Trois mois après l’éruption du volcan Nyiragongo, le 22 mai, des milliers d’habitants des quartiers sinistrés se trouvent encore dans des campements de fortune en périphérie de Goma. Autour de l’école primaire de Kayembe, dans le nord de la ville, des familles déplorent un manque d’assistance et demandent à être relogées.
Dans la nuit du 22 au 23 mai, l’entrée en éruption inattendue du volcan Nyiragongo, situé à une quinzaine de kilomètres de la ville congolaise de Goma, a détruit plusieurs quartiers et fait 32 morts. Dans les jours qui ont suivi, la menace de nouvelles éruptions a entraîné le déplacement de milliers de personnes.
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Si la plupart des habitants ont depuis regagné leur domicile, certains sinistrés ont tout perdu. Entre 900 et 2 500 habitations ont été détruites par la lave, selon les estimations de la Croix-Rouge. Ce nombre pourrait aller jusqu’à 4 000, selon les Nations unies qui citaient en juin les autorités de Goma.
“Des familles vivent dans des abris bricolés qui laissent passer l’eau”
À Goma, les familles qui n’ont plus de toit sont nombreuses à vivre dans des abris de fortune, notamment dans le plus grand campement, à Kayembe, dans le nord de la ville.
Notre Observateur Jack Sinzahera, membre du collectif pro-démocratie AMKA CONGO, s’est rendu sur place jeudi 9 septembre. Pour lui, la situation est “catastrophique” :
Il y a presque 6 000 familles dans le camp de Kayembe. Quand je suis arrivé sur place, 200 personnes venaient de s’ajouter : elles se trouvaient auparavant dans la ville de Saké ou à Mugunga [en périphérie de Goma, NDLR].
Certaines familles dorment dans un grand abri, parfois en plein milieu de l’allée. J’ai vu une famille avec neuf enfants qui occupe un tout petit espace d’à peine un mètre sur deux avec seulement un matelas.
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D’autres familles vivent dans des abris bricolés qui laissent passer l’eau. Il y a un problème de pénurie d’eau potable et de nourriture ainsi que des soupçons de choléra : les sinistrés sont sans assistance, c’est insalubre.
Il y a même des familles qui se sont abritées dans des salles de classe. J’ai rencontré le directeur de l’école de Kayembe qui est inquiet car la rentrée des classes est le 4 octobre.
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“Il est difficile de savoir qui sont véritablement les sinistrés”
Dans le nord de Goma, d’autres campements de sinistrés se sont formés, comme à Bujari et à Mujoga où la Fondation Denise Nyakeru Tshisekedi (FDNT) a distribué des vivres en août.
Des familles ont également été hébergées temporairement chez des proches à Goma avant de finalement rejoindre les campements. Selon Jack Sinzahera, cette situation complique le recensement des sinistrés à Kayembe :
Le chef du campement de déplacés de Kayembe, qui est lui-même un sinistré, me dit que des familles continuent d’arriver car elles se trouvaient jusqu’alors chez des proches, à Goma par exemple. Cela rend très difficile de savoir qui sont véritablement les sinistrés. Je lui ai demandé quelle méthode il avait pour identifier tous ces déplacés : il m’a dit qu’il a appelé les chefs des villages [sinistrés] pour qu’ils reconnaissent leur population.
Dans le campement, les déplacés réclament que le gouvernement les délocalise dans le site qu’il dit avoir construit pour eux. Mais même ces abris ne pourront pas contenir toutes les personnes qui se trouvent dans le campement de Kayembe.
Des abris provisoire sont “prêts”
Pour faire face à la situation humanitaire, le gouvernement congolais a financé la construction de près de 1 000 abris provisoires dans la localité de Kanyaruchinya. Ces tentes, situées sur un terrain accordé provisoirement par une paroisse catholique, ont été installées entre juillet et août par le génie militaire.
Mais en août, des vents violents ont endommagé une partie des abris, qui ont dû être reconstruits.
Contacté par la rédaction des Observateurs de France 24, le général Jules Kuzangana, commandant adjoint du corps de génie des Forces armées de la RD Congo (FARDC) et responsable de la construction de ces hébergements, assure que les réparations ont désormais été effectuées.
“Nous avons 970 abris prêts […]. Les latrines et les douches sont prêtes aussi”, dit-il, reconnaissant toutefois que le recensement nécessaire à l’installation des familles pourra être difficile : “Il y a des cafouillages, il y a des personnes qui se disent sinistrées, pour profiter de l’eau et de la nourriture, et qui ne le sont pas”.
La rédaction des Observateurs de France 24 a interrogé le gouvernement militaire provincial du Nord-Kivu et le gouvernement national pour connaître la date du transfert des sinistrés vers ces nouveaux abris. Nous publierons leur réponse si elle nous parvient.
Pour les sinistrés, le chemin avant un retour à une vie normale pourrait être encore long. Une fois installées à Kanyaruchinya, les familles ne sont censées y rester que temporairement. “Après six mois, des maisons en dur seront construites. […] Le site est déjà trouvé, nous devons y faire des études topographiques puisque c’est un nouveau lotissement qu’il faudra réaliser”, explique le général Jules Kuzangana.
Selon Jack Sinzahera, à terme, les sinistrés voudraient regagner leurs parcelles dans les zones ravagées par l’éruption. “Ce ne sera pas pour tout de suite”, précise le général. D’après lui, les maisons définitives devraient être construites sur un nouveau site et non dans les quartiers détruits par la lave.