Une enquête affirme qu’un notaire juif aurait dénoncé la famille d’Anne Frank. Celui-ci était membre fondateur du Conseil juif, organe administratif que les nazis ont utilisé afin d’organiser les déportations. La Maison d’Anne Frank s’est dit “impressionnée” mais avertit que des questions restaient en suspens.
Qui a dénoncé Anne Frank et sa famille en 1944 aux nazis ? Un livre fondé sur l’enquête d’un ancien agent du FBI désigne comme suspect principal un notaire juif qui l’aurait fait pour sauver sa propre famille.
Le notaire, Arnold Van den Bergh, pourrait avoir révélé où se cachait la famille Frank à Amsterdam, affirme l’auteur d’une enquête de six ans sur cette affaire non élucidée, dont les résultats ont été publiés dans le livre “Qui a trahi Anne Frank ?” de l’auteure canadienne Rosemary Sullivan, qui paraît mardi en français aux éditions HarperCollins (420 pages, 19 euros).
>> À lire : Des chercheurs ont découvert des pages secrètes sur le sexe dans le journal d’Anne Frank
Les preuves contre Arnold Van den Bergh ont été étayées par des techniques modernes ainsi qu’une lettre anonyme envoyée au père d’Anne Frank après la Seconde Guerre mondiale identifiant le notaire comme un traître.
Le musée de la Maison d’Anne Frank s’est dit “impressionné” par l’enquête menée par le détective à la retraite du Bureau fédéral d’enquête Vince Pankoke, mais a souligné qu’une enquête plus approfondie était nécessaire.
Lettre anonyme
L’adolescente, connue dans le monde entier depuis la publication de son journal intime rédigé entre 1942 et 1944 alors qu’elle et sa famille se cachaient dans un appartement clandestin à Amsterdam, a été arrêtée en 1944 et est morte l’année suivante, à l’âge de 15 ans, dans le camp de concentration de Bergen-Belsen.
Différentes théories ont circulé sur ce qui avait mené au raid qui a révélé l’annexe où se cachait la famille.
En 2016, Vince Pankoke, détective à la retraite du FBI, a été enrôlé par un réalisateur de documentaires néerlandais pour diriger une équipe chargée de résoudre ce “cold case”.
>> À lire : Le journal d’Anne Frank toujours aussi pertinent, 75 ans après sa mort
Le nom de Van den Bergh, décédé en 1950, avait jusqu’ici reçu peu d’attention. Le notaire était un membre fondateur du Conseil juif, organe administratif que les nazis ont utilisé afin d’organiser les déportations. Selon les enquêteurs, sa famille bénéficiait d’une exemption de déportation, et celle-ci avait été révoquée au moment de la trahison des Frank, mais la déportation n’avait finalement pas eu lieu.
Le notaire disparut des radars à la fin de la guerre, à laquelle il a survécu ainsi que le reste de sa famille.
Mais l’élément le plus convaincant a été le sérieux avec lequel Otto Frank a traité l’allégation, ont indiqué les médias néerlandais.
Le père d’Anne a déclaré aux enquêteurs en 1964 qu’il avait reçu une lettre peu après la guerre nommant Van den Bergh comme celui qui avait trahi les Frank et plusieurs autres familles juives.
Les experts divisés
Une copie faite par Otto Frank de la lettre a été retrouvée par les enquêteurs dans les archives d’un policier. “Nous n’avons pas de pistolet fumant, mais nous avons une arme chaude avec des douilles vides à côté”, a déclaré Vince Pankoke, cité par la chaîne publique néerlandaise NOS.
Ronald Leopold, directeur exécutif de la Maison d’Anne Frank, a averti que des questions subsistaient sur la lettre anonyme et qu’une enquête plus approfondie était nécessaire. “Vous devez être très prudent avant d’inscrire quelqu’un dans l’histoire comme celui qui a trahi Anne Frank si vous n’êtes pas sûr à 100 ou 200 % de cela”, a-t-il souligné auprès de l’AFP.
D’autres experts se sont montrés plus critiques. “Un non-sens diffamatoire”, a même réagi avec virulence Bart van der Boom, professeur à l’université de Leiden, auprès de la télévision publique NOS. “Ils (les enquêteurs) disent qu’il ne se cachait pas, donc il a dû acheter sa sécurité d’une autre manière. Mais ils ne savent tout simplement pas où il était”, a-t-il souligné.
La petite-fille d’Arnold Van den Bergh, qui a parlé aux chercheurs de son histoire familiale, a été informée de leurs découvertes le week-end dernier. Elle a refusé de commenter l’affaire à la NOS.
Avec AFP