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Élections de mi-mandat aux États-Unis : le duel Biden-Trump en arrière-plan

La campagne pour les midterms 2022 est marquée par une présence inhabituelle de l’ex-président. Si bien que ce scrutin, qui historiquement sanctionne le chef de l’État en place, ressemble cette fois à un double référendum Biden-Trump. Et les démocrates espèrent bien en profiter. Analyse.

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Il y a comme un petit air de 2020 en 2022. Le 8 novembre, les États-Unis vont organiser leurs élections de mi-mandat : des législatives et des scrutins locaux qui permettent d’habitude de faire le bilan de la première moitié de mandat du président en exercice. Pourtant, parmi les unes de la presse américaine, il est autant, voire plus, question de Donald Trump que de Joe Biden.

La tradition veut qu’une fois hors du Bureau ovale, les ex-chefs de l’État gardent un silence relatif, préférant au tumulte de Washington des vacances au soleil, des conférences grassement payées ou la construction d’une bibliothèque présidentielle. Il n’en est rien pour Donald Trump.

Depuis sa défaite en 2020 – qu’il n’a d’ailleurs jamais reconnue – le milliardaire, réduit au silence sur Twitter et Facebook, continue à mobiliser ses partisans par voie de communiqué de presse et sur son propre réseau Truth Social. Donald Trump laisse grande ouverte la porte à une candidature à la Maison Blanche en 2024. Il enchaîne les meetings, volant souvent la vedette aux prétendants au Congrès qu’il est censé être venu soutenir. Pour ces midterms, il a adoubé avec un succès relatif des candidats, comme l’écrivain à succès J.D. Vance en Ohio, qui soutenaient sa théorie complotiste de l’élection volée. À l’inverse, certains de ceux qui ont refusé de marcher dans son jeu, comme la représentante républicaine du Wyoming Liz Cheney, ont perdu leurs primaires.

Casseroles

Et même quand il préfère ne pas faire parler de lui, c’est raté. Depuis cet été, les affaires s’accumulent. La perquisition spectaculaire du FBI dans son domicile de Mar-a-Lago, en Floride, a mené à la saisie de boîtes d’archives de la Maison Blanche classées secret défense. Depuis, la bataille d’avocats entre Donald Trump et le ministère de la Justice fait rage.

Ses ennuis judiciaires ne s’arrêtent pas là. La procureure générale de l’État de New York, Letitia James, a annoncé le 21 septembre des poursuites au civil contre Donald Trump et certains de ses enfants dans l’enquête sur les pratiques fiscales de la Trump Organization.

Enfin, la commission d’enquête du Congrès sur l’attaque du Capitole du 6 janvier 2021, dont la dernière audience s’est tenue en direct le 13 octobre, ne cesse de rappeler aux Américains les intentions putschistes de leur ancien président. Or ce dernier persiste et signe. Cité à comparaître lors d’un dernier coup d’éclat de la commission, Donald Trump a répondu le lendemain par un communiqué cinglant. “Avec les centaines de millions de dollars dépensés pour ce que beaucoup considèrent comme une farce et une chasse aux sorcières (…) vous n’avez pas passé ne serait-ce qu’un petit moment à examiner la fraude électorale massive qui a eu lieu pendant la présidentielle 2020 (…).”

Les démocrates se frottent les mains. Pendant que les projecteurs sont braqués sur Donald Trump, ses casseroles et ses accusations sans preuve, l’examen critique du bilan de Joe Biden passe au second plan. “On parle souvent des midterms comme d’un référendum sur le président en place. Ce qui devrait logiquement nuire aux démocrates car Joe Biden n’est pas un président populaire”, commente J. Miles Coleman, cartographe politique et coéditeur de la newsletter Sabato’s Crystal Ball, l’outil de prédiction électorale de l’Université de Virginie. La cote de popularité du chef de l’État tourne en effet autour des 42,5 % seulement, après avoir plongé à 37 % cet été. Mais selon J. Miles Coleman, l’extrême visibilité de Donald Trump pourrait “sauver” les démocrates : “Plus il s’insère dans cette élection, plus il rappelle aux électeurs indécis pourquoi ils ont voté Biden.”

Une pas si grosse vague républicaine ?

Si bien que ces midterms s’annoncent comme un double référendum Biden-Trump. Doug Schwartz, directeur de l’institut de sondages de l’université Quinnipiac, confirme que cela est assez inhabituel pour des élections de mi-mandat. “Traditionnellement, le résultat ressemblerait à un jugement sur la performance Joe Biden et de son parti. Mais cela se transforme en choix, car beaucoup d’électeurs ont aussi Donald Trump en tête.” Et d’ajouter : “Il y a six mois, la plupart des observateurs politiques s’attendaient à une grosse vague républicaine du même acabit que celle qu’on a vu deux ans après l’arrivée au pouvoir de Donald Trump ou Barack Obama. Aujourd’hui, ils estiment que la vague ne sera peut-être pas si grosse que ça, si tant est qu’il y en ait une.” Dernièrement, les analystes estiment en effet que les démocrates ont une chance de garder leur courte majorité au Sénat.

L’effet “Trump” sur ces midterms pourrait bien aussi avoir un impact sur les primaires républicaines pour 2024, selon J. Miles Coleman : “En voyant les auditions sur le 6 janvier, les républicains sont tentés de se dire : ‘On pourrait nominer quelqu’un qui ressemble à Trump mais qui ne traîne pas ses casseroles’.”

La démocratie sur le bulletin de vote

Joe Biden et ses équipes ont bien saisi cette opportunité. Pendant que les républicains tentent de lui mettre sur le dos la spectaculaire inflation – surnommée “Bidenflation” – qui frappe le pays et le reste du monde, il réplique en faisant campagne sur le thème du sauvetage de la démocratie. “Il n’y a pas de place pour la violence politique”, a-t-il ainsi lancé le 1er septembre lors d’un discours en grande pompe à Philadelphie, là où furent adoptées la déclaration d’indépendance et la Constitution américaine.

Reste que le thème de la démocratie est à double tranchant. D’abord, parce que ce n’est pas la priorité des électeurs à ce jour. “L’inflation et l’avortement sont surement des enjeux plus importants”, assure J. Miles Coleman. Mais aussi, note-t-il, parce que chacun voit un peu ce qu’il veut dans l’expression “sauver la démocratie” : “Un institut de sondages a demandé aux électeurs si les menaces contre la démocratie étaient un thème important. Deux tiers ont répondu oui, tous partis confondus. Mais en fait la formulation était assez large. Si vous êtes démocrate, vous pensez à l’attaque du 6 janvier 2021 sur le Capitole ou à Trump et ses velléités autoritaires. Si vous êtes républicain, vous pensez à la fraude électorale.”

Les démocrates savent de toute façon qu’il n’arriveront pas à convaincre les partisans purs et durs de Donald Trump. Mais pour garder une chance au Sénat, ils visent plutôt les électeurs indépendants, des modérés qui basculent d’un parti à l’autre en fonction des élections, et à qui l’évocation de la figure de Donald Trump donne des boutons. Si ces derniers sont très insatisfaits de la politique de Joe Biden et de l’inflation galopante, peut-être qu’une piqure de rappel sur l’attaque du 6 janvier pourrait leur éviter de mettre un bulletin républicain dans l’urne. Les démocrates auront leur réponse le 8 novembre.

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