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Royaume-Uni : après Elizabeth II, quel avenir pour le Commonwealth ?

Avec 54 membres, dont le Royaume-Uni et certaines de ses anciennes colonies, le Commonwealth constitue un élément majeur de l’influence britannique dans le monde. La reine Elizabeth II, qui a défendu avec détermination cette institution née en 1949, reste par ailleurs la cheffe d’État de 15 pays. Alors que Londres fête les 70 ans de son règne, beaucoup s’interrogent sur l’avenir du club, notamment lorsque le prince Charles prendra place sur le trône.

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Plongeant ses racines dans l’Empire britannique, le groupe de 54 membres du Commonwealth a vu le jour dans sa forme actuelle en 1949 avec la Déclaration de Londres, qui reconnaissait les États membres comme “libres et égaux”, alors que de nombreux territoires étaient encore officiellement des colonies britanniques. L’adhésion à l’organisation n’était pas subordonnée à la reconnaissance du monarque britannique comme chef d’État.

Le roi George VI a été le premier chef de l’association politique, et Elizabeth II a pris la relève en 1952 avec son accession au trône. Elle demeure aujourd’hui la monarque de 15 États membres, 33 autres étant des Républiques et cinq autres pays des monarchies avec un monarque propre. La vaste majorité de ces États sont d’anciennes colonies britanniques.

Fondée sur une coopération libre et volontaire, l’organisation représente un poids démographique non négligeable, environ un quart de la population mondiale. Tous les membres doivent partager les valeurs de la démocratie et des droits de l’Homme, et se font les champions de la jeunesse et de l’environnement, notamment. Au-delà de ces principes, ils n’ont toutefois aucune obligation les uns envers les autres.

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Ils participent à une réunion bisannuelle des chefs de gouvernement du Commonwealth, présidée par la reine, et aux Jeux du Commonwealth, un événement sportif international qui a lieu tous les quatre ans.

“Le Commonwealth a été créé comme un moyen alternatif de maintenir des liens d’amitié volontaire et d’intérêt mutuel entre des nations liées par la langue anglaise et, pour la plupart, par leur relation avec le Royaume-Uni en tant qu’anciennes colonies”, explique Cindy McCreery, historienne et maîtresse de conférences à l’Université de Sydney.

“L’une de ses principales réussites est de maintenir un grand nombre d’États différents en son sein – notamment le Canada, le Royaume-Uni, l’Australie, l’Inde, les pays des Caraïbes ainsi que les anciennes colonies britanniques d’Afrique”, ajoute cette spécialiste de l’histoire de la famille royale britannique. “Le Commonwealth est également remarquable car certains des États qui l’ont quitté y sont revenus, comme l’Afrique du Sud, qui a quitté l’organisation sous l’apartheid et y est revenue volontairement.”

Tout au long de son règne, la reine Elizabeth II a joué un rôle crucial dans la défense du Commonwealth et le maintien de son influence. “Le Commonwealth a toujours été une priorité pour la reine, ce qui explique en grande partie pourquoi il est encore actif”, analyse Craig Prescott, maître de conférences en droit constitutionnel britannique à l’université de Bangor, au pays de Galles.

“Elle a visité des pays du Commonwealth tout au long de son règne jusqu’à très récemment – son dernier voyage à l’étranger était à Malte en 2015 pour la réunion des chefs de gouvernement. Elle a toujours rappelé l’importance du Commonwealth, que ce soit dans son discours de Noël ou dans son message de la Journée du Commonwealth”, ajoute Craig Prescott, se référant au jour où la reine, en tant que cheffe de l’organisation, livre un discours diffusé à travers le monde après un service interreligieux, le deuxième lundi de mars.

“Elizabeth a exercé une énorme influence. Elle s’est beaucoup intéressée au leadership dans les réunions des chefs de gouvernement du Commonwealth, a essayé de régler les différends entre les dirigeants et de faire en sorte que les gens continuent à penser qu’il est pertinent de rester dans l’organisation”, souligne Cindy McCreery.

Au-delà d’un “héritage colonial”, une plateforme d’influence pour des petits États

Certaines des nations les plus riches du groupe, comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande et le Canada, reconnaissent encore la reine britannique comme leur cheffe d‘État. Mais ce n’est pas le cas de tous les membres : les pays des Caraïbes semblent de plus en plus se diriger vers une scission avec la couronne. Au moins six États ont indiqué qu’ils prévoyaient de retirer ce statut à la reine, suivant ainsi la Barbade, devenue une République fin 2021.

