Après avoir arrêté le président guinée Alpha Condé, les putschistes ont convoqué, lundi, les ministres sortants et les présidents des institutions au siège du Parlement et déclaré la réouverture des frontières. La veille, ils ont annoncé la dissolution de la Constitution et du gouvernement, et instauré un couvre-feu dans tout le pays.
La Guinée s’est réveillée, lundi 6 septembre, en pleine incertitude. Les putschistes guinéens, qui ont capturé le président Alpha Condé et annoncé la dissolution des institutions, devraient en dire plus, lundi 6 septembre, sur leur plan de marche, après un coup d’État largement condamné par la communauté internationale mais salué par des scènes de liesse à Conakry.
Ces officiers des forces spéciales ont convoqué les ministres sortants et les présidents des institutions à une réunion lundi à 11 h (heure locale et GMT) au Palais du peuple, siège du Parlement, dans un format qu’ils n’ont pas précisé. “Tout refus de se présenter sera considéré comme une rébellion”, ont-ils prévenu.
Les forces spéciales guinéennes conduites par leur commandant, le lieutenant-colonel Mamady Doumbouya, disent avoir capturé le chef de l’État pour mettre fin à “la gabegie financière, la pauvreté et la corruption endémique” ou encore “l’instrumentalisation de la justice (et) le piétinement des droits des citoyens”.
Un collectif qui s’était mobilisé pendant des mois contre un troisième mandat du président Condé a indiqué que ses membres emprisonnés seraient libérés vers 11 h 30.
Alpha Condé en “lieu sûr”
Dans une interview exclusive accordée à France 24, Mamady Doumbouya a affirmé que ses hommes détenaient Alpha Condé. “Le président est avec nous. Il est dans un lieu sûr. Il a déjà vu un médecin”, a-t-il déclaré. “On tient tout Conakry et on est avec toutes les forces de défense et de sécurité pour enfin mettre fin au mal guinéen”, a-t-il poursuivi.
Les putschistes ont également diffusé une vidéo, non authentifiée, du président Condé entre leurs mains. Ils lui demandent s’il a été maltraité, et Alpha Condé, en jeans et chemise froissée dans un canapé, refuse de leur répondre.
Réouverture des frontières
Au lendemain de la tentative de coup d’État, la Guinée a rouvert ses frontières terrestres et aériennes pour les échanges commerciaux et humanitaires, a annoncé lundi un porte-parole de l’armée lors d’une intervention diffusée par la télévision publique.
Les putschistes avaient décrété dimanche la fermeture des frontières mais aussi l’instauration d’un couvre-feu dans tout le pays “jusqu’à nouvel ordre”. Aussi, la capitale guinéenne Conakry, habituellement bouillonnante, s’est réveillée au ralenti lundi matin. Les militaires ont dressé à l’entrée du centre-ville des barrages contrôlés par des soldats des forces spéciales assistés de quelques hommes du Bataillon autonome des troupes aéroportées.
Des soldats armés et encagoulés interdisaient d’approcher le palais présidentiel. Nombre de magasins sont restés fermés et le marché central de Madina était étonnamment inactif. Le calme était entrecoupé par les applaudissements des quelques résidents sortis dans la rue au passage de véhicules militaires circulant à toute allure.
Les militaires affirment vouloir rendre “la politique au peuple”. Ils ont proclamé dissoudre le gouvernement, les institutions et la Constitution qu’avait fait adopter Alpha Condé en 2020 et dont il s’était servi pour se présenter la même année à un troisième mandat, malgré des mois de contestations meurtrières. Ils ont promis une période de transition, à la manière du voisin malien, théâtre d’un putsch lui aussi récemment.
Dans la soirée de dimanche, ils ont annoncé au journal télévisé remplacer les ministres par les secrétaires généraux de chaque ministère, et les préfets, sous-préfets et gouverneurs de région par des militaires. Ils ont appelé les fonctionnaires à “reprendre le travail dès ce lundi”.
Coup d’Etat contre Alpha Condé en Guinée : portrait d’un président très attaché au pouvoir
Leur coup de force surprise parachève des mois de grave crise politique et économique, aggravée par la pandémie de Covid-19, sous la présidence très personnalisée, autoritaire selon ses détracteurs, du président Condé, au pouvoir depuis 2010 mais de plus en plus isolé.
Avec AFP