Le récit sur la Shoah et sur les racines juives de l’écrivaine française Anne Berest, “La Carte postale”, au cœur d’une polémique dans le milieu littéraire parisien, a décroché samedi à New York le premier prix Goncourt version américaine.
L’écrivaine française Anne Berest a remporté, samedi 30 avril, le premier prix Goncourt version américaine pour son livre “La Carte postale” consacré à l’histoire de sa famille au cours de la Shoah.
Le plus prestigieux des prix littéraires français s’est internationalisé avec des “sélections prix Goncourt” dans 25 pays, que doivent départager des étudiants d’université en littérature française et francophone.
Pour la première fois aux États-Unis, l’Académie Goncourt a dévoilé samedi le “Choix Goncourt United States” lors d’une cérémonie à Manhattan, aux services culturels de l’ambassade de France, présidée par l’écrivaine Siri Hustvedt entourée d’un jury d’étudiants des universités Yale, Princeton, Harvard, New York et Duke.
Un récit familial
Ces jeunes parfaitement bilingues – américains, français et d’autres nationalités – ont étudié en français les neuf livres de la sélection finale du Goncourt 2021, remporté en novembre par le Sénégalais Mohamed Mbougar Sarr pour “La plus secrète mémoire des hommes” (éd. Philippe Rey).
En attribuant le Goncourt, dans sa déclinaison américaine, à Anne Berest pour “La Carte postale” (éd. Grasset), Siri Hustvedt, romancière, poète et essayiste, a souligné “l’importance énorme qu’a eue la littérature française pour (se) développer en tant qu’être humain et écrivaine”.
“L’avenir réside dans les jeunes générations du monde entier qui lisent, sont curieuses et dynamiques, et la littérature est un outil vital pour forger le pluralisme, la tolérance et la démocratie à une époque où ces principes sont gravement menacés”, a fait valoir l’intellectuelle new-yorkaise. Le choix des étudiants des universités américaines s’est porté par “consensus” sur “La Carte postale”, a expliqué à l’AFP l’une des jurés, Léa Jouannais, doctorante à Yale.
Ce récit familial sur la transmission de la mémoire de la Shoah est “intéressant pour un public américain qui ne connaîtrait pas en détail l’histoire de la collaboration en France, la manière dont ont été traités les juifs en France pendant la Seconde Guerre mondiale”, a estimé l’étudiante pour qui le livre, qui sera traduit en anglais, éclaire “la question d’actualité de l’antisémitisme en France”.
À l’automne 2021, “La Carte postale” et “Les Enfants de Cadillac” de François Noudelmann, deux livres traitant de l’histoire d’une famille juive, ont été au cœur d’une controverse dans le milieu littéraire parisien : Camille Laurens, jurée du Goncourt, avait fait une critique très sévère dans Le Monde du récit d’Anne Berest, alors qu’elle est la compagne de François Noudelmann.
En conséquence, l’Académie Goncourt avait déclaré inéligibles “les ouvrages des conjoints, compagnons ou proches parents des membres du jury”. Le prix Femina avait aussi écarté les deux livres.
Avec AFP