Simone Biles et trois autres gymnastes victimes de violences sexuelles perpétrés par l’ancien médecin Larry Nassar ont témoigné, mercredi, devant une commission au Sénat. Toutes ont fustigé l’inaction de la fédération américaine de gymnastique et dénoncé la lenteur de l’enquête du FBI.
“Je m’appelle Simone Biles, et je suis une survivante d’abus sexuels.” Mercredi 15 septembre, les gymnastes américaines Simone Biles, McKayla Maroney, Maggie Nichols et Aly Raisman ont violemment dénoncé l’inaction de la police fédérale et de la fédération américaine de gymnastique face aux abus sexuels commis par l’ex-médecin de l’équipe féminine des États-Unis, Larry Nassar, sur de jeunes athlètes pendant deux décennies.
“On nous a laissé tomber et on nous doit des explications”, a déclaré, la voix brisée par l’émotion, Simone Biles, 24 ans, devant une commission du Sénat chargée de se pencher sur les “manquements au devoir” du FBI dans la conduite de l’enquête.
“My name is Simone Biles (…) and I am also a survivor of sexual abuse”. L’émotion de Biles devant le Congrès, avec ses larmes quand elle doit prononcer le nom du pédocriminel Larry Nassar. Elle accuse USA Gymnastics d’avoir fermé les yeux et protégé Nassar. #SimoneBiles pic.twitter.com/YQ8lkOdbv6
— Philippe Berry (@ptiberry) September 15, 2021
Larry Nassar, 58 ans, purge une peine de prison à vie après avoir été lourdement condamné en 2017 et 2018 pour des agressions sexuelles sur plus de 250 gymnastes, la plupart mineures, commises au sein de la fédération de gymnastique, à l’université d’État du Michigan et dans un club de gymnastique.
Un rapport de l’inspection générale du ministère de la Justice, un organisme indépendant, s’est montré très sévère envers le bureau local du FBI à Indianapolis, où le patron de la fédération de gymnastique avait le premier rapporté les accusations contre l’ostéopathe en juillet 2015. Les agents “ont fait des erreurs nombreuses et fondamentales en [enquêtant sur ces accusations] et ont violé plusieurs règles du FBI”, selon le rapport.
L’enquête avait été rapidement abandonnée et il avait fallu un autre signalement, en mai 2016, pour que le FBI en lance une nouvelle.
Le plus grand scandale de l’histoire sportive américaine avait éclaté au grand jour en septembre 2016 à la suite d’un article du quotidien Indianapolis Star.
“Je rends responsable un système entier”
“Je rends responsable Larry Nassar et je rends responsable un système entier qui a permis et perpétré ces abus, la Fédération américaine de gymnastique et le Comité olympique américain”, a dit Simone Biles, immense championne multi-médaillée d’or.
McKayla Maroney, elle, a concentré sa colère sur l’agent du bureau local du FBI qui avait recueilli son témoignage, contenant des détails très précis sur les agressions, et qui avait réagi par “le silence et le mépris”. “Non seulement le FBI n’a pas fait d’enquête, mais quand [les agents fédéraux] ont finalement fait un rapport dix-sept mois plus tard, ils ont fait de fausses déclarations sur ce que j’avais dit”, a accusé l’ancienne gymnaste de 25 ans, qui avait été agressée dès ses 13 ans.
En falsifiant son témoignage, “ces agents du FBI ont commis un crime”, a-t-elle souligné, dénonçant l’absence de sanctions prises par le ministère de la Justice qui a choisi de ne pas poursuivre ces policiers. Le ministère a refusé de témoigner devant la commission.
Aly Raisman, victime de Larry Nassar à partir de 2010, l’avait dénoncé en 2015 à la Fédération. Pourtant, “le FBI a mis quatorze mois pour me contacter, malgré mes nombreuses demandes de témoigner”, a déclaré la jeune fille de 27 ans. Elle a fustigé le silence des instances sportives après le départ du médecin de la sélection en septembre 2015. Il avait continué à travailler à l’université et au club de gymnastique, faisant une centaine de victimes supplémentaires. “C’était comme servir des enfants innocents à un pédophile sur un plateau d’argent”, a-t-elle lancé.
Excuses du FBI
Maggie Nichols, 24 ans, et première à avoir signalé les violences sexuelles, a également dénoncé la Fédération qui l’aurait sanctionnée pour s’être exprimée. “Mon rêve olympique s’est évanoui à l’été 2015 quand mon entraîneur et moi avons dénoncé les agressions de Larry Nassar”, a-t-elle affirmé.
Le directeur du FBI, Christopher Wray, a présenté ses excuses aux victimes de Larry Nassar, admettant que “les erreurs fondamentales faites en 2015 et 2016 n’auraient jamais dû l’être”. L’agent ayant supervisé l’enquête a été licencié, a-t-il ajouté, exprimant sa “frustration” que l’agent chargé de l’enquête n’ait pas été sanctionné, ayant pris sa retraite avant les conclusions de l’inspection générale.
Cet agent avait sollicité la Fédération pour obtenir un poste de chef de la sécurité, qu’il n’a finalement pas obtenu. Christopher Wray a également souligné que différentes réformes recommandées par le rapport de l’inspection générale avaient été engagées au sein du FBI, notamment une meilleure formation des agents sur les violences sexuelles.
Avec AFP