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Primaire écologiste : Yannick Jadot ou l’ambition d’un “pragmatique”

Candidat le plus à même de faire gagner l’écologie en 2022 pour les uns, écologiste trop libéral pour les autres, Yannick Jadot divise les électeurs de la primaire écologiste. Candidat éphémère en 2017, il compte cette fois-ci être candidat jusqu’au bout.

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“La radicalité que je porte, c’est de gagner l’élection présidentielle.” Au lendemain des résultats du premier tour de la primaire écologiste, Yannick Jadot estime avoir trouvé son angle d’attaque face à la radicalité assumée de sa concurrente, Sandrine Rousseau. “Est-ce que nous voulons gagner ? Est-ce que nous voulons conquérir le pouvoir en 2022 ?”, a-t-il demandé à l’électorat écologiste, lundi 20 septembre, sur France Inter.

Député européen depuis 2009, acteur majeur de la politique française depuis 2016, Yannick Jadot, 54 ans, a eu le temps de se faire un nom dans le paysage politique et médiatique français et a longtemps fait figure de favori dans cette primaire écologiste. L’affaire semblait tellement pliée pour certains que les sondeurs n’avaient jusqu’ici jamais pris la peine de tester le nom des autres candidats dans leurs études d’opinion.

>> À lire : Sandrine Rousseau, la surprise radicale et féministe de la primaire écologiste

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Sa concurrente au second tour de la primaire (vote en ligne du 25 au 28 septembre), Sandrine Rousseau, ne peut en effet se targuer d’un CV politique comparable. Par son assiduité, sa force de travail et sa compréhension des dossiers techniques qu’il traite au Parlement européen, Yannick Jadot s’est forgé une réputation de député européen plutôt flatteuse. Vice-président de la commission du Commerce international, il a notamment obtenu – avec d’autres – une victoire en faisant interdire la pêche électrique. Son nom est également associé au combat contre les traités de libre-échange. Son intervention au Parlement européen contre le CETA (traité de libre-échange entre l’UE et le Canada), le 27 octobre 2016, a ainsi été visionnée 1,5 million de fois sur son compte Facebook.


“C’est quelqu’un qui travaille les dossiers et qui pourra sans doute faire valoir lors du débat face à Sandrine Rousseau sa grande compétence technique”, estime Daniel Boy, directeur de recherches émérite au Cevipof et spécialiste de l’écologie politique, contacté par France 24. “Que ce soit la taxe carbone aux frontières ou les traités sur le commerce international, il connaît ces sujets sur le bout des doigts.”

C’est d’ailleurs son activité d’eurodéputé qui lui permet, à l’automne 2016, de remporter la primaire EELV face à Michelle Rivasi (arrivée 2e), Cécile Duflot et Karima Delli (éliminées au premier tour) pour devenir le candidat des Verts à l’élection présidentielle. Il parvient alors à faire la synthèse entre l’aile droite et l’aile gauche du parti. Mais sa candidature est éphémère. Sans attendre la consultation des adhérents, il décide en février 2017 de rallier le candidat socialiste, Benoît Hamon.

Accusé de la jouer solo

Son nom et son visage sont toutefois désormais identifiés du grand public et c’est lui que les Verts choisissent en 2019 pour être tête de liste aux européennes. Avec un score de 13,47 %, EELV crée alors la surprise en se plaçant en troisième position derrière les listes du Rassemblement national et de La République en marche. Yannick Jadot se sent pousser des ailes et s’imagine déjà portant l’écologie au pouvoir en 2022.

“En réalité, depuis sa candidature en 2017, Yannick Jadot n’a jamais cessé de se comporter comme s’il était toujours le candidat EELV à la présidentielle, avec une omniprésence dans les médias, analyse Daniel Boy. C’était un peu culotté de sa part. Il a pris beaucoup de risques vis-à-vis de son parti.”

>> À lire : Avec 122 000 inscrits à leur primaire, les écologistes veulent croire à une dynamique

En interne, cette propension à se mettre en avant et à prendre des libertés avec le collectif agacent. “Il faut se défier de la tentation de l’arrogance”, lance l’ancien secrétaire national du parti, David Cormand, lors des journées d’été d’EELV d’août 2019, dans une tirade adressée sans le nommer à Yannick Jadot. “Si nous, nous nous mettons à faire la leçon à tout le monde, personne ne nous accordera le moindre crédit. Le succès ne nous accorde aucun passe-droit mais des devoirs essentiels : un devoir de constance. La tyrannie des ego ne doit pas détruire notre travail commun”, assène-t-il.

Malgré ces rappels à l’ordre, l’eurodéputé ne dévie pas sa route. En lançant sa plateforme, “2022, l’écologie”, en février 2021, puis en organisant des réunions avec l’ensemble des partis de gauche, au printemps, sans prévenir les dirigeants de son propre parti, il donne même l’impression de vouloir imposer sa candidature sans passer par la case primaire.

>> À lire : L’union de la gauche, cette Arlésienne à laquelle plus grand monde ne croit

Sa volonté d’unir la gauche tient d’ailleurs du revirement. Car deux ans plus tôt, lors de la campagne des européennes, Yannick Jadot ne voulait pas entendre parler d’union et affirmait n’être “ni de droite, ni de gauche”. “L’écologie, c’est pas la gauche. L’écologie veut occuper une place centrale dans le débat politique. L’écologie, c’est bien plus que la gauche”, affirmait-il en février 2019.

Durant cette campagne, il se dit également, dans une interview au Point, “pour le commerce, la libre entreprise et l’innovation”. Dans Le Figaro, il se définit comme le représentant d’une écologie “pragmatique”.

“Ça fait trente ans que je suis écologiste”

“Cette image d’écolo lorgnant vers le centre lui colle à la peau et il est clair que face à Sandrine Rousseau, il représente une écologie qui n’exclut pas de travailler avec les entreprises alors que pour la majorité des Verts, que ce soit au sein du parti ou chez les militants, c’est l’État qui doit changer les choses”, analyse le spécialiste de l’écologie politique.

D’autant que Yannick Jadot se montre peu enclin à soutenir les Gilets jaunes – “Il faut que ça s’arrête”, dit-il en février 2019 au sujet des manifestations du samedi. Mais prompt à défendre la police comme lors de leur manifestation controversée, le 19 mai 2021, après la mort de l’un des leurs dans une opération antidrogue. “C’est un moment de deuil, de solidarité. Je veux dire au nom des écologistes notre attachement à la police républicaine. Il faut écouter les syndicats de police et leur dire quelles sont nos propositions pour la sécurité des Français”, se justifie-t-il le jour même, sur France 2, alors que la direction d’EELV, de son côté, critique la manifestation.

Pour se départir de cette réputation de centriste, Yannick Jadot rappelle, depuis les résultats du premier tour de la primaire, son passé d’activiste au sein de plusieurs ONG, notamment avec Solagral, spécialisée dans le suivi des négociations internationales et l’appui aux pays en développement, et Greenpeace France, dont il est le directeur des campagnes de 2002 à 2008.

“Moi, ça fait trente ans que je suis écologiste. J’étais avec les paysans pour lutter contre le libre-échange, j’étais avec les femmes opprimées au Bangladesh, quand j’ai été espionné par EDF, j’arrachais des OGM”, a-t-il insisté, lundi matin, sur France Inter. Une façon pour lui de prouver qu’il est aussi radical que sa concurrente lorsqu’il s’agit de défendre l’environnement. Aux électeurs d’en juger.

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