Plusieurs images publiées sur les réseaux sociaux montrent les dégâts matériels et humains d’une attaque d’un groupe rebelle perpétrée le 5 octobre sur la route qui mène à Bambari et qui a fait au moins 38 morts. Cette grande ville du centre du pays est la cible d’attaques récurrentes des rebelles de la Coalition des Patriotes au Changement (CPC), qui veulent en prendre à nouveau le contrôle.
Des camions calcinés et une dizaine de corps qui jonchent le sol. Mardi 5 octobre des rebelles présumés de la Coalition des Patriotes au changement (CPC) ont attaqué en fin de matinée un convoi de trois camions qui transportaient des marchandises et des personnes de la ville Bambari, l’une des plus importantes villes du pays, dans la préfecture de Ouaka à 380 km de Bangui. Il se dirigeait vers Alindao, une ville agricole.
“Les rebelles du CPC se cachent dans la forêt pour attaquer les populations”
Le bilan est lourd. Au moins 38 personnes sont mortes selon les autorités locales et la Croix-Rouge. Contacté par la rédaction des Observateurs de France 24, Jean (pseudonyme) un humanitaire centrafricain qui intervient dans la zone et s’est entretenu avec un rescapé raconte. Son prénom a été changé pour des raisons de sécurité.
Le convoi de camions transportait aussi des passagers. Du fait de l’insécurité et du mauvais état de la route, il y a de moins en moins de transports. Les voyageurs profitent donc des convois de poids-lourds pour se rendre à Bambari ou la quitter.
La route qui relie Bambari à Alindao est très dangereuse et traverse la forêt dense de Ouaka. Les rebelles du CPC s’y cachent pour attaquer les populations. Ils font du kidnapping, du braquage ou du racket. Le plus souvent, après leur forfait, ils laissent les camions repartir, mais mardi ça a été le drame.
Au moment où les rebelles interceptaient les camions et forçaient les passagers à descendre au niveau du village Matshika, un pick-up dans lequel se trouvait un soldat des Forces armées centrafricaines (Faca) venait dans le sens inverse. Il a ouvert le feu. Et les rebelles ont riposté pensant que des soldats étaient cachés dans les camions. Une trentaine de personnes sont mortes. Vingt-deux corps ont été transportés au Centre hospitalier de Bambari et une dizaine de personnes ont été envoyées à la mosquée pour des inhumations selon les rites musulmans.
Au plus fort de la crise centrafricaine en 2014, Bambari était une ville contrôlée par les rebelles de l’Unité pour la paix en Centrafrique (UPC), un groupe issu de la coalition Séléka à majorité musulmane. Ils ont depuis perdu leurs positions stratégiques grâce aux différentes offensives menées par la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Centrafrique (Minusca) et les Faca. Regroupés aujourd’hui avec d’autres mouvements armés au sein du CPC dirigé par l’ex-président François Bozizé, les rebelles multiplient les incursions dans le but de reconquérir la ville de Bambari.
“Je ne comprends pas pourquoi les camions n’ont pas été escortés mardi”
Contacté par RFI, l’UPC a affirmé ne pas être responsable de l’attaque, assurant ne pas s’en prendre aux civils. Jeudi 7 octobre, une nouvelle attaque attribuée aux rebelles du CPC contre des positionnements des Forces armées centrafricaines dans la ville de Ngakobo, toujours dans la préfecture de Ouaka, a fait trois morts.
Ces attaques, malgré le couvre-feu instauré depuis le 1er octobre dans la préfecture de Ouaka, inquiètent notre Observateur, qui alerte sur l’insécurité alimentaire des populations.
Habituellement, les transporteurs de marchandises sollicitent les Casques bleus de la Minusca pour les escorter sur l’axe Alindao- Bambari. Je ne comprends pas pourquoi les camions n’ont pas été escortés mardi. Actuellement à cause de la recrudescence de ces attaques et de l’insécurité, les gens ont très peur et ont du mal à vaquer à leurs occupations. Ils ne peuvent pas aller au champ. Une grave crise alimentaire les menace donc et il faut une réponse humanitaire urgente.
Victor Bissekoin, le préfet de Ouaka, n’a pas donné suite à nos sollicitations.
Depuis 2013 et le renversement du chef de l’État François Bozizé, la Centrafrique est en proie à des conflits armés entre groupes rebelles et l’armée. Malgré un accord de paix signé en 2019 à Khartoum et qui entérine le processus de paix entamé en 2012, l’État ne contrôle qu’un tiers du territoire national.