Moscou ne participera plus aux missions de la Station spatiale internationale (ISS) “après 2024”, a annoncé mardi Iouri Borissov, le nouveau patron de l’agence spatiale russe Roscosmos. Une décision prise alors que Moscou a perdu en 2020 le monopole des envois dans l’espace et que la coopération russo-occidentale dans le domaine spatial a été plombée par l’offensive russe en Ukraine.
La Russie claque la porte de l’ISS. Moscou va arrêter de participer à la Station spatiale internationale “après 2024”, a annoncé mardi 26 juillet le nouveau patron de l’agence spatiale russe Roscosmos, Iouri Borissov, soulevant la question de sa survie, sur fond de tensions russo-occidentales en raison de l’offensive russe en Ukraine.
Modèle de coopération internationale réunissant l’Europe, le Japon, les Etats-Unis et la Russie, l’ISS a commencé à être assemblée en 1998. Sa retraite était prévue en 2024, mais la NASA a estimé qu’elle pouvait fonctionner jusqu’en 2030.
Or la Russie joue un rôle clé dans le maintien en orbite de la station, mais certains de ses vaisseaux sont affectés par les sanctions occidentales dues à l’assaut contre l’Ukraine.
“Nous allons sans doute remplir toutes nos obligations à l’égard de nos partenaires” de l’ISS, a déclaré Iouri Borissov lors d’une rencontre télévisée avec le président russe Vladimir Poutine, “mais la décision de quitter cette station après 2024 a été prise”.
De son côté, la Nasa a affirmé ne pas avoir reçu de notification “officielle” du retrait des Russes de l’ISS après 2024.
“Je pense que d’ici là, nous commencerons à créer la station orbitale russe”, qui sera “la principale priorité” du programme spatial national, a-t-il ajouté.
“L’avenir des vols habités russes doit se baser avant tout sur un programme scientifique systémique et équilibré pour que chaque vol nous enrichisse en connaissances dans le domaine spatial”, a-t-il précisé.
Pour l’analyste spatial russe Vitali Egorov, cette décision va signifier “une pause de plusieurs années pour les vols habités russes”, car la Russie est bien loin d’avoir sa propre infrastructure en orbite.
“Il n’y aura pas de station orbitale russe ni en 2024, ni en 2025, ni en 2026”, a-t-il dit à l’AFP : “créer une bonne station orbitale en trois ans, c’est presque irréel”.
Selon Vitali Egorov, même “avec le financement le plus généreux, cela prendra au moins dix ans”.
Le secteur spatial russe en difficulté
Nommé à la tête de Roscosmos à la mi-juillet, Iouri Borissov a remplacé Dmitri Rogozine, connu pour son style abrasif et son nationalisme outrancier.
Jusqu’à cette nomination, Iouri Borissov, 65 ans, avait le portefeuille de vice-Premier ministre chargé du complexe militaro-industriel russe, qui inclut aussi le domaine spatial.
“C’est un grand honneur pour moi, mais aussi des obligations supplémentaires”, a déclaré Iouri Borissov devant Vladimir Poutine.
“Le domaine spatial est dans une situation difficile, et je pense que ma tâche principale (…) est de ne pas faire tomber la barre, mais de la placer plus haut, en fournissant avant tout les services spatiaux nécessaires pour l’économie russe”, a-t-il souligné, citant notamment la navigation, la communication et la transmission des données.
En 2020, la Russie avait perdu le monopole des envois dans l’espace (avec ses lanceurs et vaisseaux Soyouz vieillissants mais fiables) avec l’entrée en scène de SpaceX du milliardaire Elon Musk.
La coopération russo-occidentale dans le domaine spatial a aussi été plombée par l’offensive lancée par la Russie depuis le 24 février contre son voisin ukrainien.
Les sanctions occidentales prises contre la Russie en raison de cette offensive touchent en partie l’industrie aérospatiale russe et risquent d’avoir des effets sur l’ISS, dont certains ravitaillements pourraient être perturbés.
Enfin, le secteur spatial russe est gangréné depuis des années par la corruption et le manque d’innovation.
Avec AFP