Excédés par la crise économique, des milliers de Cubains ont manifesté dimanche à travers le pays, aux cris de “Liberté !” et “À bas la dictature !”. Le gouvernement, lui, s’est dit prêt à défendre la révolution “coûte que coûte”.
“La révolution cubaine, nous la défendrons coûte que coûte!” C’est par ces mots que le vice-ministre des Affaires étrangères de Cuba, Gerardo Peñalver, a répondu sur Twitter aux manifestations historiques qui se sont déroulées à travers le pays, dimanche 11 juillet. Pris par surprise, le président Miguel Diaz-Canel a donné aux révolutionnaires “l’ordre de combattre”, les appelant à “sortir dans les rues où vont se produire ces provocations, dès maintenant et dans les prochains jours”.
“Cuba n’est pas à vous !”, criait notamment une foule rassemblée face à des bureaux du Parti communiste (PCC), seule formation politique autorisée à Cuba.
“Nous avons faim”, “Liberté”, “À bas la dictature” ont été quelques-uns des autres slogans scandés au cours de cette journée mouvementée, dont le déroulé a poussé le président à se rendre à la mi-journée à San Antonio de los Baños, petite ville où le premier rassemblement a été signalé, puis à apparaître à la télévision d’État.
Des échauffourées ont éclaté, notamment à La Havane où les forces de l’ordre ont utilisé des gaz lacrymogènes, tiré en l’air avec leurs armes et utilisé des tuyaux en plastique pour frapper des manifestants, ont constaté des journalistes de l’AFP.
Plusieurs voitures de la police ont été renversées et endommagées par des Cubains en colère et de nombreuses personnes ont été interpellées.
Un important dispositif policier et militaire a été déployé dans la capitale et plusieurs villes de province.
Au total, selon le site de datajournalisme Inventario, une quarantaine de manifestations, éparpillées sur tout le territoire, ont été recensées. À partir de la mi-journée, l’accès à la 3G a d’ailleurs été coupé dans une grande partie du pays. Il n’a été rétabli qu’en milieu de soirée.
S’il a reconnu “l’insatisfaction” que peuvent ressentir certains Cubains, face aux pénuries d’aliments et de médicaments, combinées aux coupures électriques quotidiennes, Miguel Diaz-Canel a également accusé l’ennemi de toujours, Washington, d’être à la manœuvre.
“Il y a un groupe de personnes, contre-révolutionnaires, mercenaires, payées par le gouvernement américain, de façon indirecte à travers des agences du gouvernement américain, pour organiser ce genre de manifestations”, a-t-il affirmé.
Inquiétude à Washington
Le gouvernement américain a réagi dès dimanche en mettant en garde les autorités cubaines contre tout usage de la violence à l’encontre de “manifestants pacifiques”. “Les États-Unis soutiennent la liberté d’expression et d’assemblée à Cuba, et condamneraient fermement tout acte de violence ou qui viserait à prendre pour cible les manifestants pacifiques qui exercent leurs droits universels”, a affirmé le conseiller américain à la Sécurité nationale, Jake Sullivan, sur Twitter.
Les relations diplomatiques entre Cuba les États-Unis, après une brève réconciliation entre 2014 et 2016, sont au plus bas depuis le mandat de Donald Trump, qui a renforcé l’embargo en vigueur depuis 1962, dénonçant des violations des droits de l’Homme et le soutien de La Havane au gouvernement de Nicolas Maduro au Venezuela.
Ces sanctions, ainsi que l’absence de touristes due à la pandémie, ont plongé Cuba dans une profonde crise économique et généré un fort malaise social, suivi de près à Washington et sur le continent américain.
“Nous reconnaissons la demande légitime de la société cubaine d’avoir des médicaments, des aliments et des libertés fondamentales”, a tweeté de son côté Luis Almagro, secrétaire général de l’Organisation des États américains (OEA).
“Nous condamnons le régime dictatorial cubain pour avoir appelé des civils à réprimer et à la confrontation contre ceux qui exercent leur droit à manifester”, a-t-il ajouté.
“La dictature doit comprendre que nous ne tolèrerons pas l’usage de la force brutale pour taire les aspirations du peuple cubain”, a averti dans un communiqué le sénateur américain Bob Menendez.
Avec AFP