Le département américain de la Défense a annoncé lundi que le tarmac de l’aéroport de Kaboul avait été rouvert, quelques heures après la suspension des vols en partance ou à destination de la capitale afghane due au chaos après la prise du pouvoir par les Taliban.
Après la panique, la reprise. Le trafic de vols civils et militaires a repris à l’aéroport de Kaboul, a annoncé lundi le général américain Hank Taylor depuis le Pentagone. La situation à l’aéroport, dont les pistes ont été envahies par des milliers de personnes tentant désespérément de fuir l’Afghanistan tombé aux mains des Taliban, avait empiré au point que tous les vols avaient dû être suspendus plusieurs heures lundi après-midi.
Un représentant du Pentagone a déclaré à des journalistes à Washington qu’un appareil C-17 de l’armée américaine avait atterri à Kaboul et qu’un autre y était attendu plus tard dans la journée.
Le fulgurant triomphe final des insurgés dimanche a déclenché des scènes de panique monstre à l’aéroport de la capitale afghane. Une marée humaine s’est précipitée vers ce qui est la seule porte de sortie de l’Afghanistan, pour tenter d’échapper au nouveau régime que le mouvement islamiste, de retour au pouvoir après 20 ans de guerre, promet de mettre en place.
De l’autre côté de l’Atlantique, le président Joe Biden a défendu lundi coûte que coûte le retrait américain d’Afghanistan, malgré la prise de contrôle des Taliban et les scènes de désespoir à l’aéroport de Kaboul.
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“Après 20 ans, j’ai appris à contrecœur qu’il n’y avait jamais de bon moment pour retirer les forces américaines”, a affirmé Joe Biden lors d’une adresse à la nation, très attendue en raison du mutisme présidentiel durant ce week-end historique qui a vu le président Ashraf Ghani fuir l’Afghanistan.
“La vérité est que tout cela s’est déroulé plus rapidement que nous l’avions prévu”, a toutefois concédé le démocrate.
Face au chaos régnant à l’aéroport de Kaboul, le locataire de la Maison Blanche a par ailleurs menacé les Taliban d’une réponse militaire “rapide et puissante” si ces derniers venaient à perturber les opérations d’évacuation en cours.
Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux ont montré plus tôt des scènes de totale anarchie, comme ces centaines de personnes courant près d’un avion de transport militaire américain qui roule pour aller se mettre en position de décollage, pendant que certaines tentent follement de s’accrocher à ses flancs ou à ses roues.
D’autres font apparaître des milliers de personnes attendant sur le tarmac même et des grappes de jeunes hommes, surtout, s’accrochant aux passerelles pour tenter de monter dans un avion. D’autres vidéos montrent ce qui semble être des corps tombant d’un avion militaire américain ayant pris son envol.
Après avoir tiré en l’air dimanche, les forces américaines ont ouvert le feu lundi, tuant deux hommes “qui ont brandi leurs armes d’un air menaçant”, a déclaré un responsable du Pentagone.
“Nous avons peur de vivre dans cette ville et nous tentons de fuir Kaboul”, a témoigné, de l’aéroport, à l’AFP Ahmad Sekib, 25 ans, un homme utilisant un faux nom.
Les compagnies internationales ont suspendu le survol de l’Afghanistan pour laisser l’espace aérien aux militaires chargés des évacuations.
Un cliché, dont le Pentagone n’a pas démenti la véracité, montrait 640 Afghans entassés dans un avion-cargo C-17 de l’US Air Force.
Les rues de Kaboul sont à l’opposé restées relativement calmes lundi, des Taliban en armes y patrouillant abondamment et y installant des postes de contrôle.
Sur les comptes Twitter qui leur sont favorables, les Taliban se vantaient d’avoir été chaleureusement accueillis à Kaboul ou encore du fait que des jeunes filles retournaient dès lundi à l’école, comme à l’accoutumée.
Débâcle totale pour les forces afghanes
Ils ont aussi assuré que des milliers de combattants convergeaient vers la capitale pour en assurer la sécurité.
Le désormais ex-président Ashraf Ghani a reconnu dimanche soir que les Taliban avaient “gagné”.
Dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur de ce mouvement islamiste, a appelé ses troupes à la discipline.
Le Conseil de sécurité des Nations unies a lui mis en garde les Taliban contre toute volonté de faire du pays une base pour de futures attaques terroristes. Il a demandé aux nouveaux maîtres de l’Afghanistan de mettre en place un nouveau gouvernement représentatif incluant notamment une “participation pleine, entière et significative des femmes”.
La débâcle est totale pour les forces de sécurité afghanes, financées pendant vingt ans à coups de centaines de milliards de dollars par les États-Unis.
En dix jours, le mouvement islamiste radical, qui avait déclenché une offensive en mai à la faveur du début du retrait des troupes étrangères, a pris le contrôle de quasiment toute l’Afghanistan.
Et cen 20 ans après en avoir été chassé par une coalition menée par les États-Unis en raison de son refus de livrer le chef d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden, dans la foulée des attentats du 11 septembre 2001.
Les États-Unis ont affirmé lundi qu’ils ne reconnaîtraient un gouvernement mené par les Taliban en Afghanistan qu’à condition que ces derniers respectent les droits des femmes et rejettent les terroristes.
Notre position “dépendra du comportement des Taliban”, a résumé le porte-parole du département d’État, Ned Price.
La Chine avait été le premier pays à dire lundi vouloir entretenir des “relations amicales” avec les Taliban.
Le ministère russe des Affaires étrangères a estimé que “la situation en Afghanistan et en particulier à Kaboul se stabilisait. Les Taliban procèdent au rétablissement de l’ordre public”.
A contrario, le ministre britannique de la Défense, Ben Wallace, a jugé que ce n’était “pas le moment” de reconnaître le régime taliban. Le Premier ministre Boris Johnson a appelé à organiser une rencontre virtuelle des dirigeants du G7 “dans les prochains” jours.
“Initiative” européenne pour “protéger contre les flux migratoires importants”
Le président français Emmanuel Macron a pour sa part déclaré dans la soirée que l’Afghanistan ne devait “pas redevenir le sanctuaire du terrorisme qu’il a été” et appelé à “une réponse (internationale) responsable et unie”.
Lors d’une allocution télévisée consacrée à la situation en Afghanistan, tombé aux mains des Taliban, le chef de l’État français a dit lundi vouloir porter une initiative européenne visant à “anticiper” et “protéger contre des flux migratoires irréguliers importants” qui “nourrissent les trafics de toute nature”, alors que de nombreux Afghans tentent l’aventure de l’émigration clandestine et que la prise du pouvoir par les Taliban risque d’accentuer le mouvement.
“Nous porterons donc, en lien avec la République fédérale d’Allemagne et d’autres Européens, une initiative pour construire sans attendre une réponse robuste, coordonnée et unie”, a poursuivi le président français, en appelant à “la solidarité dans l’effort, l’harmonisation des critères de protection et la mise en place de coopérations avec les pays de transit”.
De son côté, Washington a envoyé 6 000 militaires pour sécuriser l’aéroport et faire partir quelque 30 000 Américains et civils afghans ayant coopéré avec les États-Unis qui craignent les représailles des Taliban.
De nombreux autres diplomates et ressortissants étrangers ont également été évacués à la hâte de Kaboul dimanche.
Avec AFP & Reuters