Adnan Abou Walid al-Sahraoui, le chef du groupe jihadiste État islamique au Grand Sahara qui a notamment perpétré des attaques particulièrement meurtrières au Mali, au Niger et au Burkina Faso, a été “neutralisé” au cours du mois d’août. Portrait de celui qui avait été désigné par la France comme “l’ennemi prioritaire” au Sahel.
Les forces françaises ont tué Adnan Abou Walid al-Sahraoui, une figure historique du jihad dans le Sahel, dont l’élimination a été qualifiée de “succès majeur” pour la France par le président Emmanuel Macron.
Florence Parly, ministre des Armées, a précisé, jeudi 16 septembre lors d’une conférence de presse, qu’Adnan Abou Walid al-Sahraoui est mort après avoir “succombé à des blessures provoquées par une frappe de la force Barkhane en août 2021”.
Désigné comme “ennemi prioritaire” au Sahel, lors du sommet de Pau en janvier 2020, il était le chef de la branche de l’organisation État islamique au Sahel (EIGS), après avoir prêté allégeance au groupe terroriste État islamique (EI) en 2015. Sa mort “intervient après plus de 18 mois d’efforts constants contre cette organisation qui est l’émanation de Daech au Sahel”, a confié Florence Parly.
“Un vétéran du jihad”
Adnan Abou Walid al-Sahraoui, dont le nom figure au programme Rewards for Justice du département d’État américain, était considéré comme le commanditaire de la plupart des attaques régulières et sanglantes visant militaires mais aussi civils dans la zone des trois frontières, à cheval sur le Mali, le Niger et le Burkina Faso. “Nous estimons que l’EIGS est responsable de la mort de 2 000 à 3 000 civils”, a indiqué la ministre des Armées.
Identifié au Maroc comme Lahbib Abdi Said, ce ressortissant marocain serait né dans les années 1970 au Sahara occidental. Il a d’ailleurs un temps milité au sein du Front Polisario, le mouvement indépendantiste sahraoui. “Adnan Abou Walid al-Sahraoui, qui a un profil militaire, est un vétéran du jihad”, explique Wassim Nasr, spécialiste des mouvements jihadistes à France 24. “Très discret, il avait une grande expérience de la guérilla et de la clandestinité qui lui permettait de jouir d’une certaine aura et d’un ascendant sur ses hommes.”
Et d’ajouter : “Après un passage au Front Polisario, il avait rejoint très vite les rangs des jihadistes dans le Sahel, d’abord en ralliant le Mujao, qui faisait partie d’une alliance avec Al-Qaïda au Maghreb islamique, avant de rallier Al-Mourabitoun alors dirigés par le célèbre Mokhtar Belmokhtar, puis d’en devenir le porte-parole.”
“Émir autoritaire et autocrate”
Cet “émir autoritaire et autocrate”, selon les termes de Florence Parly, décide de faire cavalier seul à partir de 2015. “Il décide au cours du mois d’octobre de cette année-là, en profitant de sa qualité de porte-parole, de faire allégeance, au nom d’Al-Mourabitoun, à l’EI”, indique Wassim Nasr. “Une défiance à l’égard de Mokhtar Belmokhtar, qui est alors obligé de démentir lui-même cette allégeance.”
En octobre 2016, soit un plus tard, l’EI reconnaît publiquement l’allégeance d’Adnan Abou Walid al-Sahraoui, qui devient de facto le chef de son propre groupe jihadiste. “Il a fallu ensuite attendre 2019 pour que l’EI, qui se méfiait de lui en raison de ses liens passés avec Al-Qaïda, commence à revendiquer des opérations commises par son groupe, alors que son fait d’armes le plus parlant à cette époque remontait à octobre 2017, avec l’attaque au cours de laquelle quatre soldats américains des Forces spéciales et quatre Nigériens avaient été tués dans une embuscade à Tongo Tongo, dans le sud-ouest du Niger“.
Fin 2019, l’EIGS avait mené une série d’attaques d’ampleur contre des bases militaires au Mali et au Niger, faisant des dizaines de morts dans les rangs des armées locales.
Et le 9 août 2020, au Niger, le chef de l’EIGS avait personnellement, selon Florence Parly, ordonné l’assassinat de six travailleurs humanitaires français et de leurs guide et chauffeur nigériens. Cette attaque contre des jeunes engagés dans l’humanitaire avait suscité une vive émotion en France et au Niger.
Sa “neutralisation”, selon les propres termes de l’état-major français, est un coup dur porté à l’EIGS et à l’EI, qui est monté en puissance dans la région grâce à Adnan Abou Walid al-Sahraoui, estime Wassim Nasr. “Cette élimination, opérée par une frappe de drone, s’inscrit dans une série de captures et de liquidations de plusieurs cadres de l’EIGS par l’armée française et ses alliés au cours de ces derniers mois.”