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Éthiopie : “Le risque de déstabilisation régionale est bien réel”

Près d’un an après le début de l’opération militaire en Éthiopie contre le gouvernement rebelle du Tigré, dans le nord du pays, le conflit s’est élargi aux régions voisines et suscite l’inquiétude d’une contagion à toute la Corne de l’Afrique.  

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Une opération de “maintien de l’ordre” qui menace désormais toute la région. La Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, s’est inquiétée, lundi 13 septembre, du risque que le conflit en Éthiopie, opposant l’armée centrale aux forces de la région rebelle du Tigré, ne s’étende à toute la Corne de l’Afrique.

Lancée le 4 novembre 2020, l’offensive de l’armée éthiopienne contre la province du nord du pays, censée restaurer l’ordre dans ce territoire dissident, a tourné à la guerre et s’est durablement enlisée. Alors que les forces du pouvoir central étaient parvenues à prendre la capitale de la région Mekele en à peine quelques semaines, les troupes tigréennes ont lancé une opération éclair au mois de juin et repris le contrôle de leur fief.

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Les combats se sont depuis élargis aux régions voisines, Amhara au sud-ouest et Afar à l’est, alors que la région rebelle demeure largement coupée du monde, sans télécommunications ni accès terrestre, à l’exception d’une route, à l’est, soumise aux contrôles draconiens de l’armée.

>> Voir aussi : Éthiopie, la souffrance des civils du Tigré

“L’offensive des forces de défense du Tigré (TDF) avait pour but premier de lever le blocus total imposé par le gouvernement central sur la région” analyse René Lefort, chercheur expert de la Corne de l’Afrique. “Ils avaient deux objectifs principaux : couper le corridor vers Djibouti à l’est, qui représente 95 % du commerce extérieur éthiopien, et chercher un accès vers le Soudan, à l’ouest, à travers les zones contrôlées par les Amharas. Malgré une percée rapide qui a totalement bousculée les forces fédérales, il semblerait que celles-ci aient aujourd’hui réussi à stabiliser la situation et que l’offensive des Tigréens ait échoué à ce stade”.  

Si les Tigréens ne sont jusqu’ici pas parvenus à vaincre le blocus, les affrontements continuent avec l’armée centrale et les troupes des régions voisines autour du Tigré, notamment en Amhara, alliée au gouvernement central.

“La région reste extrêmement militarisée et nous avons entendu au loin à plusieurs reprises des tirs d’artillerie lourde notamment en direction de la ville de Dessie, au sud-est du Tigré”, explique la correspondante de France 24 en Éthiopie Maria Gerth Niculescu, de retour de mission dans le centre de la province.  

Risque de “métastases” 

Dans ce contexte, Michelle Bachelet a déclaré craindre un élargissement du conflit à toute la Corne de l’Afrique, pointant du doigt “des rapports multiples et graves de violations flagrantes présumées des droits humains, du droit humanitaire et du droit des réfugiés par toutes les parties”.

Depuis des mois, les organisations humanitaires alertent sur la multiplication des exactions à caractère ethnique par les différents groupes impliqués dans le conflit, dont des exécutions sommaires, des campagnes de viols ou bien encore des actes de torture.

Selon le Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU (HCR), le Tigré compterait désormais 2,1 millions de déplacés internes du fait des violences. Un chiffre également en hausse dans les régions Amhara (250 000) ainsi que Afar (112 000), alors que 48 000 Éthiopiens ont fui au Soudan voisin depuis le début du conflit. 

“Avec cette guerre qui génère de graves troubles dans le pays, le risque de déstabilisation régional est bien réel”, estime René Lefort. “L’Éthiopie était jusqu’ici un pilier de stabilité dans une région minée par de nombreux conflits liés aux territoires mais aussi à des intérêts économiques. Si le conflit perdure et s’intensifie, la guerre en Éthiopie risque de mener à des alliances impliquant des groupes locaux armés dans les pays voisins et de métastaser dans toute la Corne de l’Afrique”.  

Lundi, dans son discours à Genève, Michelle Bachelet a exhorté “toutes les parties à mettre immédiatement fin aux hostilités sans conditions préalables et à négocier un cessez-le-feu durable”. Un appel qui semble bien éloigné des préoccupations actuelles du Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed.

En visite auprès de ses troupes dans le nord du pays, samedi 11 septembre, le prix Nobel de la paix devenu chef de guerre a déclaré : “Nous construisons une force de défense ultra moderne, quelque chose qui n’a jamais été vu au cours des 100 dernières années dans notre pays, vous verrez bientôt de quoi nous parlons. Ces rebelles sont notre terrain d’entraînement, notre entraînement se fait en leur présence”. 

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