Le pape François est arrivé dimanche au Canada pour un voyage d’une semaine au cours duquel il présentera des excuses pour les abus subis dans le passé par des enfants des peuples indigènes dans des écoles confiées par le gouvernement à l’Église catholique.
Le pape François est arrivé, dimanche 24 juillet, au Canada pour un “pèlerinage pénitentiel” lors duquel il devrait renouveler ses excuses pour le rôle de l’Église dans le drame des pensionnats pour autochtones, un geste attendu depuis des années dans le pays.
Le souverain pontife, 85 ans, a atterri en fin de matinée à Edmonton, dans l’ouest du Canada pour la première des trois étapes de son voyage. Il devrait être accueilli, à sa sortie d’avion, par le Premier ministre Justin Trudeau et par l’Inuite Mary Simon, la représentante de la reine Elizabeth II.
Il se rendra également à Québec et Iqaluit, la capitale du territoire du Nunavut, ville du grand Nord canadien dans l’archipel arctique, avant de repartir vendredi.
Avant son départ de Rome, le pape a adressé sur Twitter un message à ses “chers frères et sœurs du Canada”.
“Je viens parmi vous pour rencontrer les peuples autochtones. J’espère que, avec la grâce de Dieu, mon pèlerinage pénitentiel pourra contribuer au chemin de réconciliation déjà entrepris. S’il vous plaît, accompagnez-moi par la prière”, a-t-il écrit.
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“Génocide culturel”
Dans l’avion, il a de nouveau insisté devant les journalistes sur l’aspect pénitentiel de son voyage, avant tout consacré aux autochtones, peuples amérindiens ancestraux représentant aujourd’hui 5% de la population du Canada et qui forment trois groupes : les Premières nations, les Métis et les Inuits.
Ces derniers ont été soumis pendant des décennies à une politique d’assimilation forcée, notamment au travers d’un système de pensionnats pour enfants, subventionnés par l’État mais administrés en grande majorité par l’Église catholique.
Entre la fin du XIXe siècle et les années 1990, quelque 150 000 enfants autochtones ont été enrôlés de force dans plus de 130 de ces institutions. Ils y ont été coupés de leur famille, de leur langue et de leur culture, et ont souvent été victimes de violences. Jusqu’à 6 000 enfants y ont laissé leur vie.
Petit à petit, le Canada ouvre les yeux sur ce passé qualifié de “génocide culturel” par une commission d’enquête nationale : la découverte de plus de 1 300 sépultures anonymes en 2021 près de ces pensionnats a créé une onde de choc.
“Ce voyage historique est une part importante du parcours de guérison” mais “beaucoup reste à faire”, a affirmé jeudi George Arcand Jr, grand chef de la Confédération des Premières Nations du Traité n°6, lors d’une conférence de presse à Edmonton.
Le jésuite argentin, qui s’est excusé au Vatican en avril dernier devant une délégation d’autochtones canadiens, pourrait également effectuer des gestes symboliques, en rapportant par exemple des objets d’art autochtones conservés au Vatican depuis des décennies.
“Trop tard”
La ville d’Edmonton, vers laquelle convergeait dimanche de nombreux survivants des pensionnats, se préparait à accueillir le souverain pontife, qui a dû utiliser une plateforme élévatrice pour embarquer en fauteuil roulant dans son avion. Avec plus de dix heures de vol, il s’agit du voyage le plus long depuis 2019 pour le pontife argentin.
Après une journée de repos dimanche, François doit rencontrer une première fois des membres de peuples autochtones lundi matin à Maskwacis, à une centaine de kilomètres au sud d’Edmonton, où jusqu’à 15 000 personnes sont attendues. L’Alberta est la province qui comptait le plus grand nombre de pensionnats.
“J’aimerais que beaucoup de monde vienne” pour “entendre que ce n’est pas inventé”, confie à l’AFP Charlotte Roan, 44 ans, habitante de cette communauté pauvre.
D’autres portent un regard amer sur l’événement. “Pour moi, c’est un peu trop tard parce que beaucoup de gens ont souffert”, déplore près de Saint-Paul (200 km à l’est d’Edmonton) Linda McGilvery, 68 ans, qui a passé huit ans de son enfance dans un pensionnat. “J’ai perdu beaucoup de ma culture, de mon ascendance, c’est beaucoup d’années de perte”, regrette cette femme issue de la Nation crie de Saddle Lake qui ne “fera pas de détour” pour voir le pape.
Lundi après-midi, le chef spirituel des 1,3 milliard de catholiques doit prononcer un deuxième discours en l’église du Sacré-Coeur des Premiers Peuples d’Edmonton. Mardi, il doit célébrer une messe dans un stade d’Edmonton où 65 000 personnes sont attendues, avant de se rendre au lac Sainte-Anne, site d’un important pèlerinage annuel.
Au total, François doit prononcer quatre discours et quatre homélies, tout en espagnol. Il est le second pape à visiter le Canada, après Jean Paul II.
Avec AFP