Six mois après les législatives anticipées d’octobre 2021, les députés irakiens sont appelés à élire samedi le président de la République. Une première tentative avait eu lieu début février et avait échoué en raison d’appels au boycott. Ce nouvel essai pourrait connaître le même sort.
La deuxième sera-t-elle la bonne ? Les députés irakiens sont appelés à élire, samedi 26 mars, un président de la République, six semaines après une première tentative infructueuse. Cependant, avec les multiples appels au boycott, le vote pourrait s’avérer tout aussi vain que le premier.
Six mois après les législatives anticipées d’octobre 2021, l’Irak ne connaît toujours pas le nom de son nouveau président, ni celui de son Premier ministre, clef de voûte de l’exécutif. Or la désignation du second est conditionnée à l’élection du premier.
En clair : les parlementaires doivent d’abord élire le chef de l’État pour que celui-ci nomme à son tour le chef du gouvernement, poste qui fait l’objet d’interminables tractations entre partis.
>> À lire aussi : Présidentielle en Irak : les divisions politiques reflètent la “fracture globale du pays”
Deux tiers des voix requis pour l’élection
Le scrutin de samedi pourrait connaître le même sort que celui du 7 février en raison, là aussi, d’appels au boycott, notamment d’un bloc chiite pro-Iran qui dit pouvoir mobiliser un total de 131 élus. Et même si l’élection a lieu, elle mettra en exergue l’ultra-polarisation de la vie politique irakienne.
Parmi les 40 candidats en lice pour cette élection qui doit avoir lieu à partir de 11 h (08 h GMT), deux sortent du lot : le sortant Barham Saleh, président de l’Irak depuis 2018 et issu de l’Union patriotique du Kurdistan (UPK), et Rebar Ahmed du Parti démocratique du Kurdistan (PDK). Le candidat victorieux doit obtenir au moins deux tiers des voix.
Depuis les premières élections multipartites de 2005, organisées après l’invasion américaine de 2003 qui renversa Saddam Hussein, la présidence – poste largement honorifique – va traditionnellement à un Kurde de l’UPK. En échange, le PDK est à la tête du gouvernement régional kurde à Erbil.
Une première tentative s’est soldée par un échec le 7 février, le vote n’ayant pu être organisé faute de quorum. Les deux tiers au moins des députés (220 sur 329) doivent être présents, mais ce jour-là les partis les plus importants avaient observé un boycott de la séance.
Ils entendaient se donner plus de temps après que l’un des favoris, Hoshyar Zebari, un ancien ministre issu du PDK, a été privé d’élection après avoir été rattrapé par des scandales de corruption.
Moqtada al-Sadr veut imposer ses candidats et rompt avec la tradition
D’un côté, le turbulent mais incontournable leader chiite Moqtada al-Sadr, grand gagnant des législatives d’octobre 2021, a façonné une coalition tripartite avec des partis sunnites et le PDK kurde. Il réunit au total 155 élus. De l’autre, le Cadre de coordination, un alliage de formations chiites pro-Iran, compte une petite centaine de députés et appelle au boycott de la séance de samedi.
Mercredi, l’alliance autour de Moqtada al-Sadr, baptisée “Sauvetage de la patrie”, a fait part de son soutien à Rebar Ahmed pour la présidence. Prévoyant la suite, Moqtada al-Sadr veut ensuite confier le poste de Premier ministre à son cousin et beau-frère Jaafar al-al-Sadr, actuel ambassadeur d’Irak à Londres.
Mais tout l’enjeu est de savoir si l’appel au boycott lancé par le Cadre de coordination sera suivi.
Selon des sources parlementaires à l’AFP, 131 élus pourraient suivre cet appel et observer la politique de la chaise vide. Dans ce cas, le quorum serait loin d’être atteint, l’élection une nouvelle fois reportée et le calendrier politique toujours bloqué.
Le Cadre de coordination entend par son appel au boycott protester contre le “gouvernement majoritaire” que Moqtada al-Sadr appelle de ses vœux. Le Cadre ainsi que l’ancien Premier ministre Nouri al-Maliki veulent, eux, poursuivre la tradition irakienne du gouvernement de consensus autour de tous les partis chiites.
Pour le politologue Ihsan al-Shammari, même si le quorum est atteint, l’élection du président “ne se décidera pas samedi au premier tour”. Un second tour est donc possible, selon lui. Dans ce cas, seul le candidat ayant remporté le plus de voix au premier tour concourra. Pour être élu, il devra réunir au moins les deux tiers des votes.
Avec AFP