La cour d’assises spéciale de Paris a prononcé, mercredi, contre les vingt accusés du procès des attentats du 13-Novembre des peines de deux ans d’emprisonnement à la perpétuité, dont une peine rarissime de perpétuité incompressible contre Salah Abdeslam. Entre soulagement et satisfaction, les parties civiles reconnaissent des peines “lourdes”.
“Dix mois de procès, ça aide à se reconstruire. C’est fini, ça va faire un vide”, résume Sophie, rescapée du Bataclan, soulagée et les larmes aux yeux après l’annonce, mercredi 29 juin, du verdict du procès des attentats du 13-Novembre.
Plus de six ans après le pire crime de l’après-guerre en France, la cour d’assises spéciale de Paris a condamné mercredi soir Salah Abdeslam, le seul membre encore en vie de commandos qui ont fait 130 morts, à la perpétuité incompressible, la peine la plus lourde du code pénal.
Les autres accusés se sont vus infliger des peines allant de deux ans de prison à la perpétuité, avec période de sûreté pour certains et incompressible pour d’autres.
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Avant le début de la lecture du verdict, la vaste salle d’audience n’avait jamais été aussi pleine, et les rescapés et proches de victimes se serraient les uns aux autres sur les bancs de bois, dans une ambiance électrique, loin du grand silence du premier jour.
La lecture des motivations par le président Jean-Louis Périès prendra moins d’une heure. Après ses derniers mots, les premières parties civiles quittent la salle, certains en larmes.
“Les peines sont assez lourdes”, estime Sophie, émue. “Ils ne sortiront pas tout de suite de prison. On va savourer, je ressens beaucoup de soulagement.” Elle prend David Fritz, un rescapé du Bataclan, dans ses bras. “Je sens que j’ai grandi. C’est important de voir que la justice a été rendue. C’était nécessaire. C’est un moment un peu flottant, comme si on claquait une grande porte ferrée”, détaille-t-il.
“Se reconstruire en groupe et pas individuellement”
Pour Bruno Poncet, lui aussi rescapé du Bataclan, “c’est un vrai soulagement d’en avoir fini avec le procès. Je suis venu quasi tous les jours. Ca n’a pas toujours été facile. Il y a une peur du vide aujourd’hui mais il est temps d’en sortir”, explique-t-il. Il s’interroge aussi : “Certaines peines peuvent paraître un peu lourdes. Je me pose la question de nos prisons qui sont déjà surchargées. J’ai peur qu’on crée des monstres”.
À l’intérieur de la vaste salle d’audience, des parties civiles s’attardent, certaines semblent très émues. Certains montent sur les bancs de bois clair pour apercevoir le box.
Les trois accusés qui comparaissaient libres, et qui ressortiront libres, affichaient sourires et soulagement. Ils étaient très entourés par des parties civiles, comme pendant une bonne partie du procès.
Philippe Duperron, président de l’association 13Onze15, considère que la “réparation” des victimes “consistait essentiellement dans la tenue du procès, la possibilité offerte de s’exprimer, de déposer leur douleur et leur souffrance. Maintenant, ceci dépend de chaque individu, certains avaient besoin de cette peine” de prison, ajoute-t-il.
“Le chemin face à cette horreur a été de se reconstruire en groupe, et pas individuellement”, souligne Arthur Dénouveaux, président de Life for Paris. “On avait besoin de se serrer les coudes et d’entendre ce que la justice avait à nous dire après six ans et demi.”
Avant de quitter la salle des pas perdus, les parties civiles viennent émarger une dernière fois avec leur badge, tout sourire pour certains. D’autres immortalisent l’issue de ces dix mois de procès par une photo, une dernière bise, ensemble. Beaucoup de bienveillance se dégage de leurs discussions.
Nombre d’entre eux rejoignent les deux brasseries face au palais de justice, saturées de discussions dans la nuit.
Avec AFP