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“On a du mal à oublier les gens restés sur place” : le récit en images d’un Français en Ukraine

Comme beaucoup de bénévoles européens depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, le Français Geoffroy Bire participe depuis début mars à des convois humanitaires qui livrent du matériel médical en Pologne, au plus proche de la frontière ukrainienne, et aident des Ukrainiens cherchant à quitter le pays à joindre des zones plus sûres en Europe. Il apporte son témoignage, agrémenté de photos prises sur la route, à la rédaction des Observateurs de France 24. 

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Photographe de profession, Geoffroy Bire est bénévole depuis début mars pour l’association “Solidarité Ukraine-Lyon”, créée en mars 2022 en parallèle de l’invasion russe en Ukraine qui engendre un flux de déplacés ukrainiens et étrangers en Europe. Le Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) compte au 29 mars plus de 4 millions de réfugiés dont 2,9 millions en Pologne, un chiffre jamais enregistré en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Depuis début mars, l’association a envoyé quatre caravanes composées de six véhicules, allant de Lyon à Zamosc, une ville polonaise située à une soixantaine de kilomètres des frontières ukrainiennes. Geoffrey a participé jusque-là à deux de ces convois humanitaires. Il a documenté dans une série de photos l’expédition du 25 au 27 mars, qu’il a envoyées à la rédaction des Observateurs. 

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Le récit accompagnant les images a comme fil conducteur Kori, une petite perruche verte et jaune transportée le 27 mars du camp pour réfugiés de Zamosc à Lyon, dans sa cage, avec ses propriétaires. Le photographe a choisi de construire son récit autour de l’oiseau, racontant à travers son voyage le sentiment d’aliénation que les réfugiés peuvent vivre en quittant leur pays pour un pays étranger.

La perruche Kori a voyagé avec sa famille de Kiev, en Pologne, pour ensuite rejoindre la France le 27 mars.
La perruche Kori a voyagé avec sa famille de Kiev, en Pologne, pour ensuite rejoindre la France le 27 mars. © Geoffrey Bire

“Parfois, nous devons convaincre les gens hésitants”

Contacté, Geoffrey Bire raconte:

Nous travaillons sous couvert de la Croix Rouge, c’est-à-dire que l’organisation nous affuble de son logo, afin de faciliter l’accès aux frontières, et fluidifier les échanges avec la police polonaise, notamment lorsque l’on organise le transfert de demandeurs d’asile ou des réfugiés ukrainiens vers l’Europe. Ça nous donne une légitimité. À ma toute première expédition, nous avons livré du matériel médical à Zamosc. Là-bas, nous déchargeons les dons auprès de nos partenaires polonais, qui les distribuent à leur tour, à la fois aux camps de réfugiés ukrainiens en Pologne et les envoient aussi sur le front en Ukraine.

J’ai rejoint l’équipe des convois, dans un premier temps, en réaction au choc que m’a fait l’actualité en Ukraine. Puis, après le premier trajet, on a du mal à oublier les gens restés sur place, alors on y retourne. Nous partons toujours en binôme, pour se relayer sur la conduite. Nous essayons de partir le vendredi soir et revenir en France dimanche, ce qui nous fait environ vingt-cinq heures de route pour l’aller, environ cinquante heures aller-retour. 





Cette série de photos suit le fil du trajet : les premières images montrent le départ aux aurores de Lyon, on organise les communications par radio, on fait le point sur l’itinéraire… Jusqu’ici, nous avons transporté 46 personnes de Pologne en France dans nos camions. Une fois les dons livrés au dépôt, nous allons visiter le camp de réfugiés et nous préparons le départ des personnes qui souhaitent venir en France. 

Parfois, nous devons convaincre les gens hésitants. C’est dur de quitter son pays, surtout lorsqu’on n’a aucun repère dans son futur pays d’accueil. Ils ont aussi besoin d’être rassurés sur qui les transporte. Mais grâce aux traducteurs, nous arrivons à gagner une certaine forme de confiance.

D’autres personnes ont déjà des contacts ou des proches en France ou dans d’autres pays européens ; le départ leur est un peu moins difficile. Nous avons transporté des réfugiés venant de Kharkiv, de Kiev ou encore de Lviv.

“Nous avons pu échanger à l’aide de signes et de dessins, c’est un bon moyen pour briser la glace”

Dans le convoi du dimanche 27 mars, j’ai transporté avec moi une famille ukrainienne de Kiev : une grand-mère, une mère et un enfant, les propriétaires de l’oiseau Kori. La grand-mère habitait à côté de l’aéroport qui a été bombardé [l’aéroport militaire de Gostomel, bombardé le 25 février, se trouve à quelques 70 kilomètres au nord-ouest de Kiev]. Sa maison est sûrement détruite aujourd’hui.

Elles ont dormi une grande partie du trajet, mais nous avons pu échanger à l’aide de signes et de dessins, c’est un bon moyen pour briser la glace. Cependant, elles ne parlaient pas beaucoup de leurs ‘hommes’, restés en Ukraine. Leur première occupation, c’est de savoir s’il y aura d’autres Ukrainiens sur place, dans le foyer d’accueil. 





Parfois il n’est pas possible de garantir le foyer pour une famille avant le départ, mais nous arrivons finalement à gérer ça à distance, sur le trajet du retour. Nous n’avons pas le droit de déposer les réfugiés dans la rue en France, il faut prévoir un foyer pour les héberger. Quant aux enfants, il faut vérifier qu’ils sont bien accompagnés de leurs proches, car il y a eu beaucoup de disparitions aux frontières.

Heureusement, il y a une structure d’accueil qui assure le processus d’insertion à Lyon, avec des traducteurs, des aides-sociales : toute une chaîne de solidarité qui se crée ! Et en attendant la fin de la crise, on essaie de faire ce qu’on peut.





À l’image de Geoffrey Bire, si vous souhaitez nous transmettre des histoires, des témoignages, ou des images amateur concernant votre implication autour de la situation en Ukraine, n’hésitez pas à écrire à notre rédaction à l’adresse suivante : observateurs@france24.com ; ou contactez-nous sur Facebook ou sur Instagram.

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