maurice n’a pas été très bien faite par le gouvernement en place”, explique cet observateur des quartiers ouvriers.
Les manifestants ont bravé tous les interdits devant le quartier général même de la police, dans la capitale, alors que les rassemblements sans autorisation de plus 12 personnes sont illégaux à Maurice.
Pour les associations de consommateurs, les hausses successives du gaz de 30 % et des carburants de 25 % décidées par le gouvernement ont provoqué cette colère populaire prévisible.
“Pas plus loin que la semaine dernière, j’avais affirmé sur une radio que la situation sociale nous dirige vers une explosion. J’avais estimé que la hausse de l’essence serait une provocation”, estime Mosadeq Sahebdin, président de la Consumer Advocacy Platform.
Des soupçons de corruption
Les prix des denrées, des légumes et du poulet réunis ont augmenté de 20 % ces derniers mois. Les classes moyennes peinent aujourd’hui à boucler les fins de mois.
Les restrictions et les soupçons de corruption pendant la pandémie s’ajoutent à la fronde des Mauriciens. Environ 25 millions d’euros de médicaments et d’équipements sanitaires ont été importés dans des conditions suspectes pour la population.
“Quand ils ont découvert avec exaspération que les médicaments et des équipements sanitaires ont été importés dans l’opacité la plus complète à des prix exorbitants et que des gens ont profité de cette souffrance, les gens se sont mis en colère”, décrit Kee Chong Li Kwong Wing, économiste et ancien président de la banque d’État.
Colère contre la corruption, contre le pouvoir, contre la vie chère, ces manifestations ont donné lieu à un concentré de revendications comme le pays en a rarement connues.