Lors de son passage en Colombie, dans le cadre de sa tournée sud-américaine, le secrétaire d’État américain, Antony Blinken, a rencontré le président colombien conservateur, Ivan Duque. Il a fait l’éloge de la Colombie, un “modèle” pour sa gestion des migrants fuyant le Venezuela voisin, dont il a fustigé la “dictature oppressive, corrompue et narcotrafiquante”.
Au deuxième jour de sa tournée sud-américaine, mercredi 20 octobre, le diplomate en chef des États-Unis, Antony Blinken, a fait l’éloge de la Colombie, son “meilleur allié” dans la région et un “modèle” pour sa gestion des migrants fuyant le Venezuela voisin.
“Nous n’avons pas de meilleur allié sur tous les sujets que nos démocraties affrontent dans la région”, a déclaré Antony Blinken, au cours d’une conférence de presse commune avec le président colombien conservateur, Ivan Duque.
“La Colombie a démontré une énorme générosité en accueillant près de deux millions de migrants vénézuéliens déplacés par l’actuelle crise humanitaire au Venezuela”, a loué le chef de la diplomatie américaine, venu en messager de la politique dans la région de la nouvelle administration du président démocrate Joe Biden.
Ivan Duque, qui a de nouveau fustigé mercredi la “dictature oppressive, corrompue et narcotrafiquante” du Venezuela, a lancé cette année un plan audacieux visant à régulariser le statut de près d’un million de Vénézuéliens sans-papiers.
“Approche coordonnée”
“Je vous applaudis, je vous félicite pour votre vision et votre leadership”, lui a dit le secrétaire d’État, soulignant que ce que la Colombie a fait “est un modèle pour la région et aussi un modèle pour le monde”.
L’Amérique latine connait actuellement des mouvements de population “sans précédent” en direction des États-Unis, s’est alarmé Antony Blinken, qui a appelé les gouvernements alliés à “adopter une approche coordonnée” pour faire face à cette “pression migratoire”.
Nous devons également “nous attaquer plus efficacement à la cause profonde de la migration et de la migration irrégulière. C’est-à-dire à ce qui pousse les gens à tout quitter pour faire un voyage aussi dangereux à travers le continent”, a-t-il plaidé.
Dans l’après-midi, il a rencontré plusieurs ministres des pays de la région et des Caraïbes sur ce thème, proposant de “renforcer la surveillance des frontières en exigeant des visas et en contrôlant méticuleusement” l’entrée des migrants se déplaçant sans document.
Il a également appelé à “améliorer les procédures d’asile” et à “créer davantage d’options de protection et d’installation” pour les migrants, particulièrement vulnérables aux risques de traite d’êtres humains.
Pour sa première visite en Amérique du Sud, Antony Blinken s’est rendu mardi en Équateur, avant de terminer sa tournée en Colombie, le plus proche allié des États-Unis dans leur croisade contre le trafic de drogue et contre le gouvernement chaviste du président vénézuélien Nicolas Maduro.
Mercredi, le président vénézuélien a estimé que le Venezuela et la Colombie, qui n’ont plus de relations diplomatiques depuis 2019, devaient “normaliser” leurs rapports.
“Nous devons résoudre nos problèmes, régulariser, normaliser les relations commerciales, productives, économiques. Nous devons normaliser les relations consulaires, diplomatiques”, a-t-il dit à la télévision nationale en saluant une initiative du Sénat colombien qui propose de créer une commission parlementaire binationale sur les relations entre les deux voisins partageant 2 200 km de frontières terrestres.
Nicolas Maduro a toutefois accusé dans le même temps le président colombien Ivan Duque de ne pas fournir d’assistance consulaire aux Vénézuéliens vivant en Colombie, où sont réfugiés près de 2 des 30 millions de Vénézuéliens ayant depuis 2013 fui la crise économique et politique dans leur pays.
Souhaitant une “page qui se tourne”, Nicolas Maduro a invité les hommes d’affaires colombiens à “reprendre” leurs investissements dans le pays embourbé dans la pire crise de son histoire récente, avec une hyperinflation et sept années consécutives de récession.
Caracas avait rompu les relations diplomatiques en 2019 avec Bogota après la reconnaissance par la Colombie, ainsi qu’une cinquantaine d’autres pays dont les États-Unis, de Juan Guaido comme président par intérim.
Mais la frontière entre les deux pays était déjà presque intégralement fermée depuis 2015 en raison des tensions récurrentes entre les deux voisins. Récemment, Caracas et Bogota ont tous les deux annoncé la réouverture de leurs frontières terrestres sans que cela soit suivi d’effet sur le terrain.
Paix, narcos et droits de l’Homme
“Le thème central de ce voyage est comment travailler ensemble pour faire que nos démocraties fonctionnent dans l’intérêt de nos citoyens”, a réaffirmé Antony Blinken, mercredi, reprenant le message de la Maison Blanche face à l’influence grandissante du populisme et des autoritarismes, dans la région comme ailleurs sur la planète.
Lors de sa visite à Quito, il a exprimé la volonté de l’administration Biden de non plus seulement se concentrer sur les questions sécuritaires, mais de soutenir les citoyens au quotidien.
“Notre bilan en matière d’amélioration de la sécurité dans les démocraties de la région est mitigé”, a reconnu Antony Blinken à l’Université San Francisco de Quito.
Selon le Secrétaire d’État, les États-Unis doivent être plus attentifs aux préoccupations économiques et sociales des citoyens, telles que l’amélioration des droits du travail, la santé ou l’éducation.
À Bogota, Antony Blinken n’en a pas moins renouvelé l’engagement des États-Unis envers la Colombie sur les questions de sécurité, en particulier pour “s’attaquer aux racines du trafic de drogue”, carburant qui a alimenté le conflit colombien jusqu’à la signature d’un accord de paix historique avec les Farc marxistes en 2016. Les violences liées au narcotrafic perdurent encore aujourd’hui avec les nombreux groupes armés impliqués.
Après près de cinq décennies de lutte contre le trafic de drogue, la Colombie reste le premier producteur mondial de cocaïne et les États-Unis le principal consommateur, malgré les efforts américains pour “réduire la demande”.
Antony Blinken a également mis l’accent sur les “violations des droits de l’Homme” liées au conflit colombien et, plus récemment, aux manifestations sociales durement réprimées par les forces de l’ordre. Il a souligné que les responsables devaient répondre de leurs actes, insistant sur la nécessité de “mettre fin à l’impunité”.
Les États-Unis ont soutenu l’accord de paix avec les Farc, qui a permis le désarmement de 13 000 guérilleros. Mais le gouvernement du président Duque, chargé de sa mise en œuvre, continue cependant de questionner l’impunité qu’il offrirait aux personnes coupables des crimes les plus graves.
Le secrétaire d’État a reconnu les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’accord, même s’il a noté qu'”il faut faire davantage pour accroître et renforcer la présence de l’État dans les zones rurales”, où la violence a continué après le démantèlement de la guérilla.
Avec AFP