L’équipe masculine de basket du Nigeria débute ses Jeux olympiques dimanche face à l’Australie. Après avoir créé la sensation en battant les États-Unis en match de préparation, les D’Tigers affichent de belles ambitions à Tokyo.
Le Nigeria est surtout connu pour être un pays de football. En 1996 à Atlanta, la sélection était entrée dans l’histoire en devant la première nation africaine à remporter l’or olympique. Vingt-cinq ans plus tard, à Tokyo, c’est sur les parquets de basket que le pays compte réaliser de nouvelles prouesses.
Les “D’Tigers” font en effet partie des outsiders du tournoi olympique. Ils se sont fait remarquer ces dernières semaines en battant respectivement en match de préparation les stars américaines, le 10 juillet (90-87) puis la solide équipe d’Argentine, vice-championne du monde en titre, (94-71) trois jours plus tard.
Il s’agissait de la première défaite des États-Unis contre une nation africaine. Une véritable gifle infligée à Kevin Durant et ses coéquipiers. La chaîne CBS a même qualifié la performance américaine de “l’une des plus grandes défaites de l’histoire (sportive, NDLR) internationale”.
Les médias nigérians ont en revanche célébré cet exploit. “Le Nigeria stupéfie les États-Unis”, a titré le quotidien indépendant The Guardian, quand The Daily trust a insisté sur le fait que “le Nigeria fait l’histoire”. “Cette performance qui remonte le moral à la veille des Jeux olympiques de Tokyo 2020 (…) indique que l’équipe du Nigeria montera sur le podium lors de ces Jeux”, s’est aussi enthousiasmé le ministre nigérian des Sports, Sunday Dare.
Une équipe aux accents américains
En 2012, le rapport de force était tout autre. Les États-Unis, emmenés par Kobe Bryant, avaient atomisé le Nigeria de 83 points (156-73) lors des JO de Londres. Ils s’étaient encore imposés de 44 points (110-66) lors d’un match amical en 2016.
Comment expliquer cette progression ? L’équipe nigériane actuelle n’a plus grand-chose à avoir avec les précédentes sélections. Aucun des joueurs qui ont pris l’avion pour le Japon ne joue dans son pays d’origine. La majorité des sélectionnés appartiennent à la communauté nigériane des États-Unis et ils sont nombreux à avoir fait leurs gammes dans les universités américaines avant de rejoindre la NBA. Deux tiers des 12 joueurs retenus y évoluent. L’ailier des Milwaukee Bucks Jordan Nwora est devenu cette semaine le second Nigérian à remporter le championnat nord-américain, après le légendaire Hakeem Olajuwon, avec les Houston Rockets.
Auteur de 21 points contre les États-Unis, le meneur Gabe Vincent, né en Californie, figure dans l’effectif du Miami Heat, comme l’ailier fort Precious Achiuwa. Quant au pivot Jahlil Okafor, il a roulé sa bosse des Philadelphia Sixers aux Detroit Pistons en passant par les Nets et les Pélicans de Nouvelle-Orléans. Ce dernier assure que son équipe est partie au Japon avec le plein “de confiance nécessaire” pour “réaliser des performances de haut niveau, comme contre les États-Unis et l’Argentine”. Lui-même a passé quinze points à l’Argentine. La victoire contre les ogres américains, les Nigérians l’ont notamment bâtie sur une grosse performance physique sous le panier, avec 46 rebonds pris (contre 34).
L’équipe peut aussi compter sur l’expérience de son entraîneur l’Américain Mike Brown, 51 ans, l’actuel adjoint de Steve Kerr aux Golden State Warriors. “Nous n’avons encore rien gagné, mais j’ai le sentiment de pouvoir soulever tout un continent”, a-t-il affirmé avant de partir pour le Japon. “Nous n’y allons pas pour l’expérience, nous allons à Tokyo pour gagner”, assure celui qui a dirigé les Los Angeles Lakers et les Cleveland Cavaliers qu’il a même menés en finale NBA.
L’Américain Will Voigt, qui entraînait le Nigeria quand il a remporté son premier championnat d’Afrique en 2015, y croit aussi : “Je ne vois pas pourquoi ils ne pourraient pas poursuivre leur succès”, dit-il. “Ils sont talentueux, confiants et autonomes.”
Investir au pays ?
Mais cette “légion étrangère” suscite aussi quelques critiques au pays. “Ce que l’équipe a fait est une grande avancée pour le basket nigérian au niveau international, mais cela nous tue au niveau local parce que nous n’investissons pas chez nous”, déplore par exemple l’ancien capitaine des “D’Tigers”, Olumide Oyedeji. Il faut laisser une chance aux joueurs basés au Nigeria, les laisser jouer dans l’équipe nationale, plaide-t-il : “Ce n’est pas un crime d’être né au Nigeria, ce n’est pas un crime de jouer au Nigeria, ce n’est pas un crime de résider au Nigeria.”
Jusqu’ici, les Nigérians n’ont jamais fait mieux que 10e aux Jeux, lors des JO de Londres en 2012. Il y a cinq ans au Brésil, les “D’Tigers” n’avaient pas franchi le stade de la phase de groupes. Face à l’Australie dimanche pour leur premier match, ils affichent de meilleures ambitions dans un groupe B qui s’annonce comme très ouvert. Ils affronteront ensuite l’Allemagne (le 28), puis l’Italie (le 31).
Avec AFP