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Offensive russe dans l’est de l'Ukraine : l’armée ukrainienne peut-elle défendre le Donbass ?

Face à l’offensive russe dans l’est de l’Ukraine, lancée le 18 avril et où les combats meurtriers se sont intensifiés ces derniers jours, les troupes ukrainiennes massées sur place entendent défendre le Donbass. Peuvent-elles vraiment tenir face au rouleau compresseur russe ? Décryptage. 

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Alors que l’offensive russe attendue dans le Donbass a commencé lundi 18 avril, la Russie, qui a annoncé le 25 mars qu’elle comptait désormais concentrer ses efforts sur l’est du pays, intensifie ses opérations sur cette zone en guerre depuis 2014, et dont une partie est contrôlée par des séparatistes prorusses.  

“Cette nouvelle phase de la guerre était annoncée”, souligne le général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l’Onu, invité du Débat de France 24. “Après avoir eu pendant quatre semaines plusieurs axes d’attaque comprenant notamment Kiev et Kharkiv et avoir essuyé des échecs, l’armée russe a décidé de se concentrer sur le Donbass, ce qui stratégiquement est compréhensible.” 

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Toutefois, la question qui se pose, selon lui, est celle de savoir si les Russes disposent des moyens pour enfoncer la défense ukrainienne et la contourner. “C’est la question fondamentale”, affirme le général.

Or le temps presse pour le président russe Vladimir Poutine qui espère un succès important en Ukraine avant le 9 mai, date anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie en 1945, et du traditionnel défilé militaire organisé chaque année à cette occasion sur la place Rouge à Moscou.  

“Le général russe Alexandre Dvornikov, qui a récemment été nommé à la tête de toutes les forces armées engagées en Ukraine, n’a que deux semaines et demie devant lui pour accomplir sa mission, c’est-à-dire pour remporter une victoire avant le 9 mai, c’est assez bref”, estime le général Dominique Trinquand.

Surnommé “le boucher de Syrie” par le général américain et ancien chef de la CIA David Petraeus, Alexandre Dvornikov est connu pour avoir mené la stratégie russe de bombardements intensifs en Syrie. Sa réputation de militaire prêt à tout pour parvenir à ses fins fait craindre le pire dans l’est de l’Ukraine.

Une armée ukrainienne préparée depuis 2014

Un délai “assez bref”, alors que l’armée ukrainienne n’entend pas se laisser faire dans le Donbass. “Peu importe combien de soldats russes sont amenés jusqu’ici, nous combattrons”, a déclaré le président Volodymyr Zelensky. “Nous nous défendrons.”  

Selon les experts, les soldats ukrainiens sont en capacité de contrecarrer les plans du Kremlin dans l’est du pays.

“Depuis 2014, l’arme ukrainienne – qui connaît par cœur toute cette région – s’est préparée pour ce front, ce qui explique que les Russes ont avancé dans l’est depuis la Crimée et non pas depuis le Donbass”, souligne l’ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU.

“Si au début de l’invasion, l’armée russe a avancé assez rapidement et a conquis des zones dans le sud de l’Ukraine, dans le Donbass par contre, elle n’a pris que très peu de territoires. Elle n’a même pas pu prendre Marinka et Avdiivka, qui sont des villes satellites de Donetsk et qui sont restées aux mains des Ukrainiens depuis 2014”, rappelle Gulliver Cragg, correspondant de France 24 à Kiev. “Les forces russes les ont bombardés très intensément, mais ils n’arrivent pas à avancer, ce qui en dit long sur la préparation des Ukrainiens dans cette région pour faire face aux attaques.”

Dans cette nouvelle phase de la guerre, Dominique Trinquand explique que les soldats russes vont donc se retrouver face à des positions ukrainiennes “extrêmement bien préparées depuis huit ans, c’est-à-dire enterrées et bétonnées avec des plans de feu, des positions de rechange, des capacités de renfort et de monter une contre-attaque contre les positions ennemies”.  

“La décentralisation du combat est la clé”

Le général explique qu’il y a actuellement deux manœuvres russes en cours pour prendre le Donbass en tenaille, de façon à réduire la poche du Donbass. “L’une consiste à attaquer frontalement la défense ukrainienne de l’est vers l’ouest sur trois axes. Si l’un de ces axes finit par permettre une percée, les Russes y enverront les réserves et les renforts”, précise-t-il. “La deuxième consiste à enfermer les forces ukrainiennes et à les couper des renforts qui arriveraient de l’Ouest, c’est la manœuvre qui part d’Izioum, dans l’est, et qui descend vers le sud, de façon à enfermer la fine fleur de l’armée ukrainienne qui est là-bas depuis 2014 et qui a des positions très préparées et beaucoup d’armements.” 

Le front est au 19 avril 2022.
Le front est au 19 avril 2022. © France 24

Or, les Ukrainiens ne sont pas restés spectateurs face à ces manœuvres. “Ces derniers jours, l’armée ukrainienne a lancé une contre-attaque dans la région de Kharkiv qui coupait l’arrière des colonnes russes qui avançaient vers le Donbass”, poursuit le général Dominique Trinquand. “C’est la stratégie préférée des Ukrainiens qui consiste à couper de leur logistique les forces russes. Celles-ci, une fois privées de carburant ou de munitions, s’arrêtent net là où elles se trouvent, faute de pouvoir aller plus loin.”

Selon lui, “la décentralisation du combat est la clé pour les Ukrainiens” dont l’armée a fait preuve d’une certaine adaptabilité et d’un pragmatisme sur le champ de bataille. “Être capable de décider et de mener son combat une fois que l’on se trouve dans une zone et que l’on sait quel effet on veut obtenir alors que l’armée russe est extrêmement centralisée et déroule comme un rouleau compresseur ses moyens.”

Enfin, pour pouvoir défendre le Donbass, l’aide militaire occidentale pourrait équilibrer en partie le combat. “Il faut se souvenir que l’aide fournie à l’Ukraine date de 2014 que ce soit sous forme de formation ou d’équipements. Et si l’armée ukrainienne est très courageuse, il faut le reconnaître aujourd’hui, c’est aussi parce qu’elle a été formée et équipée”, conclut le général. “Depuis le début de l’invasion russe, les livraisons d’armements continuent d’arriver dans le pays, mais il ne faut pas oublier tout le reste du soutien comme les renseignements et les images satellites fournies par les Occidentaux, qui sont au moins aussi importants que les armes et qui ont permis aux Ukrainiens de marquer des points.” 

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