À Dakar, trois de nos Observateurs se mobilisent pour la jeunesse à travers leur engagement dans l’éducation, l’écologie ou pour l’accès à l’emploi. Dans notre nouveau Ligne Directe, consacré à la capitale sénégalaise, ils racontent comment leurs initiatives, en plus de sensibiliser à des enjeux fondamentaux, ouvrent des perspectives pour les jeunes. Deuxième volet : Abdou Touré, un agriculteur urbain qui rêve de transformer Dakar en ville verte.
“L’essentiel, c’est que chacun prenne conscience de son cadre de vie et je ne désespère pas : je pense que d’ici 25 ou 30 ans, nous aurons un Dakar vert, très propre, dans nos ruelles”. À 47 ans, Abdou Touré s’est trouvé une vocation de “guide environnemental” : il sensibilise ses voisins de quartier au nettoyage des rues et à la plantation d’arbres. Mais il s’adresse aussi, grâce à la force des réseaux sociaux, à une communauté qui a essaimé dans quinze pays d’Afrique, inspirée par sa démarche.
Tout a commencé en 2019, juste devant sa porte :
Un beau jour j’ai remarqué qu’il y avait beaucoup d’ordures dans ma rue. J’ai décidé de mettre mon téléphone sur un trépied, de filmer en accéléré et de partager la vidéo sur les réseaux sociaux pour inciter les gens à prendre en compte le cadre de vie.
Abdou Touré multiplie ainsi les vidéos et lance un hashtag, le Quartier vert challenge. En parallèle, il développe sur sa terrasse une série de plantations, allant du chou rouge, aux fraises en passant par la menthe. Son plus grand défi : des pommes. Le plant en cours tient pour le moment mieux que celui de l’an dernier. C’est donc un vrai potager qu’il entretient en plein cœur du quartier de Zac Mbao, dans un Dakar bétonné : “quand on prend l’avion ou qu’on survole nos quartiers, c’est carrément des cimetières de ciment” déplore Abdou Touré. Dans le capitale sénégalaise, les espaces verts sont quasi inexistants et l’air est souvent lourdement pollué.
De la Mauritanie aux Comores
Publiées sur Twitter ou Facebook, les images de sa rue et de sa terrasse ont fini par faire des envieux : en trois ans, le Quartier vert Challenge a été dupliqué de la Mauritanie aux Comores, chacun étant libre d’y associer le geste écologique qu’il souhaite.
Au Tchad, au Togo, au Ghana, aux Comores, les jeunes se l’approprient par rapport à leur contexte. En Mauritanie, ils font beaucoup de sessions dans les écoles et du reboisement. En Côte d’Ivoire, ils sont beaucoup plus dans la gestion des déchets en plastique par exemple.
Notre Observateur estime que le modèle de sa terrasse peut aussi être une source d’emploi : “à Dakar, des jeunes ont commencé à créer leur microentreprise d’agriculture urbaine : ils vendent le fruit de leurs plantations dans leur quartier. C’est un petit revenu mais cela peut se développer”.
C’est là un des rêves d’Abdou Touré, qui ambitionne que de son quartier à ceux des grandes villes africaines, son initiative inspire le plus grand nombre.
Notre reportage complet :
Avec nos Observateurs à Dakar, mobilisés pour les jeunes
Dans son fief de l’est de Dakar, le succès en ligne du Quartier Vert Challenge a fait d’Abdou Toure une figure bien connue, qui prêche la parole verte porte par porte. Il a ainsi converti nombre de ses voisins non seulement au nettoyage mais aussi à la plantation : “je leur donne des graines, je leur explique comment s’occuper de l’arbre mais je ne veux pas avoir à l’entretenir, c’est à eux d’en prendre soin ensuite”.
Un de ses voisins, Ousseynou Aïdara, qui fait pousser un cocotier devant sa porte, se dit ravi : “Ma fille de 6 ans et moi nous occupons quotidiennement de cet arbre. Au départ il avait la taille de ma fille et maintenant il me dépasse, ça fait plaisir, et tout ça est le fruit du travail d’Abdou”.
À l’image de sa jeune voisine, Abdou met l’accent sur les enfants. Dans l’école de son quartier, il incite ainsi les élèves à planter des arbres dans la cour et a fait installer des poubelles de tri. Et régulièrement, il organise des sessions de nettoyage du quartier avec des jeunes. L’objectif est clair : dans un pays qui est encore loin de faire de l’écologie une priorité, faire prendre conscience de l’urgence à la génération à venir pour qu’elle intègre dans son quotidien la philosophie du quartier vert.