La France et l’Allemagne ont toutes deux cherché à revendiquer le leadership européen au sein de l’OTAN mercredi 20 novembre lors de la première réunion ministérielle depuis que le président français Emmanuel Macron avait averti que l’alliance militaire dirigée par les États-Unis connaissait une «mort cérébrale», écrit Robin Emmott.
La remise en cause publique de l’alliance précède un sommet à Londres célébrant le 70e anniversaire de l’OTAN dans deux semaines. Elle reflète à la fois les frictions transatlantiques plus larges et la marge de manoeuvre laissée par la décision britannique de quitter l’Union européenne (UE).
Au milieu de questions sur la fiabilité du président américain Trump, la colère suscitée par l’incursion de la Turquie en Syrie le mois dernier et les doutes des Américains sur l’engagement de l’Europe à sa propre défense, le ministre allemand des Affaires étrangères, Heiko Maas (photo), a déclaré que l’Europe ne devait pas agir seule.
Au lieu de cela, lors d’une réunion des ministres des Affaires étrangères de l’OTAN, Maas a proposé que le secrétaire général, Jens Stoltenberg, crée une commission d’experts pour débattre de questions stratégiques.
Outre la proposition de Berlin, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a également évoqué l’idée d’un groupe de “sages”, chargé d’examiner l’avenir de l’OTAN, ont indiqué deux diplomates, bien que les détails ne soient pas immédiatement disponibles.
Les deux idées élargiraient le mandat initial de l’OTAN, depuis sa fondation en 1949, consistant à protéger l’Europe et l’Amérique du Nord, de manière à englober de nouveaux domaines tels que la guerre civile en Syrie et le Moyen-Orient, vieux de huit ans.
Dans une interview accordée à The Economist le 7 novembre, Macron a exprimé des doutes sur la maxime de sécurité de l’OTAN selon laquelle une attaque contre un allié est une attaque contre tous. Il a appelé à une plus grande intégration de la défense européenne afin de permettre des réactions plus rapides aux crises proches des frontières de l’Europe sans l’OTAN ou les États-Unis.
Macron a déclaré qu’il y avait également un manque de coordination entre les alliés européens, d’une part, et les Etats-Unis et la Turquie, ainsi que le second militaire de l’OTAN.
“Ce qui est important, c’est que le bras politique de l’OTAN soit renforcé”, a déclaré à la presse le président allemand Maas, alors qu’il arrivait à la réunion des 29 alliés, dont le secrétaire d’État américain Mike Pompeo, appelant l’assurance-vie de l’OTAN Europe-Europe.
Berlin a également proposé des réunions informelles, libres des déclarations préparées que les ministres lisent souvent dans le sanctuaire de l’OTAN, le Conseil de l’Atlantique Nord, afin de permettre un débat plus approfondi.
Ces idées permettraient également à l’OTAN d’avoir une vision plus commune de la direction de l’alliance, qui s’est modernisée sur le plan militaire depuis l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, mais qui joue un rôle limité dans la résolution des conflits mondiaux.
Le Drian n’a pas parlé publiquement à l’OTAN, mais certains diplomates alliés ont déclaré qu’ils comptaient maintenant sur Paris pour soulever des questions tabous, telles que la qualité du leadership américain compte tenu de la position antérieure de Trump selon laquelle l’OTAN était obsolète.
“Il s’agit de savoir qui devrait être le dirigeant naturel de l’Europe, Paris ou Berlin, ou peut-être les deux ensemble, et où va l’OTAN”, a déclaré un haut diplomate de l’OTAN à Reuters.
Le Ministre des affaires étrangères de la Norvège, Ine Eriksen Soreide, a accueilli favorablement les propositions de Berlin, mais d’autres ont demandé plus de consultations. Le Hongrois Peter Szijjarto a déclaré que, s’il se félicitait de cette initiative, il ne savait pas si cela réglerait tous les problèmes.
Depuis son entrée en fonction en 2017, Trump a accusé les alliés européens de l’OTAN de ne pas assumer leur juste part du coût de la défense de l’Europe. Il leur a demandé de doubler l’objectif de 2% de la production économique fixé par l’OTAN pour les dépenses de défense en 2014.
Mardi 19 novembre, les ministres des Affaires étrangères des pays de l’OTAN ont convenu de faire de l’espace un domaine de la guerre et de surveiller de près la puissance militaire grandissante de la Chine, deux décisions visant à montrer à Trump que l’alliance est un atout pour les intérêts américains.