Alexanda Kotey, ancien membre de l’État islamique, a accepté de plaider coupable devant le tribunal d’Alexandria, en Virginie, pour complicité dans les enlèvements et les meurtres d’otages occidentaux. Il fournira toutes les informations en sa possession sur ses actes en Syrie.
L’un des membres de la bande de ravisseurs du groupe État islamique (EI) baptisée les “Beatles” a plaidé coupable, jeudi 2 septembre, pour complicité dans les enlèvements et les meurtres d’otages occidentaux, dont quatre Américains, devant un tribunal fédéral aux États-Unis.
Alexanda Kotey, ancien ressortissant britannique âgé de 37 ans, plaidait jusqu’ici non-coupable devant le tribunal d’Alexandria, près de Washington, aux côtés d’El Shafee el-Sheikh, 33 ans, un autre des quatre membres du groupe de kidnappeurs de l’EI.
Ils sont notamment accusés d’être impliqués dans les meurtres des journalistes américains James Foley et Steven Sotloff, tués en 2014, et celui des travailleurs humanitaires Peter Kassig et Kayla Mueller.
Le juge TS Ellis, qui présidait l’audience, prononcera le verdict le 4 mars 2022. L’accusé encourt plusieurs peines de prison à vie sans droit à une libération anticipée.
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En plaidant coupable, “il est d’accord pour passer le reste de sa vie en prison”, a commenté le représentant du parquet, devant le tribunal.
Alexanda Kotey a passé un accord avec le gouvernement pour fournir toutes les informations en sa possession sur ses actes en Syrie, ainsi qu’à tous les gouvernements étrangers qui le demanderaient.
L’accord prévoit également qu’il sera extradé au Royaume-Uni après quinze ans de réclusion, où il est aussi poursuivi pour enlèvement et meurtres d’otages.
Appel de la mère de James Foley
L’ancien vendeur d’articles de sport né à Londres où il s’est radicalisé s’est exprimé en anglais. Il a expliqué dans une déclaration qu’il avait rejoint la Syrie pour se battre contre le régime du président Bachar al-Assad en estimant que “le concept islamique du jihad armé était d’une grande valeur et une cause légitime”. Il avait ensuite intégré l’unité de l’EI chargé de l’enlèvement et de la détention d’otages non musulmans.
“Vous avez participé à une machination pour capturer des otages et demander des rançons, tout en sachant que ces enlèvements entraîneraient, et ont entraîné la mort [des otages]”, a déclaré le juge Ellis, semblant peu sensible à ses arguments.
Les familles des quatre victimes américaines étaient présentes dans la salle d’audience. Le représentant de l’accusation, Dennis Fitzpatrick, a indiqué qu’elles approuvaient l’accord passé entre l’accusé et les autorités.
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La mère de James Foley, journaliste dont la décapitation filmée avait marqué les esprits, a lancé, devant le tribunal, un appel au président Joe Biden et à “tous les Américains” pour que les États-Unis “protègent et aident tous les otages américains dans le monde”.
“Le fait qu’il plaide coupable ne va pas résorber la souffrance des victimes de sa cruauté, mais j’espère que cela rappellera au monde l’engagement ferme du FBI à retrouver tous ceux qui ont infligé des souffrances à des citoyens américains, où qu’ils soient”, a commenté un agent du FBI, cité dans un document judiciaire.
Alexanda Kotey et El Shafee el-Sheikh avaient été capturés en janvier 2018 par les forces syriennes kurdes, puis remis à l’armée américaine en Irak. Ils ont été extradés aux États-Unis depuis l’Irak en octobre 2020 pour comparaître devant la justice américaine.
Londres, qui ne voulait au départ pas les juger sur son territoire, les a déchus de leur nationalité britannique.
“Violences physiques et psychologiques prolongées contre les otages”
Leur extradition aux États-Unis n’a été rendue possible qu’après que les autorités américaines eurent assuré à Londres qu’elles ne requerraient pas de condamnation à mort dans cette affaire.
Alexanda Kotey et El Shafee el-Sheikh appartenaient à la cellule surnommée les “Beatles” par leurs otages, en raison de leur accent britannique. Les deux hommes ont grandi au Royaume-Uni, où ils se sont radicalisés, avant de rallier l’EI en Syrie en 2012.
Ils sont accusés de l’enlèvement d’otages américains, européens, japonais et syriens de 2012 à 2015, et d’avoir torturé et tué leurs victimes, notamment par décapitation. Les vidéos des assassinats, diffusées par l’EI à des fins de propagande, avaient choqué le monde entier.
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Les deux hommes auraient notamment supervisé les lieux de détention des otages et coordonné les négociations de rançon par e-mail. Ils ont fait acte de “violences physiques et psychologiques prolongées contre les otages”, selon le représentant de l’accusation.
Le chef présumé de la cellule, Mohammed Emwazi, surnommé “Jihadi John”, a été tué dans une frappe aérienne américaine en Syrie en novembre 2015, tandis que le quatrième “Beatle”, Aine Davis, est détenu en Turquie après avoir été reconnu coupable de terrorisme en 2017.
L’opération de l’armée américaine au cours de laquelle le chef de l’EI, Abou Bakr al-Baghdadi, avait été tué en octobre 2019, était baptisée “Task Force 8-14” en référence à la date d’anniversaire de Kayla Mueller. La jeune humanitaire avait été enlevée à Alep, dans le nord de la Syrie, en août 2013. Selon ses parents, elle a d’abord été torturée par ses geôliers, puis remise fin 2014 à Baghdadi, qui l’aurait violée à de nombreuses reprises avant de la tuer.
Avec AFP