Lundi, le président cubain, Miguel Diaz-Canel, a imputé aux sanctions américaines, les difficultés économiques que rencontre le pays avec notamment des pénuries de médicaments et des pannes régulières d’électricité, à l’origine de manifestations inédites dans le pays depuis des décennies.
Le président cubain, Miguel Diaz-Canel, est sur la défensive. Le chef d’État a accusé le gouvernement américain, lundi 12 juillet, de mener “une politique d’asphyxie économique pour provoquer des troubles sociaux” sur l’île, au lendemain de manifestations historiques, tandis que Joe Biden l’a appelé à “entendre son peuple”.
Dans une allocution retransmise à la télévision et à la radio, le dirigeant communiste, entouré de plusieurs de ses ministres, a assuré que son gouvernement essaie d'”affronter et de vaincre” les difficultés face aux sanctions américaines, renforcées depuis le mandat du président américain Donald Trump (2017-2021).
“Que cherchent-ils ? Provoquer des troubles sociaux, provoquer des incompréhensions” chez les Cubains, mais aussi “le fameux changement de régime”, a dénoncé le président cubain. Ceux derrière ces manifestations “ont obtenu la réponse qu’ils méritaient et ils vont continuer à l’avoir, comme au Venezuela”, grand allié de Cuba, a-t-il ajouté.
De son côté, le président américain, Joe Biden, a appelé dans un communiqué “le régime cubain à entendre son peuple et à répondre à ses besoins”. “Nous nous tenons aux côtés du peuple cubain et de son appel vibrant à la liberté”, a-t-il ajouté.
L’Internet mobile, arrivé fin 2018 à Cuba, qui a permis, dimanche, la diffusion en direct d’une quarantaine de manifestations anti-gouvernementales à travers l’île, était coupé lundi matin.
Les rues de La Havane restaient sillonnées par la police et l’armée, ont constaté des journalistes de l’AFP, mais le calme est revenu après les échauffourées de la veille qui ont conduit à plusieurs dizaines d’arrestations.
La Russie met en garde contre toute “ingérence étrangère”
Excédés par la crise économique qui a aggravé les pénuries d’aliments et de médicaments et poussé le gouvernement à couper l’électricité plusieurs heures par jour, des milliers de Cubains étaient sortis spontanément, dimanche, dans les rues de dizaines de villes et villages du pays, aux cris de “Nous avons faim”, “Liberté” et “À bas la dictature”.
Une mobilisation inédite à Cuba, où les seuls rassemblements autorisés sont généralement ceux du Parti communiste (PCC, unique).
S’il a reconnu “l’insatisfaction” que peuvent ressentir certains Cubains, Miguel Diaz-Canel a aussi donné aux révolutionnaires “l’ordre de combattre” ces rassemblements dans la rue.
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Grand soutien des autorités cubaines depuis l’époque soviétique, la Russie a mis en garde, lundi, contre toute “ingérence étrangère” dans cette crise. “Nous considérons comme inacceptable toute ingérence étrangère dans les affaires intérieures d’un État souverain et toute autre action destructrice qui favoriserait la déstabilisation de la situation sur l’île”, a indiqué dans un communiqué le ministère russe des Affaires étrangères.
“Nous sommes convaincus que les autorités cubaines prennent toutes les mesures nécessaires pour rétablir l’ordre public dans l’intérêt des citoyens du pays”, a ajouté Moscou, disant “suivre de près l’évolution de la situation à Cuba et aux alentours”.
Le président mexicain, Andres Manuel Lopez Obrador, a, quant à lui, rejeté toute approche “interventionniste” de la situation à Cuba et offert d’envoyer de l’aide humanitaire. Le Mexique peut “aider en fournissant des médicaments, des vaccins, tout ce qui est nécessaire, ainsi que de la nourriture, car la santé et la nourriture sont des droits humains fondamentaux” qui ne nécessitent pas “une gestion politique interventionniste”, a déclaré le dirigeant de gauche.
Dimanche soir, le gouvernement américain avait prévenu qu’il “condamnerait fermement tout acte de violence ou qui viserait à prendre pour cible les manifestants pacifiques qui exercent leurs droits universels”, selon un tweet du conseiller américain à la Sécurité nationale, Jake Sullivan.
The U.S. supports freedom of expression and assembly across Cuba, and would strongly condemn any violence or targeting of peaceful protesters who are exercising their universal rights. https://t.co/FjI8bUHoQE
— Jake Sullivan (@JakeSullivan46) July 12, 2021
Forte hausse des cas de coronavirus
“Le conseiller à la Sécurité nationale de la Maison Blanche n’a pas l’autorité politique ni morale pour parler de Cuba”, a réagi, lundi, le chef de la diplomatie cubaine, Bruno Rodriguez, sur Twitter. “Son gouvernement a consacré des centaines de millions de dollars pour la subversion dans notre pays et il impose un blocus génocidaire, principal responsable des carences économiques”, a-t-il ajouté.
El Asesor de Seguridad Nacional de la Casa Blanca carece de autoridad política y moral para hablar sobre #Cuba.
Su gobierno ha destinado cientos de millones de dólares para la subversión en nuestro país e impone un bloqueo genocida, principal responsable de carencias económicas.
— Bruno Rodríguez P (@BrunoRguezP) July 12, 2021
Les relations diplomatiques entre Cuba et les États-Unis, après une brève réconciliation entre 2014 et 2016, sont au plus bas depuis le mandat de Donald Trump qui a renforcé l’embargo en vigueur depuis 1962, dénonçant des violations des droits humains et le soutien de La Havane au gouvernement de Nicolas Maduro au Venezuela.
Ces sanctions, ainsi que l’absence de touristes due à la pandémie, ont plongé Cuba dans une profonde crise économique et généré un fort malaise social, suivi de près à Washington et sur le continent américain.
Les manifestations sont par ailleurs survenues dans un contexte de forte hausse des cas de coronavirus sur l’île, avec chaque jour de nouveaux records de contaminations. Au total, Cuba a recensé officiellement 238 491 cas dont 1 537 décès, pour 11,2 millions d’habitants.
Une situation qui a poussé de nombreux Cubains à utiliser le mot-clé #SOSCuba sur les réseaux sociaux, pour demander qu’une aide humanitaire extérieure soit autorisée par le gouvernement.
Avec AFP