La députée européenne de Malte Roberta Metsola est la grande favorite pour devenir mardi la première femme à présider le Parlement européen depuis 20 ans. Mais sa probable victoire fait grincer des dents en raison de ses positions contre l’avortement.
Le Parlement européen élit, mardi 18 janvier, son nouveau président, un poste qui semble promis à la conservatrice maltaise Roberta Metsola, le jour même de ses 43 ans. Membre du groupe de droite du Parti populaire européen (PPE), première force politique de cette institution, elle fait figure de favorite pour succéder à l’Italien David Sassoli, décédé le 11 janvier et dont le mandat prenait fin cette semaine.
Elle sera opposée à trois autres candidats : l’Espagnole Sira Rego (gauche radicale), le Polonais Kosma Zlotowski (ECR, eurosceptiques) et la Suédoise Alice Bah Kuhnke (les Verts). Chacun d’eux défendra brièvement sa vision mardi matin, avant le scrutin.
Même si, les sociaux-démocrates (S&D) vont laisser le champ libre aux conservateurs du PPE, en raison d’un subtil jeu d’équilibre des pouvoirs selon lequel le poste de président est partagé à tour de rôle avec le PPE, la présentation de la candidate des Verts est toutefois susceptible de rallier des voix d’eurodéputés réticents à soutenir Roberta Metsola.
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Et ce, en raison de ses positions anti-avortement, une ligne très largement répandue à Malte, dernier pays dans l’UE où l’IVG reste complètement illégale, qui passent mal auprès de nombreux eurodéputés.
“L’eurodéputée maltaise n’a jamais caché son hostilité à l’avortement, et malgré un discours qui se veut féministe, Roberta Metsola a voté, en septembre dernier, contre un texte qui visait à criminaliser les violences faites aux femmes, explique Alix Le Bourdon, correspondante de France 24 à Bruxelles. Résultat, pendant sa campagne, elle a voulu rassurer en affirmant que les positions du Parlement européen passeraient toujours devant ses convictions personnelles”.
Députée européenne depuis 2013 et vice-présidente du Parlement depuis 2020, Roberta Metsola, mère de 4 enfants, a gagné récemment en visibilité en assurant l’intérim de David Sassoli, éloigné de l’hémicycle à l’automne pour des raisons de santé.
“Il est temps que le Parlement européen soit dirigé par une femme”, a-t-elle récemment déclaré, alors qu’elle s’apprête à devenir la première femme à présider le Parlement européen depuis 20 ans. L’institution, qui vote les propositions de loi et décide du budget de l’UE, n’a été présidé qu’à deux reprises par des femmes depuis la première élection de ses membres au suffrage universel direct en 1979, les Françaises Simone Veil et Nicole Fontaine.
42 ans après Simone Veil
Pendant sa campagne, elle a appelé les députés européens à sortir de leurs “bulles” de Strasbourg et Bruxelles pour écouter les préoccupations des citoyens, tout en cherchant à afficher un profil moins polémique.
“L’eurodéputée, qui fait partie de l’aile la moins conservatrice de son parti, affiche des positions plutôt progressistes sur d’autres sujets comme les droits de la communauté LGBTQ ou encore l’immigration, souligne Alix Le Bourdon. Néanmoins le symbole de son élection annoncée est très fort plus de 40 ans après que Simone Veil a été portée à la tête de la même institution”.
Récemment contactée par France 24, l’eurodéputée insoumise Manon Aubry, avait estimé qu’il s’agirait “d’un signal désastreux 42 ans après Simone Veil et alors que plusieurs États membres s’attaquent à l’IVG et que des milliers de polonaises défilent dans les rues depuis plus d’un an pour défendre le droit à disposer de leurs corps”.
Interrogé sur le sujet le 9 décembre dernier, alors que doit débuter la présidence française de l’Union européenne, Emmanuel Macron a indiqué que “c’est aux parlementaires européens de choisir leur président ou leur présidente. J’espère qu’ils le feront avec l’esprit de cohérence et en fidélité avec les combats qui sont les leurs”.
Cependant, Roberta Metsola est loin d’être aussi clivante qu’il n’y paraît. En pointe dans la lutte contre la corruption, elle a appelé en décembre 2019 à la démission du Premier ministre maltais, après l’assassinat de la journaliste Daphne Caruana Galizia. Par ailleurs, Roberta Metsola jouit d’une bonne réputation au sein du Parlement.
“C’est une travailleuse qui a des frontières relativement claires avec l’extrême droite, ce qui n’est pas toujours le cas dans sa famille politique”, reconnaît Manon Aubry.
En cas de victoire, Roberta Metsola deviendrait également la plus jeune présidente de l’institution.
Avec AFP et Reuters