Une lourde amende de 200 millions d’euros a été infligée mardi à Amazon et Apple en Italie par le gendarme de la concurrence qui reproche aux deux géants d’internet d’avoir restreint l’accès à la plateforme Amazon de certains revendeurs de produits Apple.
Des géants d’internet frappés au portefeuille pour des pratiques anti-concurrentielles. L’Italie a condamné mardi 23 novembre Amazon et Apple à une lourde amende de 200 millions d’euros pour avoir restreint l’accès à la plateforme de certains revendeurs de produits Apple, de “manière discriminatoire”, selon le gendarme de la concurrence.
Cette amende intervient alors que les pays de l’Union européenne ont multiplié ces derniers mois les sanctions financières contre les poids lourds américains et chinois du numérique, dans un souci de mieux réguler leurs activités.
Un comité clé du Parlement européen a par ailleurs adopté mardi un projet de règlement sur les marchés numériques (“Digital Markets Act”, DMA) pour mieux réguler internet et mettre fin aux abus de pouvoir des géants du secteur.
Ce projet doit encore être adopté par le Parlement en séance plénière puis par les États membres avant d’entrer en vigueur.
Des “restrictions” afin d’augmenter les gains
L’Antitrust italien a “infligé une sanction de 68,7 millions d’euros aux sociétés du groupe Amazon et une sanction de 134,5 millions d’euros aux sociétés du groupe Apple”, indique un communiqué.
L’enquête ouverte par l’autorité italienne “a permis d’établir que certaines clauses du contrat signé le 31 octobre 2018 interdisant à des revendeurs officiels et non-officiels de produits Apple et Beats d’utiliser la plateforme Amazon.it et permettant la vente de produits Apple et Beats sur ce marché seulement à Amazon et à certains vendeurs choisis individuellement et de manière discriminatoire, violent l’article 101 du Traité de fonctionnement de l’UE”.
Selon le gendarme italien, l’enquête a aussi permis d’établir “la volonté” des deux entreprises “d’introduire des restrictions purement quantitatives du nombre de revendeurs” afin d’augmenter leurs gains.
Ce comportement est d’autant plus grave aux yeux de l’Antitrust italien qu'”au moins 70 % des achats de produits électroniques grand public en Italie” se font sur Amazon.
“Des procédures analogues” lancées en Allemagne et en Espagne
“Nous sommes en désaccord profond avec la décision et nous ferons appel”, a réagi Amazon dans un communiqué parvenu à l’AFP, qualifiant la sanction “d’injustifiée et disproportionnée”.
Le groupe nie tirer des avantages de l’exclusion de revendeurs “car notre modèle de business est basé sur leur succès”. “Nous pensons n’avoir rien fait de mal et nous présenterons un appel”, a indiqué pour sa part Apple, assurant être engagée en faveur “de la sécurité de nos clients et de l’intégrité des produits qu’ils achètent”.
Le régulateur italien rappelle que la jurisprudence de la Cour de justice de l’UE établit que “les systèmes de distribution, pour être compatibles avec les règles de la concurrence, doivent se baser sur des critères de nature qualitative, non discriminatoire et s’appliquer de manière égale à tous les revendeurs potentiels”.
Cette enquête aura également servi de modèle “aux autorités nationales de la concurrence en Allemagne et en Espagne qui ont aussi lancé des procédures analogues”, assure le gendarme italien de la concurrence.
Pratique “dommageable pour les consommateurs”
L’association des consommateurs Codacons s’est pour sa part félicitée : “Toute limitation d’accès aux opérateurs sur les plateformes de commerce électronique représente un dommage pour les consommateurs”, a déclaré Carlo Rienzi, président de Codacons, cité par l’agence AGI.
Dans ce cas concret, “les restrictions imposées aux vendeurs de produits Apple d’une part limitait le choix pour les acheteurs et d’autre part réduisaient la possibilité d’obtenir des rabais”, selon lui.
Le gendarme italien de la concurrence est coutumier de ce genre de sanctions. En mai, il avait ainsi infligé une amende de 102 millions d’euros à Google pour abus de position dominante, mettant en cause son refus d’accepter sur sa plateforme Google Play une application tierce permettant de trouver des bornes de recharge pour les voitures électriques.
L’Italie n’est pas le seul pays à examiner de près le comportement de ces sociétés technologiques qui dominent le marché mondial.
L’autorité de la concurrence américaine (FTC) et de nombreux États américains ont ainsi lancé des enquêtes et des poursuites contre Google, Apple, Facebook et Amazon – les fameux GAFA -, accusés d’abus de position dominante sur leurs différents marchés, des réseaux sociaux à la publicité numérique en passant par le commerce en ligne.
Avec AFP