Deux photos transmises à la rédaction des Observateurs de France 24 affirment montrer des saisies d’armes dans la région de Moura après une opération de l’armée malienne le 23 mars dernier, qui fait depuis vivement polémique. Mais ces photos ont été prises dans d’autres pays et n’ont rien à voir avec la situation à Moura.
L’armée malienne a affirmé avoir mené ces actions pour lutter contre des groupes jihadistes et déclare avoir neutralisé “200 terroristes”. Mais des associations de défense des droits de l’Homme, notamment Human Rights Watch, affirment qu’au moins 300 civils auraient été tués lors de cette opération menée conjointement avec de présumés mercenaires russes du groupe Wagner. Devant la pression internationale, la justice militaire malienne a annoncé l’ouverture d’une enquête le 6 avril.
Sur les réseaux sociaux, des utilisateurs affirment que l’armée malienne aurait dépossédé des “civils” armés, preuves en seraient deux photos circulant à la fois sur des pages Facebook maliennes et des groupes WhatsApp. Ces photos sont parfois agrémentées de notes vocales en bambara, langue officielle du Mali, justifiant l’action de l’armée malienne contre des civils jugés dangereux.
Pourquoi c’est faux
Aucune de ces deux photos n’a pourtant de lien avec la situation à Moura au Mali.
Une recherche d’image inversée avec le moteur de recherche russe Yandex (voir ici comment procéder) permet de retrouver la première photo sur des sites nigérians comme ici ou là documentant une saisie d’armes par l’armée tchadienne en avril 2020.
On retrouve également ces photos publiées dès le 4 avril 2020 par plusieurs médias et utilisateurs tchadiens sur Facebook, précisant que cette saisie a eu lieu dans le cadre de l’opération “Colère de Bohama”, menée contre Boko Haram conjointement par les armées tchadienne et nigériane.
On retrouve la photo dans cette publication Facebook datant du 4 avril 2020 en 3e position.
Concernant la deuxième photo, une recherche d’image inversée avec Google Lens permet de mettre en évidence un tweet effectué par le compte @SahelSecurity analysant la situation sécuritaire dans le Liptako-Gourma, une région historique de l’Afrique de l’Ouest à cheval entre le Niger, le Mali et le Burkina Faso. On y lit : “Ce 10.06.2021 une équipe du détachement de #Gendarmerie de #Arbinda a été accrochée par des hommes armés. Bilan provisoire : 2 gendarmes blessés et évacués, au moins 4 assaillants neutralisés, de l’armement et du matériel divers saisis.”
#Burkina #Sahel #Soum: ce 10.06.2021 une équipe du detachement de #Gendarmerie de #Arbinda a été accroché par des hommes armés.
Bilan provisoire: 2 gendarmes blessés et evacués, au moins 4 assaillants neutralisés, de l’armement et du materiel divers saisis. pic.twitter.com/KWryMaxQbN— Sahel Security Alerts (@Sahel_Security) June 10, 2021
Dans ce tweet datant du 10 juin 2021, on retrouve la photo en haut à droite.
Une recherche avec les mots clés “Arbinda attaque” sur Facebook, en limitant la recherche à l’année 2021, permet d’identifier plusieurs publications corroborant cette version, ainsi que d’autres photos montrant exactement le même lieu. Une embuscade avait été tendue par les forces de sécurité burkinabè contre des groupes terroristes dans le village de Gorguel, près d’Arbinda.
Photo partagée le 10 juin 2021 documentant une intervention des forces de sécurité burkinabé dans le village de Gorguel, près de Arbinda. On reconnait notamment le même sac de riz jaune au sol et la même pochette “FILA” sur la droite.
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