Le Premier ministre jamaïcain a ainsi défendu une transition de son pays vers un régime républicain… en pleine visite du prince William et de son épouse Kate Middleton, en mars. Un déplacement du duc et de la duchesse de Cambridge dans les Caraïbes largement considéré comme une tentative de maintenir les liens des pays du Commonwealth avec la monarchie. Mais leur venue a aussi donné lieu à des manifestations au Belize et en Jamaïque, où la population a réclamé des excuses officielles de la part de la famille royale, en particulier au sujet de la traite négrière, et exigé des compensations financières.

>> À lire aussi : “Pourquoi la Barbade s’affranchit de la couronne britannique”

Même si certains micro-États s’apprêtent à rejeter la monarchie, symbole d’un passé colonial dont ils ne veulent plus, rester dans le Commonwealth pourrait être bénéfique, en continuant à bénéficier de certains avantages.

“Lorsque la Barbade est devenue une République, elle n’a plus eu la reine comme chef d’État, mais cela n’a pas changé sa relation avec le Commonwealth. Nous ne voyons pas de pays quitter le Commonwealth en masse lorsqu’ils deviennent des Républiques”, analyse Cindy McCreery.

“Seuls, les petits États des Caraïbes n’auraient que très peu de poids sur l’échiquier international. Le Commonwealth est donc leur principal moyen de se faire entendre : l’organisation permet à ces petits États de se regrouper et d’exercer une plus grande influence sur des questions telles que le changement climatique. Elle leur offre une plateforme mondiale pour parler des questions qui les préoccupent, trouver des membres qui partagent des expériences similaires, mais aussi obtenir l’aide de membres plus riches comme l’Australie, le tout dans un esprit d’amitié”, ajoute-t-elle. “Il est significatif que 54 nations aient signé pour ce projet. Il ne s’agit pas seulement d’un héritage colonial.”

La lutte contre le changement climatique comme objectif ?

Alors que le Royaume-Uni célèbre jusqu’à dimanche 5 juin le jubilé de platine de la reine Elizabeth II, soit les 70 ans de son règne, de nombreux spécialistes se demandent à quoi ressemblera le Commonwealth lorsque le prince Charles, l’héritier du trône d’Angleterre, prendra la tête de l’organisation.

Le Commonwealth a été critiqué pour son inefficacité et son incapacité à accompagner des changements politiques majeurs. Beaucoup ont suggéré que le temps était venu d’en finir.

“Actuellement, le plus grand objectif du Commonwealth est la lutte contre le changement climatique, car de nombreux pays de l’organisation sont susceptibles de souffrir grandement de ses effets. L’organisation pourrait vraiment avoir un rôle à jouer, par exemple en aidant les pays à accéder à la neutralité carbone”, explique Craig Prescott.

“Le prince Charles a toujours exprimé un vif intérêt pour la question du changement climatique, ce qui pourrait être intéressant pour les membres du Commonwealth. Mais cela peut nécessiter de repenser la structure de l’organisation – ses ressources et ses capacités. Il n’y a pas vraiment eu de volonté politique pour la faire grandir, peut-être parce qu’elle a été supplantée par d’autres organisations et alliances internationales, comme le G20, tout simplement”, ajoute-t-il.

“Je pourrais parier que Charles sera beaucoup plus interventionniste sur des questions comme l’environnement et la jeunesse”, ose le chercheur. “Charles pourrait avoir la capacité d’en faire plus qu’Elizabeth, car il a une expérience de travail significative avec des organisations œuvrant dans ces domaines.”

Selon l’historien, le Commonwealth a un avenir et un potentiel qui ne sont pas nécessairement liés à la reine.

Au service de la “Global Britain” ?

Selon de nombreux observateurs, l’Australie pourrait être le prochain pays du groupe à devenir une République : dans son gouvernement, le nouveau Premier ministre australien Anthony Albanese a nommé un ministre délégué à la République.

“Je pense que davantage de membres du Commonwealth deviendront des Républiques, mais cela est plus lié à leur relation constitutionnelle avec le Royaume-Uni qu’à leur appartenance à l’organisation. Je suis sûr que de nombreux États considéreraient qu’il s’agit d’une bonne organisation dont il faut faire partie, même si ce n’est qu’à titre d’appoint. Le Commonwealth a du potentiel, même si je ne suis pas sûr qu’il atteigne son objectif.”

Pour les conservateurs au pouvoir à Londres, un engagement plus étroit avec le Commonwealth pourrait aider le Royaume-Uni dans la stratégie “Global Britain” (“Grande-Bretagne planétaire”) du Premier ministre Boris Johnson. Cette dernière consiste à renouer avec “les anciens amis et les nouveaux alliés” dans un monde post-Brexit. Mais son succès reste encore à prouver.

Cet article a été adapté de l’original en anglais par Henrique Valadares.

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