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L'épidémie de Covid-19, une “paix armée qui exige toujours une vigilance constante”

Depuis plusieurs mois, le tourisme reprend de plus belle, et les pays occidentaux tels que les États-Unis et les pays européens assouplissent les restrictions d’entrée sur leur territoire mises en place lors de la pandémie de Covid-19. Quelles conséquences cette reprise intense des échanges touristiques peut-elle avoir sur la pandémie ? Faut-il craindre une recrudescence de l’épidémie ? Les réponses d’Antoine Flahault, médecin épidémiologiste et directeur de l’Institut de santé globale à la faculté de médecine de l’université de Genève.

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Après deux ans de restrictions et de réglementations strictes concernant les voyages (frontières fermées, quarantaines obligatoires, port du masque pendant les vols, présentation de tests Covid et certificats de vaccination négatifs…), de nombreux pays occidentaux réduisent ou suppriment les mesures de protection à l’approche de la saison estivale.

En mai dernier, l’Union européenne a supprimé l’obligation de porter le masque pour les passagers des vols, invoquant “les niveaux de vaccination et d’immunité naturellement acquise”. La France a rouvert ses frontières à toute personne, vaccinée ou non-vaccinée, à condition qu’elle présente un test Covid négatif, tandis que l’Italie a supprimé toutes ses restrictions d’entrée pour les voyageurs internationaux.

Outre-Atlantique, dimanche dernier, les États-Unis ont levé l’obligation de présenter un test Covid négatif avant d’embarquer dans un avion à destination du pays, invoquant l’adoption généralisée des vaccins.

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Certains se demandent si ces décisions ne sont pas prématurées, compte tenu de l’imprévisibilité de la pandémie. Car deux nouveaux sous-variants d’Omicron – BA.4 et BA.5 – identifiées pour la première fois en Afrique du Sud au début de l’année 2022, se propagent rapidement en Europe. Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies (ECDC) prévient que, même s’ils ne semblent pas présenter un risque de maladie grave plus élevé que les autres formes d’Omicron, des taux de transmission plus élevés pourraient entraîner davantage d’hospitalisations et de décès.

Le Portugal a connu récemment une recrudescence des infections et des décès provoqués par ces nouvelles souches. La France a également signalé une augmentation des infections et des hospitalisations au cours de la semaine écoulée, également due aux sous-variants. La circulation du SARS-CoV-2 s’est accélérée sur tout le territoire métropolitain, indique Santé publique France. Le taux d’incidence a fortement progressé et ce dans toutes les classes d’âge, de même que le taux de positivité.

Alors quelles conséquences les voyages internationaux de l’été pourraient-ils avoir sur la trajectoire de la pandémie ?

France 24 : Quels effets peut-on attendre sur la pandémie après un été qui sera marqué par l’augmentation des voyages internationaux et l’allègement voire la suppression des restrictions de voyage et des mesures de protection ?

Antoine Flahault : La littérature scientifique montre clairement que les voyages et les mouvements de population augmentent la propagation des virus hautement transmissibles comme le SARS-CoV-2. Avant Omicron, les pays qui avaient adopté des politiques strictes de contrôle aux frontières ont plutôt bien réussi à limiter la propagation du virus sur leur territoire.

Toutefois, à l’exception de la Chine, la plupart des pays ont désormais levé ces mesures, ce qui a probablement entraîné une augmentation de la vitesse et de l’intensité des vagues de Covid-19 dans le monde. Quant aux vaccins, ils se révèlent peu efficaces pour ralentir la transmission, mais ils parviennent à réduire le poids du Covid-19 en termes d’hospitalisations et de décès.

Allons-nous vers une nouvelle vague de Covid en Europe cet été, alors que les frontières sont de nouveau ouvertes et que les restrictions sur les voyages, les tests négatifs et les vaccins sont levés ?

Nous voyons clairement les premiers signes d’une nouvelle vague pandémique en Europe occidentale, qui semble être principalement alimentée par BA.5, l’un des nouveaux sous-variants d’Omicron, et BA.4, qui a déjà déclenché des vagues en Afrique du Sud et au Portugal.


Un autre sous-variant, BA.2.12.1, se répand actuellement aux États-Unis et circule également en Europe, notamment au Royaume-Uni. La forte mobilité attendue lors de la prochaine saison estivale ne contribuera pas à ralentir la circulation de ces souches virales sur tout le continent.

Selon vous, y a-t-il des mesures que les gouvernements devraient continuer à appliquer aux voyages internationaux pour réduire le risque de propagation du Covid-19 ?

La plupart des démocraties ont renoncé aux restrictions sévères, choisissant des approches plus libérales qui permettent aux gens de se protéger lorsqu’ils en ressentent le besoin. Il serait difficile de remettre en œuvre ces mesures passées sans arguments convaincants.

Bien sûr, si une souche hautement transmissible et virulente émerge, il n’y aura pas autant de débats sur l’obligation de prendre des mesures strictes. Mais avec les souches existantes qui circulent, les gouvernements ne voient pas de raisons de continuer à appliquer la plupart des anciennes mesures, même si elles se sont avérées utiles dans un passé récent.

À ce stade, où en sommes-nous globalement dans notre ambition de mettre fin à la pandémie ? L’assouplissement des politiques gouvernementales, notamment aux États-Unis et en Europe, donne l’impression que la pandémie est terminée, mais est-ce vraiment le cas ?

Les vaccins et les traitements ont fait toute la différence dans cette pandémie. Avant que les vaccins ne soient largement distribués, nous avons connu une forme de réponse “médiévale” contre la pandémie, avec des fermetures et des couvre-feux.

Aujourd’hui, à l’exception notable de la Chine et de la Corée du Nord, nous sommes entrés dans une phase beaucoup plus moderne de la pandémie, qui permet aux gens de reprendre la plupart de leurs activités antérieures. Toutefois, cette “paix armée” est fragile et exige une vigilance constante de la part des autorités sanitaires en termes de maintien de l’immunité au sein de la communauté, ainsi que des approches plus ciblées pour limiter la propagation chez les populations à risque.

Nous espérons que nous ne reviendrons pas à des restrictions de type “médiéval”, mais nous ne pouvons pas continuer à vivre avec des taux de mortalité élevés.


Quels sont les meilleurs moyens de se protéger pendant cette saison ?

Pour la plupart des gens, cela signifie être complètement vacciné avec un ou deux rappels et porter des masques FFP2 à l’intérieur et dans les transports publics tout en évitant de manger et de boire. Les personnes doivent également privilégier les activités de plein air et éviter les interactions sociales.

Les personnes vulnérables, âgées de plus de 80 ans, immunodéprimées ou non vaccinées souffrant de pathologies, doivent prévoir un accès facile aux tests Covid en cas de symptômes, et à des médicaments antiviraux efficaces en cas de test positif.

Article adapté de l’anglais par Pauline Rouquette. Retrouvez ici la version originale.

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