L’imposante statue du général Robert Lee qui se dressait à Richmond, en Virginie, a été déboulonnée mercredi. Ancien commandant des État confédérés, il représentait aux yeux de nombreux Américains le passé esclavagiste des États-Unis, et plus particulièrement des États du Sud.
Après plusieurs années de tensions sur le passé esclavagiste des États-Unis, le plus important monument dénoncé comme un symbole raciste de cette période a été déboulonné, mercredi 8 septembre, en Virginie : la gigantesque statue du général Lee, l’ancien commandant des sudistes.
Ayant trôné plus de 130 ans sur son piédestal haut de 12 mètres, la statue équestre a été descendue en douceur par une grue à Richmond, l’ex-capitale des sécessionnistes pendant la guerre civile qui a déchiré le pays de 1861 à 1865.
Des centaines de personnes s’étaient massées à distance pour assister à l’événement. Certaines ont brandi le poing, lâché des quolibets ou des vivats quand l’imposante pièce de bronze, œuvre de l’artiste français Antonin Mercié, a été arrachée à son socle.
Principal dirigeant militaire des confédérés, Robert Lee a lutté avec les États du Sud contre ceux du Nord qui avaient aboli l’esclavage.
Ce retrait “efface une tache sur l’histoire de la Virginie et l’histoire de l’Amérique”, confiait Muhammad Abdul-Rahman, un responsable associatif local.
Tandis que de nombreux monuments confédérés aux quatre coins du pays ont été récemment démontés en catimini – parfois au milieu de la nuit – sous la pression du mouvement Black Lives Matter, le gouverneur démocrate de Virginie, Ralph Northam, a lui souhaité donner un retentissement national à ce déboulonnage.
Une posture dominatrice
Les monuments célébrant Robert Lee et les autres grandes figures des États sudistes sont aujourd’hui considérés comme des symboles racistes par une bonne partie des Américains, d’autres considérant au contraire qu’ils font partie de leur patrimoine historique. La question reste sensible.
Le gouverneur Northam avait annoncé son intention d’enlever la statue du général confédéré en juin 2020, dix jours après la mort à Minneapolis de George Floyd, asphyxié sous le genou d’un policier blanc.
L’homicide de cet Afro-Américain avait suscité un mouvement planétaire de dénonciation des discriminations raciales et relancé avec vigueur le débat sur le passé esclavagiste du pays.
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Une guérilla judiciaire lancée par des partisans du maintien sur place de la statue confédérée – la plus grande du pays – a retardé le démontage, finalement validé la semaine dernière par une décision de la cour suprême de Virginie.
Chevauchant fièrement son pur-sang, rênes en main, Robert Lee a une posture volontairement dominatrice. La statue, qui pèse 12 tonnes, culminait à la hauteur d’un immeuble de six étages.
“À qui est cette rue ? À nous !”, ont scandé mercredi les témoins rassemblés sur Monument Avenue, ce boulevard de Richmond jalonné jusqu’à 2020 d’autres statues à la gloire des perdants de la guerre de Sécession.
Richmond “n’est plus la capitale de la Confédération”
Ce quartier normalement paisible est de fait devenu un épicentre de tension et de contestation, comme en témoigne le socle de la statue, maculé de graffitis et de slogans appelant notamment les policiers à “rendre des comptes”.
Étant donné la sensibilité du monument, les autorités avaient pris des mesures de sécurité draconiennes, interdisant temporairement la circulation autour du périmètre, les survols par drone étant également prohibés mercredi.
Richmond “n’est plus la capitale de la Confédération”, s’est félicité Levar Stoney, le maire afro-américain de cette ville située au sud de Washington.
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Dans ce même État de Virginie, une autre statue équestre controversée du général Lee, à Charlottesville, avait déclenché des violences à l’été 2017, un extrémiste blanc allant jusqu’à percuter en voiture une foule de manifestants antiracistes, tuant une jeune femme.
À l’époque, le président républicain Donald Trump avait estimé que déboulonner les statues des officiers sudistes revenait à “mettre en pièces” l’histoire des États-Unis.
Ermias Woldemariam, un habitant de Virginie présent à l’enlèvement de la statue, ne partageait pas cet avis : “Si des gens veulent la voir, elle devrait être mise au musée. En tout cas, pas ici, à la vue de la population jour après jour.”
Avec AFP